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Joël Bourdin
Question d'actualité au gouvernement N° 558 au Ministère de l'emploi


Bilan et conséquences de la contamination par l'amiante

Question soumise le 4 novembre 2005

M. Joël Bourdin. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes.

La mission d'information du Sénat sur l'amiante a rendu son rapport le 26 octobre dernier. Son rapporteur, Gérard Dériot, dont je salue la très grande compétence et le travail de qualité, ...

M. Jean Bizet. Très juste !

M. Joël Bourdin. ... a tenté d'évaluer la progression du drame sanitaire annoncé, de mesurer l'efficacité des dispositifs de réparation pour les victimes et de faire le point sur les problèmes de responsabilité. Tous les membres de cette mission se sont efforcés de comprendre comment une telle tragédie avait pu se développer, le précédent de l'amiante devant, hélas ! servir de leçon pour que de tels drames sanitaires ne se reproduisent pas.

L'amiante est à l'origine de 35 000 décès depuis 1960 et serait susceptible de faire 60 000 victimes supplémentaires dans les années qui viennent.

Mme Hélène Luc. Malheureusement !

M. Joël Bourdin. Notre collègue Gérard Dériot confirme, dans son rapport, un diagnostic désormais bien établi : il y a eu utilisation massive de l'amiante jusqu'à la mise en place, en 1977, d'une réglementation spécifique pour protéger la population et les travailleurs ; néanmoins, une catastrophe sanitaire s'est produite.

La mission d'information a ainsi examiné les améliorations qui seraient susceptibles d'être apportées aux mécanismes de réparation pour les victimes. Ainsi, dans les vingt ans à venir, entre 27 milliards d'euros et 37 milliards d'euros devraient être consacrés à la prise en charge des victimes de l'amiante, par l'intermédiaire de fonds tels que le FIVA, le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante, notamment, ce qui pose un problème de financement

Par ailleurs, il apparaît nécessaire de prévenir de nouvelles contaminations, en renforçant les dispositifs de précaution, de s'assurer de l'innocuité des produits de substitution, comme les fibres céramiques réfractaires, et de réglementer la mise sur le marché des produits chimiques.

Monsieur le ministre, quelles dispositions le Gouvernement entend-il prendre pour tenir compte des recommandations formulées dans ce rapport et pour répondre aux enjeux de prévention et de réparation des risques professionnels ?
(Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

Réponse émise le 4 novembre 2005

M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes. Monsieur le sénateur, c'est une véritable catastrophe sanitaire que nous révèle la mission commune d'information parlementaire sur l'amiante. Vous avez cité des chiffres terribles et difficilement compréhensibles si l'on ne prend pas en compte l'effet de différé qui explique le délai existant entre l'interdiction de l'amiante prononcée en 1996 et les conséquences de son utilisation, qui doivent se faire sentir jusqu'en 2030.

La France a milité cette année, au sein de l'Organisation internationale du travail, pour une interdiction totale de l'amiante dans tous les pays, car l'amiante n'est pas encore interdit partout.

Mme Hélène Luc. Absolument ! Et on en produit encore !

M. Gérard Larcher, ministre délégué. Le Gouvernement partage l'émotion des victimes et des familles, et moi qui suis originaire de Flers, dans l'Orne, tout près de la vallée de la Veyre, plus que d'autres. Ce drame évoque pour moi des familles connues, des visages familiers.

Je tiens à saluer la qualité du rapport de MM. Gérard Dériot et Jean-Pierre Godefroy, élaboré sous la présidence de M. Jean-Marie Vanlerenberghe, et je remercie tous ceux qui y ont apporté leur contribution. Il s'agit d'un rapport de vérité, rédigé sans concession.

Mme Hélène Luc. Pensez aussi aux veuves des victimes de l'amiante, monsieur le ministre !

M. Gérard Larcher, ministre délégué. Dans le prolongement de ce rapport, il faut prendre en compte l'insuffisance de l'expertise indépendante, la faiblesse des contrôles et l'absence de sens des responsabilités d'un certain nombre d'entreprises.

A cet effet, un plan santé au travail a été adopté par le conseil des ministres en février 2005. Une ordonnance prise en septembre dernier a créé l'Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail. Dotée d'un budget de 5,6 millions d'euros dans le budget de 2005, cette agence devrait voir ses crédits passer à 8,6 millions euros dans le budget de 2006. Nous avons déjà commandé des études relatives aux éthers de glycol, aux fibres céramiques ou encore aux risques liés à l'utilisation de certains matériaux, notamment les nanomatériaux. Nous sommes également attentifs à la directive Reach.

Une des missions majeures de l'inspection du travail est le contrôle. Il est nécessaire de renforcer dans les régions les équipes pluridisciplinaires comprenant des ingénieurs et des médecins pour aider l'inspection du travail à remplir cette tâche.

M. Robert Bret. Il manque 700 inspecteurs !

M. Gérard Larcher, ministre délégué. Enfin, dès 2004, nous avons lancé un contrôle des chantiers de désamiantage. Ainsi, cette même année, 74 contrôles ont été réalisés, contre plus de 780 au cours des neuf derniers mois. Je présenterai les résultats de cette action la semaine prochaine, mais je peux dire tout de suite que nous avons été obligés de constater que, malheureusement, ces chantiers de désamiantage ne suivaient pas les conditions imposées par les textes.

Avec Xavier Bertrand, nous avons demandé à l'IGAS, l'Inspection générale des affaires sociales, un rapport relatif aux préretraites amiante. Nous attendons le rapport de l'Assemblée nationale pour la fin de l'année et le Gouvernement, sous l'autorité du Premier ministre, décidera des mesures complémentaires qui s'imposent pour prendre totalement en charge ce drame de l'amiante.
(Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

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