M. Michel Billout souhaite attirer l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales sur les conséquences importantes concernant le principe d'autonomie communale que pourrait avoir une certaine lecture de la loi de responsabilités locales n° 2004-809 du 13 août 2004. Cette loi ne doit pas devenir un outil de contrainte pour les collectivités locales. Pourtant, dans le département de Seine-et-Marne, l'autonomie communale pourrait être mise clairement en question par l'application de la loi. En effet, la possibilité offerte pour les SIVOM de se transformer en établissement public de coopération intercommunale semble parfois ne pas permettre de respecter les identités communales et les projets intercommunaux qui seraient le fruit d'études entre collectivités locales. Pourtant, les constructions intercommunales ne peuvent reposer que sur la volonté partagée de collectivités locales de construire ensemble des projets nouveaux pour lesquels l'échelon intercommunal apparaît le plus cohérent, et ce, notamment dans des domaines tels que l'aménagement du territoire, le développement économique, les actions et équipements péri-éducatifs. De plus, les politiques qui seraient mises en oeuvre par une structure intercommunale, qui n'aurait pas l'adhésion de l'ensemble de ses membres, ne pourraient être complètement pertinentes. En l'espèce, cinq communes sur les quatorze concernées se sont prononcées contre ce projet de transformation du SIVOM. Il l'interroge alors sur les moyens que le gouvernement compte mettre en oeuvre pour garantir le respect de l'autonomie communale dans la construction de structures intercommunales.
M. Michel Billout. Madame la ministre, je souhaiterais attirer votre attention sur les conséquences malheureuses que pourrait avoir l'application de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et aux responsabilités locales au regard du respect du principe de l'autonomie communale.
Je rappellerai en préalable que le principe de libre administration des collectivités territoriales est inscrit à l'article 72 de la Constitution de 1958. Ce principe a permis l'adoption de lois de décentralisation.
Je ne pense pas que la loi du 13 août 2004 ait été conçue comme un outil de contrainte des collectivités territoriales. Ce serait un comble ! Pourtant, l'autonomie communale pourrait être remise en question, dans les faits, dans le département de Seine-et-Marne.
En effet, s'il faut considérer les dispositions de l'article 152 de ladite loi comme un élément permettant de faciliter la transformation d'un syndicat intercommunal à vocation multiple en communauté de communes, le nouvel article L. 5211-41-2 inséré dans le code général des collectivités territoriales peut devenir un moyen de contraindre des communes à intégrer un établissement public de coopération intercommunale.
Prenons l'exemple d'un SIVOM composé de quatorze communes, créé voilà une trentaine d'années pour exercer un nombre de compétences très limitées, à savoir la gestion d'un équipement sportif et la collecte des ordures ménagères exclusivement.
Au fil du temps, les projets évoluent, d'autres liens se tissent avec d'autres territoires, d'autres communes. En 2004, la majorité des communes constituant le SIVOM souhaite sa transformation en communauté de communes, quitte à procéder au transfert temporaire, pour quelques mois, des compétences obligatoires afin de satisfaire aux dispositions suivantes de l'article L. 5211-41-2 du code général des collectivités territoriales :
« Lorsqu'un syndicat de communes exerce déjà, au lieu et place des communes qui le composent, les compétences fixées par le présent code pour les communautés d'agglomération ou les communautés de communes, ce syndicat peut se transformer en l'une de ces deux catégories d'établissement, sous réserve qu'il remplisse les conditions de création exigées. »
Or cinq communes membres du SIVOM ont élaboré un projet de création d'EPCI différent, avec d'autres communes voisines, selon un périmètre cohérent, présentant un intérêt communautaire clairement défini, des actions répondant bien à l'intérêt des populations, des ressources bien étudiées. Ces cinq communes représentant le quart de la population totale couverte par le SIVOM, elles ne peuvent constituer une minorité de blocage contre le projet de transformation du SIVOM en communauté de communes, puisque la décision se prend à la majorité qualifiée.
Dans ce cas, madame la ministre, la possibilité de transformation du SIVOM en communauté de communes, telle que définie à l'article 152 de la loi relative aux libertés et aux responsabilités locales, prime-t-elle sur tout autre projet ? S'il en était ainsi, des décisions prises à l'unanimité par des conseils municipaux se verraient bafouées.
De plus, comment imaginer que les politiques mises en oeuvre par une structure intercommunale puissent être pertinentes et efficaces sans l'adhésion de l'ensemble des membres de celle-ci ?
Manifestement, l'application de la loi pose un problème important à cet égard. Faut-il alors attribuer au seul préfet le rôle d'arbitre ? Ne vaudrait-il pas mieux encadrer le texte législatif, de façon à prévoir que l'exercice, par le syndicat de communes, des compétences nécessaires à sa transformation en EPCI devra obligatoirement être effectif depuis suffisamment longtemps, à savoir deux ou trois ans, afin d'éviter tout recours abusif aux dispositions de l'article 152 ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Marie-Josée Roig, ministre déléguée à l'intérieur. Monsieur le sénateur, la procédure instituée à l'article 152 de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et aux responsabilités locales vise à faciliter la transformation des syndicats de communes en structures de coopération intercommunale à fiscalité propre.
Cette procédure permet la substitution directe d'une communauté de communes ou d'une communauté d'agglomération à un syndicat préexistant, sans qu'il soit nécessaire de procéder à la dissolution préalable de ce dernier.
Elle constitue donc une option nouvelle offerte aux élus, permettant que les communes manifestent plus simplement leur volonté de faire progresser leur coopération. Les conditions de majorité selon lesquelles cette évolution peut être décidée n'ont pas été modifiées : le principe de l'autonomie communale continue de prévaloir.
Ces conditions de majorité résultent des dispositions de la loi d'orientation du 6 février 1992 relative à l'administration territoriale de la République. Comme vous le savez, monsieur le sénateur, cette loi a d'abord posé le principe que « le progrès de la coopération intercommunale se fonde sur la libre volonté des communes d'élaborer des projets communs de développement au sein de périmètres de solidarité ». Elle a ensuite mis en place des seuils de majorité qualifiée pour créer ou modifier les établissements publics de coopération intercommunale.
Ces seuils visent à la fois à respecter la volonté des communes et à empêcher les minorités de bloquer les dynamiques de territoires. Ils prévoient que les décisions doivent recueillir soit l'approbation des deux tiers des conseils municipaux représentant plus de la moitié de la population concernée, soit la majorité simple des conseils, à la condition expresse que ceux-ci représentent plus des deux tiers de la population.
Les communes représentant plus d'un quart de la population disposent par ailleurs d'un droit de veto. Ce sont ces règles qui s'appliquent dans le cas où est envisagée la transformation d'un syndicat intercommunal à vocation multiple, un SIVOM, en communauté de communes.
Le préfet conserve un pouvoir d'appréciation. Ainsi peut-il refuser la création d'une communauté s'il constate qu'il n'existe pas de véritable dynamique partagée sur le territoire, même si les conditions de majorité prescrites par la loi sont remplies.
Le Gouvernement, comme vous pouvez le constater monsieur Billout, a le souci de promouvoir le dynamisme du territoire et de préserver l'autonomie des communes.
M. le président. La parole est à M. Michel Billout.
M. Michel Billout. Je souhaite remercier Mme la ministre des précisions qu'elle a apportées et de son attachement au principe d'autonomie des communes.
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