M. Georges Mouly attire l'attention de M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille sur les difficultés économiques rencontrées par les établissements et services d'aide par le travail (ESAT) et les entreprises adaptées, difficultés encore accentuées lorsque l'établissement est implanté en zone rurale. Paradoxalement, les établissements de travail protégé et les entreprises adaptées sont pénalisés par la mise en oeuvre de l'obligation d'emploi qui s'impose aux entreprises et aux services publics. Afin de dynamiser ce secteur, ne serait-il pas envisageable d'alléger les pénalités dues en cas de non-respect de l'obligation d'emploi lorsque les entreprises ou les services publics font appel aux prestations des ESAT ou des entreprises adaptées, même si celles-ci relèvent désormais du droit commun, ou en cas de détachement ou de mise à disposition de travailleurs handicapés dans ces établissements ?
M. le président. La parole est à M. Georges Mouly, auteur de la question n° 1034, adressée à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.
M. Georges Mouly. « Le dispositif législatif et réglementaire sur l'emploi en milieu ordinaire issu de la loi du 11 février 2005 valorise le recours des entreprises ordinaires à la sous-traitance au profit des centres d'aide par le travail et des entreprises adaptées.
« Ces structures trouveront également auprès des différentes administrations de nouveaux débouchés, les fonctions publiques étant désormais incitées financièrement à remplir leur obligation d'emploi, que ce soit par le recrutement direct de travailleurs handicapés ou, indirectement, par l'achat de prestations auprès de ces structures. »
C'est en ces termes, monsieur le ministre, que votre collègue M. Philippe Bas concluait un courrier en date du 20 avril dernier relatif à la situation des entreprises adaptées, assurant du soutien apporté par le Gouvernement au secteur adapté ou protégé, parallèlement à son action en faveur du développement du travail en milieu ordinaire.
Ce soutien est effectif, concret, fort : c'est le constat que, avec d'autres, je fais sur le terrain.
Mais, aujourd'hui, les établissements et services d'aide par le travail, les ESAT, ex-CAT, et les entreprises adaptées subissent de plein fouet les aléas de la croissance ainsi que la concurrence des pays émergents. Chacun le sait, nombreuses sont les entreprises adaptées qui rencontrent des difficultés pour trouver des débouchés ou mettre à disposition leurs travailleurs.
Les efforts consentis par le Gouvernement, attentif aux situations particulièrement délicates, sont bien réels, je l'ai dit. Cependant, tous ces établissements ont besoin en urgence d'une bouffée d'oxygène ; tel est l'écho du terrain que je souhaite transmettre.
Un recours massif du secteur ordinaire, privé et public, à la sous-traitance au bénéfice du secteur protégé ou adapté pourrait constituer une solution. Il rapprocherait ainsi deux types de préoccupations : celles du secteur du handicap, qui connaît des soucis budgétaires, et celle des chefs d'entreprise ou des administrations publiques, qui doivent, pour les uns, faire face à des difficultés économiques pas toujours compatibles avec l'obligation d'emploi de 6 % de travailleurs handicapés et, pour les autres, prendre en compte une culture nouvelle dont les conséquences ne seront effectives que dans quelques années, en raison de la progressivité sur cinq ans de la cotisation due en cas de non-respect de l'obligation d'emploi.
La loi de 2005 a bien introduit une valorisation de la sous-traitance avec un coefficient de 2 000 pour les contrats de sous-traitance ou de 1 600 pour les contrats de mise à disposition. Une minoration de ces coefficients, en allégeant la contribution due en cas de non-respect de l'obligation d'emploi, aurait très vraisemblablement un effet positif sur les carnets de commandes des structures adaptées et les relations entre le secteur du handicap et le milieu ordinaire.
En dehors des contraintes purement économiques, le recours à la sous-traitance et la mise à disposition sont sécurisants pour le chef d'entreprise ou l'administration, qui peuvent compter sur l'encadrement de la structure et se familiariser progressivement avec la problématique du handicap.
Au total, offrir un emploi aux personnes handicapées dont le projet personnel intègre la dimension professionnelle, directement, en milieu ordinaire, ou indirectement, dans les ESAT ou les entreprises adaptées, est bien un objectif essentiel. Les pouvoirs publics se doivent de sauvegarder l'existence des structures et entreprises adaptées, sans lesquelles les possibilités d'emploi pour nombre de personnes handicapées disparaîtraient.
Ne pourrait-on envisager une minoration des coefficients, qui représenterait une sorte de bonus aux entreprises et administrations, ou, comme le proposent certains établissements, une majoration du coût des prestations de travaux ou de fournitures qui serait déductible de la contribution versée au fonds collecteur par l'entreprise ou l'administration ? À défaut, et pour ne viser que la sous-traitance, l'alignement du coefficient qui lui est attribué sur celui de la mise à disposition ne serait-il pas souhaitable ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités. Monsieur le sénateur, la loi du 11 février 2005 répond à une demande légitime de participation des personnes handicapées à la vie sociale.
En garantissant des droits nouveaux, elle donne corps au principe de non-discrimination mais aussi à celui de libre choix. Elle favorise l'insertion professionnelle, élément d'épanouissement personnel mais aussi d'autonomie pour chacun. Elle a ainsi renforcé les incitations au recrutement de travailleurs handicapés en milieu ordinaire.
Elle a aussi conforté les structures de travail protégé que sont les CAT et les ateliers protégés, devenus entreprises adaptées. Ces structures offrent en effet une voie originale d'accès à l'emploi, voie que je qualifierai aussi de précieuse, pour nombre de nos concitoyens fragilisés par le handicap. Le statut de leurs employés a été amélioré : accès à de nouveaux droits sociaux pour les travailleurs de CAT, rémunération ne pouvant être inférieure au SMIC pour les salariés de ces entreprises adaptées.
Comme vous le signalez, ces structures, qui sont des entreprises de main-d'oeuvre, affrontent souvent une concurrence renforcée qui exige d'elles non seulement la conquête de nouveaux marchés pérennes, mais aussi des efforts de productivité.
Loin de rendre plus difficile la réalisation des défis que je viens d'évoquer, la loi de 2005 devrait au contraire aider les entreprises adaptées à les relever. Si le renforcement de l'obligation d'emploi pour les entreprises ordinaires et les employeurs publics a pour objet d'améliorer le recrutement direct des travailleurs handicapés en entreprise ordinaire, la loi a également pris en compte la nécessité de favoriser l'insertion professionnelle de façon adaptée pour ces travailleurs handicapés.
Le dispositif législatif et réglementaire relatif à l'emploi en milieu ordinaire valorise, comme vous le demandez monsieur le sénateur, le recours des entreprises ordinaires à la sous-traitance au profit des CAT et des entreprises adaptées, que ce soit par l'achat de prestations ou la mise à disposition de travailleurs handicapés.
CAT et entreprises adaptées trouveront également auprès des différentes administrations de nouveaux débouchés, celles-ci étant désormais incitées financièrement à remplir leur obligation d'emploi, que ce soit par recrutement direct de travailleurs handicapés ou, indirectement, grâce à l'achat de prestations auprès de ces structures. Une circulaire d'accompagnement de la mise en place du Fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique a d'ores et déjà insisté sur la possibilité pour les administrations de s'exonérer en partie de leur obligation d'emploi grâce au recours à la sous-traitance.
Je veux enfin vous redire que le Gouvernement agit pour répondre aux difficultés rencontrées par certaines de ces structures, que vous évoquiez à l'instant.
En ce qui concerne les entreprises adaptées, Philippe Bas a présenté le 9 février dernier un plan de soutien à la modernisation et au développement des entreprises adaptées pour faire face aux situations d'urgence : 10 millions d'euros de crédits supplémentaires ont ainsi été mobilisés par rapport à 2005.
La signature d'une convention pour 2006-2008 entre l'État et l'Union nationale des entreprises adaptées traduira concrètement le soutien apporté à ce secteur. L'objectif est de rechercher de nouveaux secteurs d'activité, d'informer ces entreprises des soutiens qu'elles peuvent obtenir et de développer la formation de leurs dirigeants et la qualification de leurs salariés, afin d'assurer la reconnaissance de leurs acquis.
En ce qui concerne les CAT, le Gouvernement a prolongé la concertation préalable à la rédaction du décret sur la réforme de l'aide au poste, à la demande des associations du secteur. Toutes les garanties sont donc données aux associations pour que l'équilibre financier de ces structures ne soit pas menacé par cette réforme, bien au contraire.
M. le président. La parole est à M. Georges Mouly.
M. Georges Mouly. Je remercie M. le ministre des précisions données qui, pour l'essentiel, rappellent la loi que nous avons votée et les améliorations qu'elle contient. Tout cela est bien connu.
S'agissant de la politique en faveur des handicapés, nous devons nous faire l'écho de ce que nous entendons sur le terrain et de ce que nous constatons. D'où l'exigence apparente de nos questions.
Le Gouvernement a pris les mesures que vous avez mentionnées et reste à l'écoute des parties concernées. Je ne doute pas que, si d'autres problèmes se présentent, il fera le nécessaire pour apporter les solutions comme il a su le faire jusqu'à ce jour.
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