M. Michel Billout attire l'attention de M. le ministre délégué à l'industrie sur la fermeture annoncée des activités d'équipement spatial de SNECMA Moteurs sur le site de Villaroche, en Seine-et-Marne. Outre les questions d'emploi, cette mesure témoigne de la volonté des dirigeants du groupe SAGEM SNECMA d'abandonner des secteurs d'activités qualifiés insuffisamment porteurs, alors qu'ils se sont avérés jusqu'à maintenant très utiles à la recherche industrielle. Il s'agit d'une première mesure prise après l'entrée en bourse de la SNECMA en juin 2004 qui semble bien avoir entériné le changement de priorité de l'entreprise, initialement publique, vers la recherche du critère de rentabilité financière. En effet, en fusionnant avec SAGEM, la participation de l'Etat est passée de 62 % à une détention minoritaire du capital. Pourtant, le secteur aéronautique est un secteur clef qui ne peut être laissé aux jeux boursiers et aux intérêts financiers à l'encontre de l'intérêt général et de celui des salariés. Il y aurait pourtant urgence à développer d'autres priorités pour le développement du secteur aéronautique, notamment en investissant pour le développement des techniques et des capacités de production. De plus, à l'heure de la révolution technologique et informationnelle, le Gouvernement devrait permettre au niveau européen un travail en coopération pour partager les coûts de développement. Il est vrai que la politique actuelle du Gouvernement est dans la droite ligne du projet de constitution européenne qui prône la logique des profits maxima et de la libre concurrence. Cependant, cette politique aboutit à un gâchis humain, à la disparition des services d'intérêt général mais aussi à l'irresponsabilité sociale accrue des entreprises. Il souhaite alors connaître les mesures que compte prendre le Gouvernement pour développer une politique spatiale ambitieuse qui passe nécessairement par le maintien de la force industrielle de la SNECMA, notamment dans le département de Seine-et-Marne.
M. Michel Billout. Monsieur le ministre, alors que le succès du salon du Bourget a fait la démonstration du plein essor des activités aéronautiques, l'arrêt des activités d'équipements spatiaux de SNECMA Moteurs sur le site de Villaroche Nord, en Seine-et-Marne, est annoncé.
Ce projet de fermeture illustre le risque d'abandon d'une réelle ambition industrielle de ce groupe, maintenant privatisé, dans ce secteur d'activité.
En effet, cette mesure n'est-elle pas une conséquence directe de l'entrée en bourse de la SNECMA en juin 2004 qui semble bien avoir entériné le changement de priorité de l'entreprise vers la recherche exclusive de la rentabilité financière ?
De fait, en fusionnant avec la SAGEM, l'Etat est passé d'une participation de 62 % à une détention minoritaire du capital.
Pourtant, le secteur aéronautique et spatial est un secteur-clé, qui ne peut être laissé aux jeux boursiers et aux intérêts financiers au mépris de l'intérêt général.
Comme le souligne Mme la ministre de la défense dans Les Dossiers de l'abécédaire parlementaire du mois de juin, « la maîtrise de l'espace est un défi permanent » et doit représenter « la nouvelle ambition industrielle et stratégique de l'Europe ». Toujours selon elle, « les Européens doivent assurer ensemble la pérennité des activités et augmenter l'effort de recherche ».
Comment, à l'aune de ces déclarations, peut-on comprendre la fermeture de l'important site de production de Villaroche, où les salariés ont su acquérir un grand savoir-faire dans le domaine aérospatial ?
En outre, cette prise de décision a été accélérée par la volonté de la SNECMA Moteurs de se rapprocher de la société EADS Space Transportation pour créer une société de joint-venture concernant les activités de propulsion.
Cette fusion permettrait une nouvelle fois aux entreprises d'opérer des restructurations, notamment de remettre en cause certains pôles d'activité sous prétexte de rationalisation des moyens et des personnels.
C'est précisément dans ce cadre qu'une partie des activités réalisées actuellement sur le site de Villaroche Nord seront transférées à Vernon, dont l'avenir paraît également incertain, tandis que d'autres seront cédées au plus offrant.
Il y aurait pourtant urgence à privilégier d'autres choix en faveur du développement du secteur aéronautique et spatial, notamment en investissant pour le développement des techniques et des capacités de production.
Cette fermeture annoncée correspond à une perte de savoir-faire ainsi qu'à une perte sociale inacceptable alors que d'autres solutions proposées par les salariés auraient pu être envisagées.
L'entreprise mène une politique d'autant plus surprenante qu'elle annonce, dans le même temps, son intention d'investir dans le domaine spatial, comme semble l'indiquer son implication dans le développement de plate-forme satellite sous contrat DGA ou l'acquisition du site de Valence.
De plus, cette décision de l'entreprise SNECMA aura des conséquences néfastes en termes d'emplois puisqu'elle conduit à la suppression de 108 postes dans un département déjà lourdement touché par les fermetures d'entreprises et les délocalisations, sur l'initiative de grands groupes industriels et financiers.
Enfin, à l'heure de la révolution technologique et informationnelle, le Gouvernement devrait encourager à l'échelon européen un travail en coopération pour partager les coûts de développement. plutôt qu'une logique de cession-acquisition.
L'exemple de la coopération européenne pour la création de l'Airbus A380 montre la pertinence de cette mise en commun.
Pourtant, les crédits publics destinés à la politique aérospatiale sur le plan européen et singulièrement pour la France sont en constante régression. Certains décideurs s'interrogent même sur l'utilité de l'Europe spatiale !
A l'inverse, les budgets civils pour l'espace sont six fois plus importants aux Etats-Unis qu'en Europe. Avec une telle différence, nous n'en sommes donc pas à construire l'économie la plus compétitive et la plus dynamique du monde ! La recherche spatiale semble ainsi sacrifiée.
En effet, la politique actuelle défendue par le Gouvernement s'inscrit dans la droite ligne des politiques européennes qui cherchent à garantir la profitabilité maximale des grands groupes industriels impliqués dans le spatial, quitte à prendre le risque d'une dégradation du potentiel scientifique et technique accumulé depuis des décennies.
Cette politique aboutit à un gâchis humain et industriel. Elle confirme l'irresponsabilité sociale des entreprises.
Pour toutes ces raisons, je souhaite connaître les mesures que compte prendre le Gouvernement afin de contribuer au développement d'une politique spatiale ambitieuse. Cette politique passe nécessairement par le maintien de la force industrielle de la SNECMA, notamment dans le département de Seine-et-Marne.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Léon Bertrand, ministre délégué au tourisme. Monsieur le sénateur, vous appelez l'attention de François Loos sur les activités d'équipement spatial du site SNECMA de Villaroche Nord.
Ce site, qui emploie 110 personnes, fait partie du vaste ensemble des implantations de la SNECMA à Melun-Villaroche, qui représente plus de 4 000 salariés.
Depuis plusieurs années, la situation financière du site de Villaroche Nord est difficile. Ses pertes moyennes sont de l'ordre de 20 % du chiffre d'affaires sur les trois dernières années.
Dans ce contexte, la SNECMA a présenté au comité central d'entreprise, le 3 juin 2005, un plan de sauvegarde de l'emploi qui propose à chaque salarié, soit une mutation sur le site d'activités spatiales de Vernon, dans l'Eure, soit un reclassement dans un autre établissement du groupe. Ce plan ne prévoit pas de licenciements.
Cela me conduit à répondre à vos interrogations sur la fusion entre la SNECMA et la SAGEM. Elle renforce la compétitivité du tissu industriel français et conduit à la constitution, avec SAFRAN, d'un ensemble robuste, financièrement plus stable.
Comme l'a indiqué le Premier ministre le 18 juin au salon du Bourget, l'Etat a à coeur d'accompagner le développement de l'industrie aéronautique : en trois ans, plus de 13 milliards d'euros ont été consacrés à l'ensemble du secteur, sous forme de commandes militaires.
Le soutien à la recherche et au développement représente une dimension essentielle de la politique industrielle du Gouvernement. C'est tout le sens de la politique des pôles de compétitivité.
Enfin, je citerai le soutien aux grands projets technologiques qui porteront le dynamisme de l'industrie française de demain. C'est ainsi que le Premier ministre a annoncé le doublement, dès cette année, de la dotation initiale de l'Agence de l'innovation industrielle, qui passera de 500 millions à 1 milliard d'euros.
L'ambition de la politique spatiale de la France est bien au rendez-vous.
M. le président. La parole est à M. Michel Billout.
M. Michel Billout. Je reste assez perplexe.
En effet, la fusion de grands groupes industriels, tels que la SNECMA et la SAGEM, préalables peut-être à d'autres fusions, se traduit malgré tout par une perte de savoir-faire dans un secteur qui n'est pas sans importance. Sur son site de Villaroche, la SNECMA a abandonné le secteur des équipements de satellites, alors même qu'elle était le seul partenaire industriel à intervenir dans ce domaine en France.
Il est paradoxal d'annoncer la fusion et la constitution de grands groupes financiers stables alors que la perte de notre savoir-faire sera la cause d'un handicap majeur pour la recherche-développement. Bien au contraire, il faut que, dans ces domaines, apparaisse la volonté d'un plus grand développement.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.