M. Gérard Delfau attire l'attention de Mme la secrétaire d'Etat aux personnes handicapées sur la situation très fragilisée des structures spécialisées qui accueillent des personnes handicapées dans l'Hérault. Les enfants autistes, jusqu'à l'âge de 12 ans, sont pris en charge dans des instituts médico-éducatifs (IME) qui n'ont ni les moyens financiers ni l'encadrement nécessaire et un seul établissement est habilité à accueillir les plus âgés. La poussée démographique rend plus dramatique encore l'allongement des listes d'attente pour accéder à ces établissements. Il constate et regrette qu'aucune des mesures annoncées l'année dernière ne se soit concrétisée dans l'intérêt des président de l'association l'Ensoleillade qui gère une maison d'accueil spécialisée (MAS), un IME et un service d'éducation spécialisée et de soins à domicile (SESSAD), il exprime sa très grande inquiétude quant à la pérennité à court, moyen et long termes des budgets des établissements d'accueil spécialisé dans l'Hérault. Au moment où le Président de la République a déclaré cause nationale la mise en place de mesures en faveur des personnes handicapées et alors que le Gouvernement a fait discuter au Sénat un projet de loi proposant des réformes en leur faveur et imposant des responsabilités supplémentaires en la matière aux collectivités locales, il lui demande quelles réponses concrètes elle va mettre en oeuvre, tant en terme de budget que de moyens humains, pour sortir ce secteur de l'impasse, et selon quel calendrier. Il y a urgence !
M. Gérard Delfau. Une nouvelle fois, madame la secrétaire d'Etat qui êtes en charge des personnes handicapées, je veux attirer votre attention sur la situation préoccupante du secteur médico-social dans l'Hérault. Je dis « une nouvelle fois », parce qu'il y a un an, dans cet hémicycle, je posais une question orale à ce sujet à Mme Marie-Thérèse Boisseau, alors titulaire de ce poste.
Dans sa réponse, celle-ci reconnaissait qu'un retard considérable avait été pris depuis une dizaine d'années en Languedoc-Roussillon du fait de la poussée démographique, dans la création de places pour l'accueil des personnes en situation de handicap au sein des établissements spécialisés. Elle m'annonçait un plan de rattrapage couvrant les trois départements du Languedoc-Roussillon particulièrement touchés : le Gard, l'Hérault, les Pyrénées-Orientales.
Simultanément, elle se rendait dans le Gard et confirmait ce propos. Quelques mois après, ne voyant pas venir les moyens annoncés, les associations gestionnaires se sont regroupées dans une coordination et ont effectué, en vain, plusieurs démarches auprès de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales, la DDASS, mais aussi auprès de la caisse régionale d'assurance maladie, la CRAM, et auprès de M. le préfet de région.
Dans la foulée, et comme l'administration ne nous fournissait pas les chiffres, un groupe de travail composé de directeurs d'établissements a été chargé de faire un inventaire précis des dossiers en attente. Le résultat, s'agissant des enfants et des adolescents, dépasse tout ce que nous avions craint.
Voici quelques éléments de ce constat que l'administration ne peut récuser. Dans le seul département de l'Hérault, pour deux enfants accueillis, un est en attente « sans solution », selon la terminologie administrative. Le nombre de résidants hébergé au titre de l'amendement Creton est équivalent à l'effectif d'une MAS.
Pour les adultes, l'inventaire est en cours, et déjà l'effectif des instituts médico-pédagogiques, les IME, s'ajoutant aux enfants qui n'ont pas trouvé de place jusqu'ici, laisse présager que la situation sera plus préoccupante encore.
En outre, il faut prendre en compte le vieillissement des personnes en situation de handicap au sein des MAS. Un dossier d'extension de l'association que je préside a été purement et simplement rejeté par l'administration, sans instruction de sa part.
Enfin, il y a le cas des enfants autistes. Le département de l'Hérault ne connaît pas, au niveau de sa DDASS, la mesure de l'accueil temporaire. Quand je m'en inquiète, on me dit que ce n'est pas possible et qu'il n'y a pas de crédit pour cela.
De plus, les budgets alloués sont insuffisants au point que la grande majorité des établissements a introduit un recours contentieux devant la cour d'appel de Bordeaux. Les uns après les autres, les établissements gagnent face à l'administration, mais bien sûr sans qu'il y ait de conséquence puisque l'État n'applique pas la décision prise par la justice.
J'ajoute pour finir que, jusqu'à ces derniers mois, c'est-à-dire jusqu'à l'arrivée du nouveau directeur départemental, les relations étaient tellement tendues qu'aucun dialogue positif ne pouvait avoir lieu entre les présidents, les directeurs et votre administration déconcentrée.
Voilà, madame la secrétaire d'État, le chantier que vous trouvez. J'ai parlé de l'Hérault, mais vous savez que cela concerne en fait trois des cinq départements de la région Languedoc-Roussillon. Ce n'est pas un hasard si ma question vient après celle de ma collègue Mme Beaudeau concernant l'Ile-de-France, parce que, dans les deux cas, c'est sans doute une croissance démographique forte, et peut-être une moindre culture locale et nationale de ce type de problème, qui nous met dans la situation que je suis en train de décrire et dont il faut sortir.
Si nous n'y parvenons pas, madame la secrétaire d'Etat, par votre intervention, nous irons vers une confrontation entre, d'une part, les parents et les associations gestionnaires et, d'autre part, l'Etat, ce que nul ne peut souhaiter.
C'est pourquoi je demande qu'une réunion se tienne d'urgence sous votre autorité afin d'affiner le constat, mais surtout d'amorcer le plan de rattrapage et de remise à niveau dont, je le sais bien, les effets ne se feront sentir qu'après plusieurs années.
Madame la secrétaire d'Etat, cessons ce dialogue de sourds. Nous devons redonner espoir, renouer les fils d'un véritable dialogue afin de porter remède à toutes ces situations préoccupantes, à toutes ces misères morales et physiques que ni vous ni nous ne pouvons supporter.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.
Mme Anne-Marie Montchamp, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées . Monsieur Delfau, vous attirez mon attention sur la situation des établissements spécialisés dans le département de l'Hérault, notamment sur les structures accueillant des enfants et des adultes autistes.
La région Languedoc-Roussillon accuse, il est vrai, un déficit de places en établissement médico-social pour les personnes handicapées. Le Gouvernement, conscient de la situation difficile ainsi créée, a accompli un effort général en matière de financement des structures médico-sociales tant pour les enfants et adolescents que pour les adultes, et entend aussi mettre fin aux disparités régionales.
Le développement de plans spécifiques en faveur de certaines personnes handicapées a été complété par une enveloppe, dite de rebasage, qui vient d'être notifiée aux différentes régions. La région Languedoc-Roussillon a ainsi bénéficié d'une enveloppe complémentaire de 10 808 936 euros, qui devrait permettre d'améliorer très sensiblement la situation de la trésorerie de ces établissements.
En outre, la prise en charge de l'autisme et la nécessité de proposer des réponses spécifiques aux personnes qui en sont atteintes et à leur famille retiennent toute l'attention du Gouvernement.
En décembre 2000, le rapport remis au Parlement par le Gouvernement faisait état du bilan du plan de rattrapage conduit entre 1995 et 2000 qui a permis la création de 2033 places. Face aux besoins des personnes et de leurs familles, ces efforts ont été poursuivis et amplifiés.
De nouvelles places ont pu être créées pour les enfants et adolescents autistes à partir de programmations interdépartementales élaborées par les préfets de région, en liaison avec les préfets de département, dans le cadre du programme triennal 2000-2003 et de crédits spécifiques qui ont été alloués au titre de l'année 2004.
La région Languedoc-Roussillon a ainsi bénéficié, dans le cadre des différents plans pour les enfants et adolescents autistes conduits entre 2000 et 2003, d'une enveloppe de 1 046 819 euros. En 2004, les mesures nouvelles inscrites en faveur des personnes handicapées ont connu une augmentation significative de 30% et ont été réparties entre les régions sur la base des taux d'équipements existants pour répondre de manière plus volontariste à leurs besoins. Si l'initiative a été laissée aux régions pour l'utilisation de leur enveloppe en faveur des enfants, il a été précisé que l'enveloppe destinée aux publics prioritaires, dont les personnes atteintes d'autisme, ne pouvait être inférieure à la tranche 2003 du plan triennal.
S'agissant des adultes lourdement handicapés, dans le cadre de la répartition des moyens nouveaux, pour la création de MAS et de FAM, les difficultés rencontrées par le Languedoc-Roussillon ont été particulièrement prises en compte dans le cadre du plan quinquennal 1999-2003. Les crédits en faveur de cette région ont été, entre 1999 et 2003, largement augmentés puisque l'enveloppe a été portée de 1 959 682 à 3 744 424 euros. Pour la seule année 2004, cette enveloppe atteint 7 060 724 euros.
Enfin, je vous rappelle qu'un nouveau programme pluriannuel prévoyant, entre 2005 et 2007, la création de 1 800 places par an en établissement et service pour enfants et adolescents handicapés, 7 500 places de MAS et de FAM, 4 500 places en services d'accompagnement et 8 000 places de CAT a été annoncé à l'occasion de la présentation du projet de loi pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. La répartition régionale de ces crédits doit être déterminée au regard de l'évaluation des besoins, des projets à l'étude et des moyens affectés.
Outre la création de places dans les établissements médico-sociaux, il convient aussi de relever que des instructions ont été transmises aux services déconcentrés pour favoriser la diversification et la personnalisation des modes de prise en charge. De plus, depuis 1999, six centres de ressources sur l'autisme, dont un à Montpellier, ont été créés. D'autres créations devraient intervenir, notamment dans le cadre du plan 2005-2007, afin d'assurer la couverture des différentes régions.
M. le président. La parole est à M. Gérard Delfau.
M. Gérard Delfau. Madame la secrétaire d'Etat, je prends bonne note de l'enveloppe de rebasage de 10 millions d'euros que vous avez annoncée pour la trésorerie des établissements. La somme me paraît extrêmement modique au regard des besoins de l'ensemble de la région Languedoc-Roussillon, mais elle est évidemment bienvenue.
S'agissant de l'autisme, puisque vous avez choisi de mettre l'accent sur cet aspect de ma question, qui était beaucoup plus globale, j'avoue que je suis resté sur ma faim. Le retard est colossal. Il n'y a pas, je le répète, de mise en pratique de l'accueil temporaire et, sans votre intervention, il n'y a pas de raison que vos services déconcentrés ne continuent pas à prendre des décisions tout seuls et à les signifier dans les lettres les plus sèches qui soient aux présidents d'associations, dont je fais partie, qui ne peuvent faire face aux situations préoccupantes qui leur sont exposées.
D'autre part, vous n'avez pas évoqué le problème du vieillissement des populations dans les MAS. Même s'il est un peu tôt, par rapport à la réflexion globale qui est engagée, pour examiner ce sujet, je souhaite que nous ayons l'occasion d'y revenir. Je vous rappelle, madame la secrétaire d'Etat, ce qui explique sans doute beaucoup de choses, que nous avons accueilli un million d'habitants dans les quinze dernières années et que l'INSEE prévoit 400 000 habitants supplémentaires entre 2000 et 2015.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Eh oui !
M. Gérard Delfau. Par conséquent, je pense que les moyens actuels ne suffisent pas et que l'on n'a pas tout à fait conscience au niveau national de cette course entre les besoins et les moyens qui sont affectés.
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