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Yannick Bodin
Question orale sans débat N° 740 au Ministère du commerce


Conséquences des fermetures d'entreprises en Seine-et-Marne

Question soumise le 14 avril 2005

M. Yannick Bodin attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur la fermeture de six entreprises ainsi que la perte de plus de 1 500 emplois en sud Seine-et-Marne. Six communes du sud de la Seine-et-Marne ont connu en moins d'un an la fermeture ou l'annonce de fermeture de six entreprises : Nina Ricci à Ury où 109 emplois sont concernés ; ABB à Champagne-sur-Seine (213 emplois) ; Thomson Vidéo Glass à Bagneaux (600 emplois) ; EDF à Vernou-la Celle-sur-Seine (150 emplois) ; Kappa à Vaux-le-Pénil (89 emplois) ; SKF à Thomery (206 emplois). Au-delà du spectre des délocalisations, plus de 1 500 familles vont être touchées par le chômage, impliquant par là-même toute la dynamique économique d'une région et mettant en déséquilibre les politiques territoriales des communes concernées. Quid du financement des aides à la réinsertion données par ces mairies ? Quid des installations scolaires ? Quid des revenus des commerçants ? Pour ne citer que quelques incidences directes. L'Etat a fait défaut dans la gestion de ces fermetures et tout n'a pas été mis en oeuvre pour maintenir l'emploi : commandes publiques pour certaines entreprises, développement des infrastructures et des services aux entreprises pour préserver l'attractivité des territoires concernés. Avant que d'autres annonces ne rendent la situation plus dramatique, il faut rapidement envisager des solutions possibles pour ces entreprises et le bassin d'emploi concerné. Il lui demande donc de se prononcer sur les initiatives de l'Etat concernant ces entreprises, d'une part, et, d'autre part, de préciser les actions envisagées pour redynamiser l'emploi et l'activité économique en sud Seine-et-Marne.

Réponse émise le 15 juin 2005

M. le président. La parole est à M. Yannick Bodin, auteur de la question n° 740, adressée à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Yannick Bodin. Je voudrais attirer l'attention du Gouvernement sur la situation que connaît le sud du département de Seine-et-Marne, où l'on déplore la fermeture de six entreprises ainsi que la perte de 1 500 emplois.

Six communes de cette partie du département ont, en moins d'un an, vu la fermeture ou l'annonce de fermeture de six entreprises. Sont ainsi concernés : 109 emplois chez Nina Ricci, à Ury ; 213 emplois chez ABB, à Champagne-sur-Seine ; 600 emplois chez Thomson Vidéo Glass, à Bagneaux-sur-Loing ; 150 emplois à la centrale d'EDF de Vernou-La Celle-sur-Seine ; 89 emplois chez Kappa, à Vaux-le-Pénil ; 206 emplois chez SKF, à Thomery. A quoi il faut ajouter, comme si cela ne suffisait pas, l'annonce, le 28 mai, la suppression de 34 emplois supplémentaires du fait de la fermeture d'Alupac, à Bray-sur-Seine. En un mot, le cauchemar continue !

Sans même parler du spectre des délocalisations, ce sont plus de 1 500 familles qui vont être touchées par le chômage, ce qui ne manquera pas de pénaliser toute la dynamique économique d'une région et de déséquilibrer les politiques territoriales des communes concernées.

Quid du financement des aides à la réinsertion accordées par ces mairies ? Quid des classes, dont certaines ferment ou sont vouées à fermer ? Quid des revenus des commerçants dont l'activité disparaîtra ? Et je ne cite là que quelques-unes des incidences directes de ces fermetures d'entreprises sur un secteur de la Seine-et-Marne qui, à une époque, fut un pôle industriel et économique fort, en particulier dans le domaine de la verrerie et dans celui des moteurs de locomotive.

L'Etat, je tiens à le dire, a fait défaut dans la gestion de ces fermetures et tout n'a pas été mis en oeuvre pour maintenir l'emploi, que ce soit par des commandes publiques auprès de certaines entreprises - je pense, par exemple, à ABB - ou par le développement des infrastructures et des services aux entreprises, afin de préserver l'attractivité des territoires concernés.

Avant que d'autres annonces - je touche du bois ! - ne rendent la situation encore plus dramatique, il faut rapidement envisager des solutions pour les entreprises situées dans le bassin d'emploi concerné dans ce triangle Seine et Loing.

Quelles sont les initiatives prises par l'Etat concernant, d'une part, ces entreprises et, d'autre part, les actions envisagées pour redynamiser l'emploi et l'activité économique dans le sud de la Seine-et-Marne, qui tend à devenir une frange sinistrée de la région d'Ile-de-France ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Christine Lagarde, ministre déléguée au commerce extérieur. Monsieur le sénateur, depuis deux ans, le bassin du sud de la Seine-et-Marne est effectivement très touché par les restructurations d'entreprises.

Il a notamment connu, à la fin de 2004, la fermeture des établissements de lingerie féminine Bernier à Montereau, entraînant la suppression de 162 emplois, après que, en novembre 2003, 200 emplois eurent été supprimés du fait de la fermeture de l'usine SKF de Thomery, qui fabriquait des roulements à billes.

Par ailleurs, les parfums Nina Ricci s'apprêtent à recentrer leur production sur Chartres, ce qui entraîne la suppression de 113 emplois à Ury. Quant au projet de fermeture du site de Champagne-sur-Seine concernant certains équipements électriques - moteurs et systèmes automatiques -, annoncé le 17 avril dernier, il concerne 213 emplois. Enfin, à Bagneaux-sur-Loing, Thomson Vidéo Glass, où 520 salariés travaillent à fabriquer des écrans à tube cathodique grand format, doit également faire face à l'obsolescence des technologies et devrait donc aussi connaître des difficultés.

L'Etat a pris l'initiative, dès le début de 2004, de confier à la MIME, la mission interministérielle aux mutations économiques, le suivi particulier de cette zone d'emploi. La MIME réunit, sous l'autorité du Premier ministre, l'ensemble des ministères concernés par les questions d'emploi et de restructurations industrielles : économie, finances et industrie, emploi et cohésion sociale, recherche, aménagement du territoire et défense et, au cas par cas, selon les dossiers examinés, tous les autres départements ministériels concernés, notamment l'agriculture et la santé.

La direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle a travaillé avec les entreprises et les organisations syndicales afin d'aboutir à des plans de sauvegarde de l'emploi, ou PSE, respectueux des droits des salariés. Elle a, en outre, avec l'ensemble des services de l'Etat, mis en oeuvre les dispositifs nationaux et européens pour aider les salariés à se reconvertir, à trouver du travail et atténuer ainsi l'impact des restructurations à l'échelon local.

Dans ce dossier, l'Etat a, de manière constante, assuré la cohérence des dispositifs et a fédéré les actions des divers partenaires.

Lors des nombreux contacts entre le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie et les responsables locaux, des solutions alternatives ont été examinées. Le préfet est arrivé à la conclusion, en concertation avec la région d'Ile-de-France et le conseil général de Seine-et-Marne, qu'il convenait de mettre en place une plate-forme de revitalisation du sud Seine-et-Marne, ce qui a été fait. Annoncée dès le 18 mars par le préfet, elle a été examinée dans sa formalisation sous forme de groupement d'intérêt public, lors d'une réunion qui s'est tenue le 10 mai dernier sous l'autorité du préfet, avec toutes les collectivités territoriales concernées et leurs élus, les entreprises et les organisations socio-professionnelles.

Au-delà des mesures de reclassement des salariés, l'Etat veillera à la fois à ce que tous les moyens de revitalisation du bassin soient déployés, à ce que la contribution des entreprises à l'origine des difficultés soit effective, dans le respect des principes définis par la loi de modernisation sociale, et à ce que les mesures partenariales envisagées soient le plus efficaces possible de manière à favoriser la création de nouveaux emplois.

M. le président. La parole est à M. Yannick Bodin.

M. Yannick Bodin. Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre.

Cela étant, pour bien connaître le département de Seine-et-Marne, je puis aisément faire la part des choses entre ce qui relève du discours théorique du Gouvernement - et qui, jusqu'à présent, ne s'est jamais traduit sur le terrain - et ce qui se passe réellement.

Le seul élément que je puis confirmer, madame la ministre, concerne la proposition du préfet de Seine-et-Marne de mettre en place une plate-forme de développement et de revitalisation. J'ai d'ailleurs eu l'occasion, hier, de participer, sur son invitation, à un déjeuner de travail avec les parlementaires et les représentants de la région et du département.

En vérité, c'est malheureusement la seule réponse concrète immédiate qui ait été apportée.

Ce qui me préoccupe, c'est que le préfet, représentant de l'Etat, ait d'abord et essentiellement évoqué les questions de reclassement ; or ce n'est pas d'une ambulance que nous avons besoin ! Nous souhaitons, avant tout, que les emplois existants soient maintenus et, pour ce faire, il faut discuter.

Par ailleurs, on peut évidemment considérer que les tubes cathodiques doivent disparaître de l'activité de Vidéo Glass ; mais de là à affirmer que l'industrie verrière, qui existe dans cette région depuis Louis XIV, doit disparaître, c'est tout de même aller un peu vite en besogne ! On ne saurait tirer un trait sur cette industrie : elle a encore des possibilités de développement.

Selon moi, l'essentiel réside dans la revalorisation et le développement de cette région, ainsi que dans un véritable aménagement du territoire. Encore faudrait-il que l'Etat veuille bien y prendre sa part et, à cet égard, l'engagement qu'il a pris hier n'est évidemment pas du tout à la hauteur des besoins, si je le compare à ce qui s'est passé à Argentan, pour prendre un exemple connu.

Je tiens à rappeler que le président de la région et celui du conseil général de Seine-et-Marne sont prêts à s'impliquer fortement, y compris en termes financiers. En tout cas, ils vont demander à l'Etat d'augmenter très sensiblement la contribution qui était envisagée par le préfet lui-même.

Autrement dit, les collectivités territoriales sont prêtes à travailler dans le cadre de cette plate-forme, y compris sous la forme d'un GIP, et à y investir de l'argent. Nous espérons seulement que l'Etat sera au rendez-vous, même si, pour l'instant, il est très frileux, ce qui est tout à fait regrettable.

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