M. Georges Mouly attire l'attention de M. le ministre de la fonction publique et de la réforme de l'Etat sur la situation des fonctionnaires des collectivités locales dont la gestion pose un certain nombre de problèmes occasionnés par la diversité des statuts, aboutissant à une disparité de situations de plus en plus complexe à gérer, accroissant singulièrement l'autre problème important que représente la couverture sociale des agents territoriaux. L'inquiétante augmentation des taux de cotisation pratiquée par les assureurs est en effet passée de 30 à 90 % selon les cas, occasionnant aux communes, les plus petites en particulier, de sérieuses difficultés puisqu'elles sont contraintes d'accepter une évolution qui ne ressemble plus à un simple ajustement, mais à une pression excessive, au risque de mettre en péril leur budget.
M. Georges Mouly. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je veux me faire l'écho de quelques difficultés rencontrées par les élus locaux à l'occasion de la mise en oeuvre de l'Acte II de la décentralisation.
Parmi celles-ci, je soulignerai, dans un premier temps, la dérive des coûts des contrats de groupe pour la couverture complémentaire des agents territoriaux et, dans un second temps, la complexité des modalités de gestion des ressources humaines.
Les coûts des contrats d'assurance des risques statutaires, qui connaissent une véritable dérive, viennent s'ajouter à l'augmentation des dépenses réglementaires, telles que celles qui sont exposées au titre des analyses de l'eau potable ou encore de la lutte contre le radon. Les taux de cotisation des assurances enregistrent, selon les communes, des hausses allant de 30 % à 90 %, ce qui représente bien plus qu'un ajustement et, évidemment, une pression excessive pour les petites communes.
Certes, ce problème relève de relations privées entre les assureurs et les collectivités, mais, comme ce fut le cas pour l'assurance des risques médicaux, ne conviendrait-il pas de tout mettre en oeuvre pour y remédier et, notamment, ne serait-il pas opportun que le Gouvernement joue un rôle de médiateur ?
J'en viens à la complexité des modalités de gestion des ressources humaines et, plus précisément, au recrutement et à la progression des carrières.
Au moment où est enregistrée une forte progression des inscriptions aux concours de la fonction publique, un projet de réforme du recrutement de divers cadres d'emplois de catégories A et B de la filière médicosociale a reçu un avis défavorable du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale au motif que la suppression de l'épreuve écrite d'admissibilité entraînerait un ralentissement des procédures de licenciement.
Dans le même sens, esquissant une solution, M. Bernard Dreyfus préconise dans son rapport l'instauration de concours sur titre et la reconnaissance de l'expérience professionnelle. Il conviendrait peut-être de prendre cette suggestion en considération.
Une autre difficulté a trait à la gestion des emplois spécifiques. Des statuts particuliers ont prévu des dispositions permettant l'intégration de ces fonctionnaires. Néanmoins, certains d'entre eux n'ont pu en bénéficier et, tout en étant fonctionnaires, ne peuvent être ni mutés ni détachés. Pourrait-on envisager, monsieur le ministre, une solution de nature à résorber ces emplois spécifiques ? La question se pose également pour les emplois précaires, pour les agents contractuels qui n'ont pu bénéficier des dispositions de la loi Sapin.
J'en viens à un autre sujet, celui de la progression de carrière et de la formation.
Pour ce qui est de la progression de carrière, il semble que l'application des quotas joue un rôle de frein à la promotion sociale ; c'est d'autant plus regrettable que la promotion interne est l'un des fondements de la fonction publique. Un assouplissement de ce dispositif ne pourrait-il être envisagé ?
En matière de formation, enfin, le dispositif de formation initiale a été créé voilà quelque vingt ans, dans un contexte statutaire tout à fait différent. Aujourd'hui, les lauréats des concours de recrutement sont souvent très diplômés et la réduction des formations initiales semble s'imposer. En revanche, une adaptation statutaire serait à mes yeux bienvenue qui permettrait la formation tout au long de la carrière pour en franchir les différentes étapes.
Monsieur le ministre, j'ai bien conscience d'avoir posé plus d'une question et, par conséquent, je sais que vous n'allez probablement pas apporter, dès ce jour, toutes les précisions souhaitées, pour souhaitables qu'elles soient. Je sais bien que des projets de réforme des fonctions publiques d'Etat et territoriale sont à venir. J'ai cru pouvoir cependant, dans ces conditions, faire état de problèmes qui susciteront de plus en plus d'interrogations et se traduiront par des souhaits fermement exprimés.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué à l'industrie. Monsieur le sénateur, j'ai bien pris conscience de l'élargissement du champ de votre question. Je veux vous répondre, au nom de Renaud Dutreil, que, en application du statut de la fonction publique, les fonctionnaires territoriaux ont droit, comme les autres fonctionnaires, aux congés de maladie, aux congés de longue maladie ou de longue durée.
Chaque congé de maladie donne droit à une rémunération à plein traitement ou à demi-traitement, selon la durée de la maladie. Les employeurs territoriaux qui assument la charge financière des congés de maladie peuvent souscrire un contrat d'assurance, directement ou par le biais des centres de gestion, afin de couvrir les risques financiers liés à ces congés.
Il est vrai que les cotisations aux organismes d'assurance ont augmenté, semble-t-il, sous l'effet de la croissance des arrêts de maladie. Le Gouvernement est sensible à ce problème, mais considère qu'il n'est pas possible de diminuer la protection sociale des fonctionnaires territoriaux. Une telle mesure contreviendrait aux principes de parité entre les fonctions publiques et ne saurait donc être envisagée.
Les collectivités ont, en tout état de cause l'entière maîtrise des conditions de couverture du risque. Elles peuvent négocier leur contrat, voire le résilier et changer de prestataire. Elles peuvent aussi assumer la charge financière des arrêts de maladie selon le principe de l'auto-assurance. A ce sujet, je rappelle que le principe de liberté contractuelle, qui permet aux parties de déterminer librement les clauses du contrat, s'oppose à l'intervention des pouvoirs publics dans les relations qui se nouent entre les collectivités et leurs organismes d'assurance.
Sur les autres points évoqués, le ministre de la fonction publique présentera au Sénat, dès le mois de mars 2005, un projet de loi de transposition de la directive du 28 juin 1999 sur le travail à durée déterminée, qui interdit de renouveler sans fin les contrats à durée déterminée. Dorénavant, les CDD ne pourront plus être renouvelés après six ans que sous la forme d'un contrat à durée indéterminée, ou CDI. Il s'agit d'une mesure très importante qui mettra enfin un terme à la précarité dans la fonction publique.
Enfin, le Gouvernement prépare actuellement différentes dispositions concernant plusieurs volets importants du droit de la fonction publique, en particulier un projet de modernisation de la fonction publique territoriale et la mise en place du PACTE, ou parcours d'accès aux carrières territoriales, hospitalières et de l'Etat, dispositif qui permettra à des jeunes sans diplôme ni qualification de recevoir une formation en alternance de deux ans aux métiers de la fonction publique, puis d'être titularisés après une épreuve de sélection professionnelle. Le projet comprendra, par ailleurs, une modernisation de la formation et du recrutement.
M. le président. La parole est à M. Georges Mouly.
M. Georges Mouly. Monsieur le ministre, je vous remercie d'une réponse qui, à plus d'un titre, ne manque pas d'intérêt, qu'il s'agisse de la protection sociale ou de la résorption de l'emploi précaire, avec la perspective de la suppression du CDD, qui sera obligatoirement transformé en CDI au bout de six ans.
Il me reste à espérer que, pour les autres problèmes que j'ai évoqués - et il en est d'autres encore -, le projet de loi à venir nous donnera l'occasion d'apporter les solutions qui conviennent.
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