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Simon Sutour
Question orale sans débat N° 857 au Ministère de la jeunesse


Devenir du secteur associatif

Question soumise le 3 novembre 2005

M. Simon Sutour appelle l'attention de M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative sur le devenir du secteur associatif qui souffre aujourd'hui du désengagement financier de l'Etat. De toute part en France, les élus sont sollicités tous les jours par les associations de jeunesse et d'éducation populaire à propos des coupes budgétaires du ministère. Les conventions pluriannuelles d'objectifs n'ont pas été reconduites sous prétexte que la mise en oeuvre de la LOLF l'interdisait. Or il s'agit d'un bien piètre argument sur le plan juridique puisqu'au contraire elle permet des engagements budgétaires pluriannuels sur du fonctionnement ou des projets. A la suite de cela, il a été signifié aux associations habituellement financées en raison des éminents services qu'elles rendent chaque jour sur le terrain, des baisses de 9 à 100 % de leur subvention, sans les recevoir, sans rien motiver et parfois même sans leur écrire. Dix mille emplois associatifs qualifiés sont en passe de disparaître dans les six mois qui viennent en raison des désengagements du Gouvernement. Il constate que le 5 octobre dernier, il a souhaité signer avec le secteur associatif des conventions-cadres pour l'emploi : seul le secteur sportif a été en mesure de répondre puisque contrairement aux autres, ses moyens ont été augmentés de 20 %. Les autres sont aujourd'hui dans l'incapacité financière, et bientôt technique faute de cadres, de participer à la résorption du chômage alors que ce secteur est depuis dix ans le plus créateur dans ce domaine. Il lui demande au vu de la présentation d'un budget 2006 en hausse de plus de 5 %, de quelle manière il compte s'engager pour que les sommes inscrites et déclarées soient effectives ? Comment il compte traiter en 2006 les bénévoles des associations dont le budget formation a été divisé par trois en 2005 ? Comment il compte au final défendre d'une main la vie associative dont il a la responsabilité, alors que de l'autre main il l'étouffe financièrement ?

Réponse émise le 17 novembre 2005

M. Simon Sutour. Monsieur le ministre, je souhaite appeler votre attention sur le devenir du secteur associatif, qui souffre aujourd'hui du désengagement financier de l'Etat.

Nous sommes sollicités tous les jours par les associations de jeunesse et d'éducation populaire à propos des coupes budgétaires que subit votre ministère.

Les conventions pluriannuelles d'objectifs n'ont pas été reconduites sous prétexte que la mise en oeuvre de la LOLF l'interdisait. Il s'agit, à mon sens, d'un mauvais argument sur le plan juridique, puisque la LOLF permet au contraire des engagements budgétaires pluriannuels en fonctionnement ou sur des projets.

Vous avez notifié aux associations habituellement financées en raison des éminents services qu'elles rendent chaque jour sur le terrain - et l'actualité nous en donne, malheureusement, tous les jours la preuve - des baisses de 9% à 100 % de leur subvention, sans les recevoir, sans motiver ces décisions et, parfois même, sans leur écrire.

D'autres ministères se comportent d'ailleurs de la même manière en poussant parfois le cynisme jusqu'à demander aux associations de s'investir dans la création d'emplois, alors que nombre d'entre elles sont conduites à mettre en oeuvre des plans sociaux et donc à licencier des personnels qualifiés qui auraient été tout à fait en mesure d'accompagner les bénéficiaires des nouvelles mesures pour l'emploi que vous soutenez.

Ainsi, 10 000 emplois associatifs qualifiés sont en passe de disparaître dans les six mois qui viennent en raison des désengagements du gouvernement auquel vous appartenez.

À titre d'exemple, dans mon département, le Gard, la Fédération des associations laïques d'éducation permanente, la FALEP, compte quatre postes de mis à disposition : « Éducation nationale en charge des liens avec le monde scolaire » pour les collèges et les lycées, les ateliers-relais, l'union sportive de l'enseignement du premier degré, l'USEP, et les classes de découverte. Si ces mises à disposition cessaient, ce serait tout un pan de l'activité associative à vocation sociale et éducative qui disparaîtrait.

La menace est réelle puisque la FALEP du Gard a récemment perdu le poste FONJEP qu'elle détenait sur le projet « accompagnement à la scolarité ».

Le 5 octobre dernier, vous avez souhaité signer avec le secteur associatif des conventions-cadres pour l'emploi : seul le secteur sportif a été en mesure de répondre, puisque ses moyens ont été augmentés de 20 %. Les autres associations sont aujourd'hui dans l'incapacité financière, et bientôt technique faute de cadres, de participer à la résorption du chômage, alors que le milieu associatif est, depuis dix ans, le plus créateur dans ce domaine.

Monsieur le ministre, vous présentez un budget pour 2006 en hausse de plus de 5 %.

De quelle manière comptez-vous vous engager pour que les sommes inscrites et déclarées soient effectives ? Comment comptez-vous traiter, en 2006, les bénévoles des associations dont le budget de formation a été divisé par trois en 2005 ? Comment comptez-vous, au final, défendre la vie associative que vous avez en charge et qui démontre tous les jours sa grande utilité ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Jean-François Lamour, ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Monsieur le sénateur, comme vous le savez, le soutien que l'Etat apporte aux associations en France, en particulier à celles qui développent leur action en direction de la jeunesse et de l'éducation populaire, est, malgré les contraintes budgétaires que vous ne pouvez ignorer, considérable.

Je tiens aussi à souligner que ce gouvernement est le premier à avoir un ministère chargé de la vie associative et à mener une véritable politique dans ce domaine.

Cette reconnaissance institutionnelle était attendue par nos concitoyens. J'en ai la preuve tous les jours, sur le terrain, grâce à l'action menée par de très petites associations locales, et non pas seulement par les grands réseaux associatifs dont vous avez cité un certain nombre d'exemples. Les bénévoles de ces petites associations s'impliquent, au côté des maires, sur le terrain, pour développer cette vie associative qui est effectivement très riche et dont notre pays a tant besoin.

Concernant les chiffres de mon ministère, voici la réalité des choses.

En accord avec le Premier ministre, 7,5 millions d'euros ont été dégelés cet été afin d'irriguer les grands réseaux associatif, en particulier pour les aider dans la formation des bénévoles.

En 2004 et 2005, mon ministère a versé 75 millions d'euros aux associations de jeunesse et d'éducation populaire. Ce montant intègre, bien évidemment, l'aide à l'emploi que constitue le FONJEP. Je vous rappelle que ce fonds est cogéré et que les décisions se prennent en relation permanente avec les grands réseaux associatifs. Cela signifie, monsieur le sénateur, que la disparition d'un poste FONJEP, que vous avez évoquée, est une décision qui est prise conjointement entre les réseaux d'animation de la jeunesse et le ministère. Le FONJEP, malgré tout, est maintenu et développé ; il représente le financement de plus de 3 400 emplois.

Enfin, ainsi que vous l'avez rappelé, dans le projet de loi de finances pour 2006, les crédits destinés aux associations de jeunesse et d'éducation populaire progressent de 2,5%. C'est tout le contraire, convenez-en, d'un désengagement.

Permettez-moi de citer encore un chiffre qui témoigne de notre volonté d'aider les associations : tous les ans, les pouvoirs publics, État et collectivités locales, injectent 25 milliards d'euros dans la vie associative.

Il n'y a là aucun désengagement ; nous avons au contraire la volonté d'accompagner en tant que partenaires cette vie associative, qui est particulièrement riche.

La semaine dernière, le Premier ministre a annoncé, lors de la déclaration du Gouvernement sur la situation créée par les violences urbaines, un renforcement du soutien aux associations présentes dans les quartiers, à hauteur de 100 millions d'euros.

Les associations de jeunesse et d'éducation populaire bénéficieront de ces mesures au travers des crédits de mon ministère, à une condition : que cet argent soit bien utilisé. Il reviendra aux maires, par leur évaluation et leur analyse, de s'en assurer, car ils sont les premiers concernés dans cette affaire.

Ainsi, les maires sont parties prenantes dans la mise en place de ce dispositif particulièrement pertinent que sont les contrats éducatifs locaux. Ils doivent s'assurer que l'argent sert effectivement à financer l'activité des associations de terrain et non à faire fonctionner les fédérations des grands réseaux associatifs.

Telle est la priorité, c'est-à-dire, avant tout, le respect de l'efficacité de l'argent public en direction des associations et, nous l'avons compris, des jeunes qui connaissent des problèmes lourds dans un certain nombre de quartiers.

Enfin, monsieur le sénateur, pour ce qui est des emplois, j'ai en effet décidé, avec mon collègue Jean-Louis Borloo, de susciter l'embauche de 45 000 personnes dans le secteur associatif. Cet objectif doit être atteint dans un délai très court, à la fin de 2005 ou au début de 2006, par le biais, vous l'avez compris, des contrats aidés, en particulier des contrats d'accompagnement vers l'emploi ou des contrats d'avenir.

Je regrette, monsieur le sénateur, que les grands réseaux associatifs, à l'exception, comme vous l'avez souligné, du Comité national olympique et sportif français, le CNOSF, ne se soient pas engagés résolument à nos côtés pour développer l'emploi.

Cela est d'autant plus étonnant que nous leur offrons - c'est le cas de mon ministère - non seulement une aide substantielle pour recruter des jeunes qui sont en difficulté, mais aussi une formation de grande qualité dans les secteurs de l'animation de la jeunesse et du sport.

En résumé, nous finançons à 95 %, mesdames, messieurs les sénateurs, ces contrats. Je trouve donc un peu dommage - et je vous invite à leur faire passer ce message -que les grands réseaux d'associations de jeunesse et d'éducation populaire ne nous aient pas rejoints dans ce secteur.

En effet, nous les aidons dans leur mission principale _ qui est aussi la nôtre - d'insertion et de formation des jeunes mais, surtout, nous permettons à ces jeunes de trouver, à l'issue de cette formation et de ce contrat d'accompagnement, un emploi, un métier. Je vous rappelle que les formations du ministère des sports débouchent à plus de 90 % sur un métier. Alors, pourquoi ne pas profiter de ce dispositif pour justement régler, sinon la totalité, au moins une partie des problèmes qui se posent dans les quartiers ? Faites suivre le message ! Nous serons ainsi plusieurs partenaires à travailler dans ce sens.

Enfin, monsieur le sénateur, vous avez rappelé l'action de Gilles de Robien auprès des associations complémentaires de l'éducation.

Des postes ont été supprimés, avez-vous dit. Non, il s'agit simplement de mises à disposition transformées en détachements. Ainsi que Gilles de Robien l'a assuré, les 800 postes en question seront financés à l'euro près par l'éducation nationale. Il s'agit non pas de disparition, mais simplement d'une clarification entre une mise à disposition dont on ne perçoit pas très bien les contours et un véritable détachement auprès de ces associations.

Mme la présidente. La parole est à M. Simon Sutour.

M. Simon Sutour. Il y aurait beaucoup à dire, mais ce n'est peut-être ni le lieu ni le moment, le temps nous manquant pour approfondir cette question, qui sera sans doute reprise en d'autres occasions.

Monsieur le ministre, je constate qu'il existe un fossé entre ce que je vis sur le terrain, au contact des associations de mon département - cela ne concerne pas uniquement les grands réseaux, comme vous l'avez indiqué -, et le discours gouvernemental. Beaucoup de petites associations ont de plus en plus de mal à fonctionner. Outre les emplois-jeunes qui ont été supprimés, de nombreux problèmes se posent.

Il existe donc, je le répète, un profond fossé entre cette France que nous côtoyons au quotidien, d'une part, et l'échelon ministériel et national, d'autre part.

Nous venons d'évoquer, au sein de la commission des lois du Sénat, la prorogation de l'état d'urgence. Dans la période actuelle, nous constatons tous les jours que le réseau associatif joue un rôle irremplaçable. Lorsqu'on le remet en question, lorsqu'on l'ampute, les difficultés ne font finalement que s'aggraver. La prévention est donc souvent efficace.

Je conclurai mon propos par un souhait, celui que la prochaine discussion budgétaire au Sénat permette, alors qu'une progression des crédits de votre ministère est annoncée, de conforter le travail du milieu associatif sur le terrain, ce qui répond à une véritable nécessité, comme vient de le démontrer l'actualité.

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