M. Jean-Pierre Demerliat. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
M. René-Pierre Signé. Directement !
M. Jean-Pierre Demerliat. Mes chers collègues, puis-je me permettre de vous livrer quelques phrases extraites d'un texte lu à la télévision polynésienne au soir des élections de dimanche ?
« Soudain, nous avons entendu la France, la France que nous aimons, la France qui a éclairé le monde du flambeau de la liberté et du droit, la France qu'on nous avait volée avec notre victoire, la France juste, la France équitable, la France généreuse, la France fraternelle... »
Ces propos émanent non d'un nostalgique de l'empire colonial, mais d'Oscar Temaru, dont certains, ici et là-bas, essaient de nous persuader qu'il s'apprête à mener directement le territoire à la sécession, chiffon rouge que vous et vos amis, monsieur le Premier ministre, agitez pour le discréditer !
Dimanche dernier, la coalition qu'il a conduite a obtenu, aux Iles-du-Vent, une victoire sans appel. Si des élections avaient eu lieu dans l'ensemble de la Polynésie française, une majorité confortable se serait dégagée, malgré un mode de scrutin pour le moins étrange - proportionnel à un seul tour avec une prime majoritaire de 33 %, excusez du peu ! - taillé sur mesure par et pour quelqu'un que nous connaissons bien ici, ce qui illustre à l'évidence votre conception particulière de l'Etat de droit !
(Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. Raymond Courrière. Encore un ami personnel du Président de la République !
M. Jean-Pierre Demerliat. Quoi qu'il en soit, l'actuel président, revenu au pouvoir dans les conditions que l'on sait, a été largement désavoué. Il est temps maintenant que le territoire se dote d'un gouvernement en adéquation avec la volonté de ses habitants et je présume que cela va se faire dans les prochains jours.
Monsieur le Premier ministre, je ne doute pas que vous aurez à coeur de faire respecter la volonté populaire, d'assurer l'impartialité de l'Etat et d'aider la Polynésie française à construire son avenir, notamment économique, selon les voeux de la majorité de sa population.
Pouvez-vous me confirmer que telles sont bien les intentions de votre Gouvernement ?
(Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. - M. Robert Hue applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Plusieurs sénateurs du groupe socialiste. Non, c'est au Premier ministre de répondre !
M. René-Pierre Signé. Elle est discréditée !
Mme Brigitte Girardin, ministre de l'outre-mer. Monsieur le sénateur, je voudrais souligner que, depuis le début de la crise polynésienne, l'Etat et le Gouvernement ont concentré toute leur action sur deux objectifs.
Il s'agissait, en premier lieu, de faire respecter la loi et l'Etat de droit en Polynésie, et vous voudrez bien me donner acte du fait que le Conseil d'Etat, à travers une trentaine de décisions, a validé toutes les positions que j'ai défendues et que vous n'avez cessé, à tort par conséquent, de critiquer !
(Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Charles Revet. Très bien !
Mme Brigitte Girardin, ministre. En second lieu, nous n'avons pas ménagé nos efforts pour essayer de faire émerger entre toutes les forces politiques polynésiennes des solutions consensuelles respectant à la fois leur choix et le droit.
C'est tout le sens des discussions que j'ai menées à Paris, en novembre dernier, avec l'ensemble des partenaires concernés. Par conséquent, je le redis ici avec force : nous ne changerons pas de position ; nous continuerons, dans une stricte neutralité,...
(Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. René-Pierre Signé. Une neutralité orientée !
Mme Brigitte Girardin, ministre. ... à respecter la loi et à essayer de favoriser un accord entre toutes les parties. C'est la seule façon de défendre et de faire respecter la démocratie.
J'ai lancé un appel à la responsabilité de tous, appel que je renouvelle ici, et je réitère ma totale disponibilité afin d'éviter que l'on débouche sur une impasse.
Mme Catherine Tasca. Il y a une majorité !
Mme Brigitte Girardin, ministre. Je voudrais rappeler avec force au Sénat que, en Polynésie française comme dans n'importe quelle collectivité territoriale de la République, nous devons respecter le libre fonctionnement des institutions locales...
M. Raymond Courrière. Par le suffrage universel !
Mme Brigitte Girardin, ministre. ... sans interférer dans le libre choix des élus !
(Applaudissements sur plusieurs travées de l'UMP.)
M. René-Pierre Signé. C'est honteux ! D'ailleurs, les applaudissements sont bien discrets !
M. Jean-Pierre Bel. Qui a gagné ?
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