Mme Marie-France Beaufils attire l'attention de M. le ministre de la santé et des solidarités sur l'avenir des hôpitaux de proximité d'Indre-et-Loire. La circulaire du 5 mars 2004, le SROS 3 de la région Centre ainsi que le rapport Valancien fixent à 2000 interventions avec anesthésie le seuil au-dessous duquel les hôpitaux devraient disparaître. Le manque de médecins spécialistes et de chirurgiens est la conséquence directe du numérus clausus. Elle lui demande s'il compte mettre en oeuvre les préconisations du rapport Valancien ou s'il pense revenir sur le numérus clausus, pour donner de l'oxygène aux hôpitaux.
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, auteur de la question n° 1069, adressée à M. le ministre de la santé et des solidarités.
Mme Marie-France Beaufils. Monsieur le ministre, dans une circulaire du 5 mars 2004, votre ministère recommandait « de faire évoluer les sites de chirurgie qui ont une activité annuelle inférieure à 2 000 interventions avec anesthésie vers des disciplines répondant à des besoins avérés pour la population, tels que les soins de suite et la médecine, sauf si des raisons géographiques justifient leur maintien [...] ».
Le rapport Vallancien, que vous avez commandé monsieur le ministre, va plus loin dans la même ligne et envisage la fermeture de 113 blocs opératoires réalisant moins de 2 000 actes annuels.
Le SROS 3, schéma régional d'organisation sanitaire et sociale de l'Agence régionale d'hospitalisation Centre, tient compte de vos recommandations et conclut : « En termes d'activité, cinq établissements de la région Centre, dont trois situés dans des zones d'emploi de moins de 50 000 habitants, réalisent moins de 2 000 interventions chirurgicales avec anesthésie par an. La faiblesse de leur activité opératoire compromet leur avenir chirurgical. Ils sont, de plus, confrontés à des difficultés de recrutement, tant en ce qui concerne les patients qu'en ce qui concerne les professionnels de santé. »
Je ne souscris absolument pas à ces conclusions et je relève pour ma part les problèmes qui peuvent se poser en matière d'effectifs des professionnels de santé. Au lieu de l'approche marchande et malthusienne qui ne consiste qu'à comptabiliser le nombre d'actes, il conviendrait d'adopter une démarche plus humaine pour répondre aux besoins en soins de notre population.
Les orientations exprimées dans ce plan, votre circulaire ou le schéma régional, tout comme dans le rapport Vallancien, concernent trois sites publics dans le département d'Indre-et-Loire, ceux de Loches, d'Amboise et de Château Renault. Pourtant, ces établissements ont tous décidé de s'engager dans la coopération, la complémentarité entre sites et une collaboration avec le CHRU de Tours. Ces petits hôpitaux souffrent en fait des conséquences du faible nombre de médecins spécialistes pouvant répondre à leurs besoins.
Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous dire si vous envisagez de mettre en oeuvre les préconisations du rapport Vallancien, qui se traduiraient donc par la suppression d'hôpitaux de proximité bien utiles ?
Votre projet consiste-t-il à supprimer ces hôpitaux en prenant prétexte d'une réalité qui résulte, en fait, de l'application des textes précédents et, en particulier, de la circulaire que je viens de citer ?
En effet, la pénurie de chirurgiens et d'anesthésistes justifierait ces fermetures. Mais, nous le savons tous, le numerus clausus est à la source de ces dysfonctionnements. Avec la programmation de la réduction du nombre d'étudiants dans ces spécialités, c'est en même temps la suppression des hôpitaux de proximité qui est décidée.
Comptez-vous donc, monsieur le ministre, revenir sur ce numerus clausus, ce qui nécessiterait des moyens supplémentaires pour les UFR de médecine, afin de donner de l'oxygène à nos hôpitaux de proximité, d'apporter une réponse aux populations les plus éloignées des grandes villes et surtout de susciter une meilleure répartition des médecins dans l'ensemble de nos départements ?
M. Jean Desessard. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Madame la sénatrice, en ce qui concerne le numerus clausus, je n'en crois pas mes oreilles ! Vous devez pourtant bien savoir que le numerus clausus a été considérablement augmenté. Le nombre d'étudiants de première année du premier cycle des études médicales autorisés à poursuivre leurs études de médecine à la suite des épreuves terminales de l'année universitaire est en constante progression : le nombre de postes a augmenté de 2 630 entre 1995 et 2005 ! En 2006, nous poursuivons cet effort, nous l'accélérons même, en fixant le numerus clausus à 7 000 places, et cela jusqu'en 2010. Vous en conviendrez, madame la sénatrice, c'est un effort sans précédent.
Votre département, l'Indre-et-Loire, a bénéficié de cet accroissement : trente places supplémentaires ont ainsi été accordées au terme du premier cycle des études médicales en 2006, contre dix-huit en 2005, sachant par ailleurs que le nombre de places ouvertes pour les spécialités chirurgicales à l'examen classant national a doublé en deux ans au centre hospitalier universitaire de Tours.
En ce qui concerne la démographie des professionnels exerçant tout particulièrement dans les établissements de proximité, le travail avance donc rapidement, et cela pour répondre à des besoins réels.
Le ministre de la santé a également demandé à la commission de la démographie médicale de lui faire des propositions afin de répondre au mieux aux problèmes spécifiques de ces professionnels. Ces propositions lui seront remises avant l'été, et le Gouvernement ne manquera pas de prendre les décisions nécessaires pour garantir partout sur le territoire l'égal accès de tous nos concitoyens à des soins de qualité, par l'intermédiaire de médecins suffisamment nombreux et bien formés.
L'autre partie de votre question porte sur les services de chirurgie existants dans les établissements de proximité d'Indre-et-Loire.
Le rapport Vallancien a en effet relevé que, parmi les services effectuant moins de 2 000 opérations par an, figuraient ceux de Loches et d'Amboise, mais, comme vous le savez aussi, le seuil de 2 000 interventions sous anesthésie générale n'est qu'un indicateur de travail proposé par ce même rapport et ne constitue certainement pas un critère d'autorisation.
Après la publication de ce rapport, le ministre de la santé a demandé à toutes les agences régionales de l'hospitalisation des évaluations précises pour chacun des sites concernés.
Pour l'Indre-et-Loire, il apparaît que, tant pour Loches que pour Amboise, les services de chirurgie bénéficient de l'intervention de chirurgiens extérieurs qui ont une expertise et une pratique appropriée et reconnue. De même, les équipes des personnels soignants sont conformes et les locaux sont en cours de réaménagement, en application des contrats d'objectifs et de moyens passés avec l'agence régionale de l'hospitalisation.
Enfin, je vous précise qu'il s'agit dans les deux cas de chirurgie programmée et encadrée par convention avec des établissements de référence. Aussi, je peux vous rassurer, madame la sénatrice : le schéma régional d'organisation sanitaire n'a pas prévu la suppression de ces services, qui seront donc maintenus.
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Monsieur le ministre, j'ai bien noté ce que vous venez de dire à propos de nos hôpitaux de proximité et je suivrai, bien sûr, avec attention leur évolution. Tous apprécieront, je crois, que leur activité puisse se poursuivre et se développer, d'autant que des efforts énormes ont été faits justement pour que les hôpitaux de proximité dans notre département soient à la hauteur des attentes des habitants.
Cependant, si vous avez raison de dire que le numerus clausus a connu une progression, progression que j'ai d'ailleurs enregistrée, subsiste une autre difficulté que vous ne devez pas méconnaître, à savoir le manque de moyens à la disposition des UFR, qui ne sont dès lors pas en mesure d'accompagner dans la poursuite de leurs études et jusqu'à leur qualification des étudiants en nombre suffisant pour répondre demain, sur le terrain, aux besoins.
C'est la raison pour laquelle j'ai insisté sur la complémentarité entre ces deux éléments d'égale importance, le numerus clausus et les moyens : même si le numerus clausus augmente, sans les moyens nécessaires, le secteur universitaire ne permettra pas à suffisamment d'étudiants de devenir de vrais médecins.
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