M. Alain Milon rappelle à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille que la loi n° 2002-93 du 22 janvier 2002 a donné mission de faciliter l'accès aux origines personnelles des personnes adoptées et pupilles de l'Etat au Conseil national pour l'accès aux origines personnelles, qui accomplit ce devoir de rapprochement entre adoptés et parents de naissance dans le respect de la dignité et de la volonté de chacun. Cependant, le CNAOP dispose de très peu de moyens financiers et manque de personnels. La situation est devenue critique car, compte tenu de l'engorgement du service, les dossiers nouveaux ne pourront pas être traités utilement avant un délai moyen de deux ans. Il lui demande s'il ne serait pas nécessaire d'envisager de donner au CNAOP son indépendance administrative et financière en le transformant en un groupement d'intérêt public ou, tout au moins, en prévoyant de lui affecter une ligne budgétaire décente qui lui permette de remplir sa mission dans des conditions satisfaisantes, et ce dans l'intérêt des personnes concernées.
M. le président. La parole est à M. Alain Milon, auteur de la question n° 1078, adressée à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.
M. Alain Milon. Monsieur le président, je ne sais s'il est d'usage, dans le cadre des questions orales sans débat, de répondre aux observations faites par les orateurs précédents. Mais je vais tout de même réagir à ce qu'a dit Mme Beaufils en réponse à M. le ministre.
Ma chère collègue, il n'y a jamais eu autant de médecins en France. S'il y a un problème dans l'accès aux soins, il est plutôt lié à leur répartition géographique. En tout cas, la qualité de l'exercice de la médecine en France est incontestable. Même avec un numerus clausus élargi, la formation est très bonne.
J'en viens à ma question.
La loi du 22 juillet 2002, votée à l'unanimité par le Parlement, a donné mission de faciliter l'accès aux origines personnelles des personnes adoptées et pupilles de l'État au Conseil national pour l'accès aux origines personnelles, le CNAOP, en liaison avec les départements et les collectivités d'outre-mer.
Depuis plus de trois ans, le CNAOP, institution publique unique en Europe, en lien constant avec le réseau des correspondants départementaux désignés par les présidents de conseils généraux au sein de leurs services, ASE - aide sociale à l'enfance - et PMI - protection maternelle et infantile - accomplit cette mission de rapprochement entre les adoptés et leurs mères et pères de naissance, dans le respect de la dignité et de la volonté de chacun.
D'ores et déjà, il a fait la preuve que sa mission était essentielle pour les personnes concernées. Les professionnels qui reçoivent les demandes des adoptés ou des pupilles non adoptés et qui contactent les mères de naissance témoignent du caractère délicat de cette approche et de cet accompagnement.
À ce jour, le CNAOP a pu accompagner plus de 1 300 demandeurs sur les 2 500 qui l'ont saisi et a permis à plus de 500 d'entre eux de connaître leur histoire et leurs origines, dont environ 200 ont pu rencontrer celle qui les a mis au monde.
Cependant, monsieur le ministre, le CNAOP, placé auprès de votre autorité, dispose de très peu de moyens. Dépourvu d'une ligne budgétaire propre, il est dépendant sur le plan administratif et sur le plan financier de l'administration centrale. Surtout, il manque de personnel. Le décret d'application du 3 mai 2002 prévoyait que, pour l'exercice de ses missions, le CNAOP pouvait se faire assister de personnes nommées ou recrutées sur contrat par le ministère chargé de la famille.
Or l'équipe professionnelle du CNAOP ne comporte que quatre chargées de mission, dont une seule psychologue, qui est aussi la seule personne recrutée spécifiquement sur contrat, pour accompagner les demandeurs, parfois mineurs, et leurs parents de naissance tout au long de leurs démarches, et deux secrétaires administratives.
Depuis 2003, les rapports de gestion de la secrétaire générale insistent sur l'insuffisance notoire en effectifs du personnel. De ce fait, non seulement l'arriéré des demandes qui n'ont pu être traitées au cours de la première année, pendant la mise en place du service, ne peut être résorbé, mais le flux des demandes nouvelles n'est pas traité.
La situation est devenue critique. En effet, compte tenu de l'engorgement du service, bon nombre de dossiers nouveaux ne pourront pas être instruits par un chargé de mission avant un délai moyen de deux ans.
Les usagers de ce service public ne comprennent pas pourquoi cette attente leur est imposée, alors que la loi de 2002 avait créé beaucoup d'espoir.
Je souhaiterais connaître votre point de vue, monsieur le ministre, et savoir quelles sont les solutions que vous proposez pour porter remède à cette situation. N'est-il pas nécessaire d'envisager de donner au CNAOP son indépendance administrative et financière en le transformant en un groupement d'intérêt public, par exemple ? Ne pourrait-on, tout au moins, prévoir de lui affecter une ligne budgétaire décente qui lui permette de remplir sa mission dans des conditions satisfaisantes, et ce dans l'intérêt des personnes concernées, qui, pour la plupart d'entre elles, ont été placées sous la tutelle de l'État dès les premiers mois de leur vie ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Monsieur le sénateur, le Conseil national pour l'accès aux origines personnelles, le CNAOP, est en effet une institution importante. L'afflux des demandes au cours de ses premières années d'existence a rendu le délai de réponse beaucoup trop long sur des questions qui, concernant l'identité des demandeurs, sont d'une extrême sensibilité sur le plan humain.
Ce conseil, qui comprend dix-sept membres, est assisté d'un secrétaire général que je nomme et qui dirige un service composé de sept personnes. Le secrétariat général a pour mission essentielle de rechercher, lorsqu'il est saisi d'une demande d'accès aux origines personnelles posée par de jeunes adultes, les parents de naissance afin de recueillir leur consentement à la levée du secret.
Cette équipe peut s'appuyer, pour recueillir ce consentement, sur le réseau de ses correspondants départementaux. En effet, la loi du 22 janvier 2002 a prévu que le président du conseil général désigne, dans chaque département, au sein de ses services, au moins deux personnes chargées d'assurer les relations avec le conseil et d'accompagner, dans leur décision de lever ou non le voile, les femmes qui accouchent dans le secret. La recherche du parent de naissance et le recueil de son consentement à la levée du secret sont des missions à l'évidence délicates, qui nécessitent du temps - même s'il est le plus réduit possible -, mais aussi écoute et tact.
Vous m'interpellez sur le manque de moyens de ce conseil. Je crois, effet, qu'il a rencontré des difficultés de fonctionnement liées au format des équipes, trop limité pour permettre une réponse rapide.
Je vous précise que le délai de traitement de deux ans est un maximum, et non une moyenne. Ainsi, dans certaines situations, la réponse est apportée très rapidement au demandeur, notamment lorsqu'il apparaît dans le dossier que le secret n'a pas été demandé ou lorsque la mère est décédée, le conseil étant alors autorisé, en application de l'article L.147-2 du code de l'action sociale et des familles, à communiquer l'identité de cette dernière.
En revanche, lorsque le conseil doit rechercher le parent de naissance, le délai est allongé du fait des investigations nécessaires et du délai de réponse des différents organismes auxquels il s'adresse.
Une application informatique qui sera prochainement mise en place favorisera un traitement plus rapide de ces dossiers et allégera la charge de travail du personnel.
Enfin, le nombre de dossiers dont le conseil est saisi chaque mois commence à décroître. Cette tendance se confirmera très certainement car, si le nombre de pupilles de l'État a pu atteindre plusieurs centaines de milliers dans les années 1940-1960, on observe, depuis les années 1970-1980, une forte diminution de ceux-ci : ils sont environ 3000 pupilles par an actuellement.
Pour autant, à partir d'une évaluation de la mise en oeuvre de la loi du 22 janvier 2002, il est indispensable de renforcer les moyens de cette institution. Je m'y emploie dans le cadre des discussions budgétaires préparant le projet de loi de finances pour 2007.
M. le président. La parole est à M. Alain Milon.
M. Alain Milon. Je tiens à remercier M. le ministre de la qualité de sa réponse.
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