M. Christian Demuynck. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Monsieur le ministre, chaque nuit depuis une semaine, nos quartiers, plus particulièrement ceux de mon département, la Seine-Saint-Denis, sont devenus le théâtre de violences inadmissibles pour l'ensemble de nos concitoyens, en premier lieu pour ceux qui y vivent : voitures brûlées par dizaines, dégradations inqualifiables de bâtiments représentant l'Etat et, maintenant, tirs à balles réelles contre les forces de sécurité.
Il est temps, me semble-t-il, de rétablir un discours de vérité. Cessons de parler de jeunes lorsque l'on fait référence à des voyous, des délinquants, voire des criminels.
M. Jacques Mahéas. Encore des insultes, cela continue !
M. Christian Demuynck. Il est essentiel de préciser que ces violences sont le fait d'une minorité agissante ; l'immense majorité des jeunes qui vivent dans ces quartiers ne sont pas ces fauteurs de désordre. Ils subissent au premier chef les conséquences de ces violences. Cela doit être dit, car ils ne doivent pas être stigmatisés plus longtemps.
(Applaudissements.)
Mme Eliane Assassi. C'est ce que nous disons tous !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Les jeunes ne sont ni des voyous ni des délinquants, c'est cela qu'il faut dire !
M. Christian Demuynck. Je souhaite souligner également le signal fort que vous avez lancé à nos concitoyens et aux forces de police en indiquant que l'Etat ne subirait pas plus longtemps le fait que les quartiers soient mis en coupe réglée. Une police confortée dans ses missions et à qui l'on demande de faire son métier, c'est-à-dire interpeller les délinquants, est la première des garanties apportées à son efficacité au service de tous.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Cessez de les insulter !
M. Christian Demuynck. A ce titre, monsieur le ministre, je souhaite connaître le bilan de l'action des forces de l'ordre, plus particulièrement celui des interpellations, afin que ces actes inadmissibles ne demeurent pas impunis.
Enfin, vous avez annoncé depuis de nombreux mois des orientations qui, si elles font débat - je pense à la discrimination positive -, ont le mérite de rompre l'alternative simpliste que l'on propose trop souvent entre laxisme et répression.
Je souhaite donc, monsieur le ministre, connaître les initiatives que vous envisagez et, lorsque des actions ont été engagées, quels résultats ont été obtenus.
(Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Nicolas Sarkozy, ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le Premier ministre m'a demandé ce matin de recevoir les trois familles des victimes de Seine-Saint-Denis. Nous nous étions engagés, dans le bureau du Premier ministre, à leur donner, dès que nous les aurions, tous les éléments d'information sur l'enquête qui en cours pour savoir exactement ce qui s'est passé.
J'ai reçu ce matin, à sept heures, le rapport de l'Inspection générale des services. En fin de matinée, je l'ai remis, tel que je l'avais reçu, aux familles et à leurs avocats, parce que la police républicaine se doit d'être au-dessus de tout soupçon.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il y a du boulot !
M. Nicolas Sarkozy, ministre d'Etat. Nous n'avons rien à cacher. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.) La vérité sur ce qui s'est passé, nous la devons aux familles, mais également aux fonctionnaires de police, qui doivent, eux aussi, être respectés parce qu'ils sont respectables.
La transparence qu'a voulue le Premier ministre a trouvé sa concrétisation ce matin.
M. René-Pierre Signé. C'est un peu tard !
M. Nicolas Sarkozy, ministre d'Etat. Les familles en ont pris acte et elles nous ont remerciés.
Face à la gravité de ces événements, il n'y a qu'une seule ligne politique. Elle a été fixée par le Premier ministre autour de deux mots auxquels je me réfère : fermeté et justice.
Mme Hélène Luc. Il ne faut pas faire de provocation !
M. René-Pierre Signé. Et la prévention !
M. Nicolas Sarkozy, ministre d'Etat. La fermeté sans la justice aboutit à l'extrémisme ; la justice sans la fermeté conduit au laxisme. La politique menée par le Gouvernement, sous la conduite du Premier ministre, est faite de fermeté et de justice.
Cette nuit, la police a procédé à quarante et une interpellations. En une semaine, il y a eu cent quarante-trois interpellations : voilà ce qui change, heureusement, dans notre pays.
(Oh ! sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC. - Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Par rapport au gouvernement Raffarin ?
M. Nicolas Sarkozy, ministre d'Etat. Je suis persuadé que le jour où l'on comprendra qu'incendier la voiture de son voisin est un acte inacceptable dont on devra rendre compte devant la justice, on fera attention et on ne brûlera plus les véhicules des autres.
Mme Raymonde Le Texier. Ne parlez pas trop vite, cela va continuer cette nuit !
M. Nicolas Sarkozy, ministre d'Etat. Nous parlons au nom de tous ceux qui vivent dans ces quartiers et qui n'ont pas à accepter ce qu'aucun d'entre nous n'accepterait.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Mais vous ne vivez pas dans ces quartiers !
M. Nicolas Sarkozy, ministre d'Etat. Une nouvelle stratégie a été mise en place. Grâce aux groupements d'intervention régionaux, les GIR, nous allons faire ce que personne n'a encore fait.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Si je comprends bien, le gouvernement Raffarin n'a rien fait !
M. Nicolas Sarkozy, ministre d'Etat. Nous allons nous intéresser au patrimoine de ceux qui ne travaillent pas et qui pourtant possèdent des voitures que ceux qui travaillent ne peuvent pas se payer.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
Mme Eliane Assassi. C'est du populisme !
M. Nicolas Sarkozy, ministre d'Etat. En accord avec le Premier ministre, j'ai demandé que les renseignements généraux soient chargés de trouver les caïds, les chefs de bande qui tiennent l'économie souterraine.
Mme Eliane Assassi. Ce ne sont pas les chefs de bande qui ont tué les gamins !
M. Nicolas Sarkozy, ministre d'Etat. Enfin, les forces mobiles, plutôt que de se consacrer à l'ordre public pour encadrer des manifestations, sont désormais vouées, pour un effectif de deux milles personnes, à renforcer la sécurité dans nos quartiers.
Mesdames, messieurs les sénateurs, nous appliquerons la loi partout, parce que la police républicaine et la gendarmerie nationale sont partout les bienvenues sur le territoire de la République française.
(Très bien ! et applaudissements prolongés sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.