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Jacques Mahéas
Question d'actualité au gouvernement N° 782 au Ministère de l'emploi


Logement social

Question soumise le 26 janvier 2007

M. Jacques Mahéas. Le 22 janvier dernier disparaissait l'abbé Pierre.

Sa première construction, la maison du Pont, a été réalisée en 1950 dans ma commune, Neuilly-sur-Marne, en Seine-Saint-Denis.

Pour loger les sans-abri, l'abbé Pierre défiait alors souvent la loi en se passant de permis de construire.

Aujourd'hui, certains maires défient la loi en ne l'appliquant pas, mais cette fois pour ne pas construire de logements sociaux !
(Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

Plusieurs sénateurs de l'UMP. Récupération !

M. Jacques Mahéas. Vous nous proposez d'instituer le droit au logement opposable. C'est un point positif.

M. Alain Gournac. Ah ! Tout de même !

M. Jacques Mahéas. Mais, d'après l'idée que vous en avez, le préfet n'aura pas le choix : il devra puiser dans son contingent de logements sociaux, c'est-à-dire ajouter de la pauvreté dans des villes où l'équilibre est souvent fragile.

On touche donc là du doigt les limites de votre conception de la mixité sociale. Cette loi risque de n'être qu'une occasion de jeter de la poudre aux yeux !

Le vrai problème, c'est le manque criant de logements sociaux. Or il suffit d'appliquer la loi, et non de tâcher de l'abroger ou de la détourner.

L'abbé Pierre lui-même, en janvier 2006, dénonçait la volonté de certains élus de droite (Vives protestations sur les travées de l'UMP.) de remettre en cause l'article 55 de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, article qui prévoit 20 % de logements sociaux dans les communes.

M. Charles Gautier. C'est vrai !

M. Jacques Mahéas. Il est vrai que le sujet gêne plus à droite qu'à gauche !

Mme Christiane Hummel. Mentitude !

M. Jacques Mahéas. Ainsi, Neuilly-sur-Seine, ville de Nicolas Sarkozy, détient un triste record avec 2,6 % seulement de logements sociaux. (Exclamations sur les travées de l'UMP.) À titre de comparaison, Neuilly-sur-Marne en compte 46 % !

Mme Christiane Hummel. Mentitude !

M. Jacques Mahéas. Comment croire le ministre de l'intérieur quand il affirme qu'en deux ans il résoudra le problème des personnes sans domicile fixe ? Il les mettra chez les autres, sans doute !

M. Charles Revet. Scandaleux !

M. Jacques Mahéas. Et ne m'opposez pas l'argument de l'absence de terrains constructibles. L'Indicateur Bertrand, que j'ai ici (M. Jacques Mahéas brandit la revue.), en trouve à foison ! Les maires de droite, principalement, seraient-ils moins doués pour dénicher ces terrains que les promoteurs privés ?

M. Alain Gournac. Nul !

M. Jacques Mahéas. Quant aux constructions réalisées, ne brandissez pas non plus des chiffres prétendument inégalés. Dans bien des cas, il s'agit d'opérations de démolition-reconstruction qui déplacent les populations en difficulté d'une zone urbaine sensible à une autre.

M. Alain Gournac. La question !

Mme Christiane Hummel. Oui, la question !

M. Jacques Mahéas. Nous l'avons démontré : en 2006, vous avez construit moins de logements très sociaux qu'en 2000 !

Monsieur le Premier ministre, monsieur le ministre, il est tout à fait scandaleux que certaines communes n'aient strictement rien entrepris pour rattraper leur retard en matière de logements sociaux, ...

M. Alain Gournac. C'est long, monsieur le président !

M. Jacques Mahéas. ...et qu'elles préfèrent l'amende à la solidarité. Arrêtons de verser des larmes de crocodile !

M. le président. Veuillez poser votre question, mon cher collègue !
(Marques d'approbation sur les travées de l'UMP.)

M. Jacques Mahéas. Je constate que les élus de droite sont vraiment gênés !

M. le président. Non, vous avez simplement épuisé votre temps de parole, monsieur Mahéas !

M. Jacques Mahéas. Monsieur le ministre, que comptez-vous faire pour assurer une véritable mixité sociale, condition nécessaire à l'instauration d'un droit au logement opposable ?
(Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Réponse émise le 26 janvier 2007

M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement. Monsieur le sénateur de la Seine-Saint-Denis, je pensais très sincèrement que vous alliez vous féliciter de la signature ce matin du contrat territorial de rénovation urbaine entre Plaine Commune, le département de Seine-Saint-Denis et l'État.
(M. Jacques Mahéas proteste.)

Mme Christiane Hummel. Bravo !

M. Jean-Louis Borloo, ministre. C'est un programme de 4,2 milliards d'euros, sur les 35 milliards d'euros qui sont destinés, au titre du programme de rénovation urbaine, à transformer l'habitat, malheureusement assez indigne, dans un certain nombre de nos quartiers !

M. David Assouline. Pas à Neuilly-sur-Seine !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Dites-nous surtout ce que vous allez faire !

M. Jean-Louis Borloo, ministre. Quoi qu'il en soit, monsieur le sénateur, vous n'avez pas l'air d'être informé de la signature de ce contrat.

M. Alain Gournac. Ils ont oublié !
(Rires sur les travées de l'UMP.)

M. Charles Revet. Ils n'étaient pas au courant !

M. Jean-Louis Borloo, ministre. En matière de logement, monsieur Mahéas, permettez-moi de vous dire franchement ce que je pense.

Monsieur le sénateur, de 1981, année où François Mitterrand a été élu Président de la République, à 2002, année du départ de M. Jospin, ...

M. David Assouline. Remontez plus loin encore !

M. Jean-Louis Borloo, ministre. ...soit sur plus de vingt ans, la gauche a en moyenne construit deux fois moins de logements sociaux que nous n'en construisons cette année !
(Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Les logements sociaux ? Vous en avez à vous seul supprimé plus que vous n'en avez construit !

M. Jean-Louis Borloo, ministre. Vous n'avez d'ailleurs pas plus construit de logements en général, puisque la France a enregistré en moyenne 270 000 permis de construire quand, dans la même période, nos amis Espagnols en comptaient 650 000 !

M. Guy Fischer. En Espagne, c'est de la spéculation !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Parlons-en, du modèle espagnol ! Ce sont des fonds de retraite : voulez-vous ruiner les petits retraités ?

M. Jean-Louis Borloo, ministre. Avec la gauche au pouvoir, nous avons connu vingt ans de crise du logement !

M. Jacques Mahéas. Avec les municipalités de droite !

M. Jean-Louis Borloo, ministre. Monsieur Mahéas, j'en suis navré, mais je dois vous le dire, quand on a soutenu un gouvernement qui a à son palmarès l'année la plus noire depuis la guerre en matière de logements sociaux et qui, en plus, a raclé les fonds de tiroir du « 1 % logement » géré par les partenaires sociaux pour le logement social, on ne donne pas de leçons !

J'espère très franchement, alors que nous avons triplé le nombre des logements sociaux, que, dans les semaines à venir, sur le projet de loi instituant le droit opposable au logement et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale, vous essaierez, comme nous, d'avoir un débat républicain et de penser à l'avenir !
(Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)

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