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Claire-Lise Campion
Question écrite N° 12962 au Ministère de l'intérieur


Situation des mineurs étrangers au regard des règles de l'immigration

Question soumise le 8 juillet 2004

Mme Claire-Lise Campion appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales sur la situation des mineurs étrangers isolés après la loi n° 2003-1119 du 26 novembre 2003 relative à la maîtrise de l'immigration, au séjour des étrangers et à la nationalité. En effet, les règles d'acquisition de la nationalité française pour les mineurs étrangers confiés aux services de l'aide sociale à l'enfance ont été modifiées, Les jeunes ne peuvent donc plus obtenir la nationalité française s'ils n'ont pas été confiés à l'aide sociale à l'enfance avant l'âge de quinze ans. Or l'attribution de la nationalité française était le meilleur outil d'intégration pour ces jeunes étrangers isolés et/ou en danger sur le sol français. Ils sont alors renvoyés à la clandestinité, à l'errance, aux trafics ou à la délinquance. C'est pourquoi, elle lui demande de bien vouloir lui indiquer ce que le gouvernement prévoit pour combler ce vide juridique incompatible avec la convention internationale sur les droits de l'enfant. A court terme, elle lui demande également d'intervenir auprès des préfets pour que des titres de séjour soient remis à tous les jeunes qui sont actuellement dans cette situation.

Réponse émise le 16 décembre 2004

L'augmentation du nombre de mineurs étrangers isolés en France est un phénomène observé depuis plusieurs années, ayant ouvert le champ à de nombreuses recherches et réflexions sur les motivations et l'organisation de leur venue dans notre pays ainsi que sur les modalités concrètes de leur prise en charge par les pouvoirs publics. Tel qu'il était rédigé auparavant, l'article 21-12 du code civil permettait à un mineur étranger confié à un service de l'aide sociale à l'enfance d'acquérir la nationalité française sans condition de délai et de résidence, auprès du juge d'instance. Cette situation a contribué à favoriser des détournements de procédures liées d'une part aux protections contre toutes mesures d'éloignement dont bénéficient les mineurs jusqu'à l'âge de dix-huit ans et, d'autre part, aux droits que l'accession à la nationalité française sont susceptibles de procurer aux parents en termes d'admission au séjour. Il a été constaté que des étrangers faisaient venir irrégulièrement leurs enfants mineurs en France et, une fois que ceux-ci avaient obtenu la nationalité française, venaient sur notre territoire et invoquaient à leur profit un droit au séjour en qualité de parents d'enfants français. C'est pourquoi il a paru nécessaire de modifier la législation. Ainsi, aux termes des nouvelles dispositions de l'article 21-12 du code civil apportées par la loi du 26 novembre 2003 relative à la maîtrise de l'immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité, l'enfant étranger ne peut réclamer la nationalité française que s'il a été pendant au moins cinq années recueilli en France et élevé par une personne de nationalité française ou confié depuis au moins trois années au service de l'aide sociale à l'enfance. Cette modification de délai permet de réduire les risques de détournement de procédure. Les mineurs non accompagnés, sans plus d'attache dans leur pays d'origine, ne sont pas pénalisés par la loi nouvelle. Ils sont le plus souvent pris en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance et, à ce titre, bénéficient d'une protection morale et matérielle. Par ailleurs, la loi pose le principe selon lequel les mineurs étrangers ne peuvent faire l'objet d'une décision d'éloignement. Sur le plan du séjour, ils ne sont pas astreints à la possession d'un titre de séjour mais ne bénéficient pas pour autant d'un droit automatique au séjour sur le sol français. Une fois atteint l'âge de la majorité, leur admission au séjour peut être envisagée dans le cadre des dispositions relatives à la protection de la vie privée et familiale, compte tenu des protections instituées par l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et de sauvegarde des libertés fondamentales. Un titre de séjour peut ainsi être délivré en fonction de critères tenant à l'âge d'entrée sur le territoire, à l'ancienneté du séjour, aux liens privés et familiaux en France et à la naissance en France. Tel est le cas, par exemple, des enfants qui disposent de l'essentiel de leurs attaches familiales en France et dont les parents ont été admis au séjour au titre de la vie privée et familiale. Tel peut aussi être le cas des étrangers qui sont arrivés isolés en France pendant leur minorité, dès lors que les liens avec leur pays d'origine et leur famille sont apparemment rompus. Il en est de même des étrangers entrés en France avant l'âge de treize ans et qui justifient d'une résidence habituelle depuis cet âge. La loi du 26 novembre 2003 relative à la maîtrise de l'immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité a en effet prévu la délivrance de plein droit d'une carte de séjour temporaire aux mineurs justifiant d'un séjour habituel depuis qu'ils ont atteint au plus l'âge de treize ans en France, et non plus de dix ans comme auparavant, assouplissant ainsi les conditions d'admission au séjour des étrangers arrivés sur notre sol pendant leur minorité. Cette loi a également élargi les possibilités d'admission au séjour sous le statut d'étudiant. En cas de nécessité liée au déroulement des études, le préfet peut désormais accorder une carte de séjour temporaire portant la mention « étudiant », même si l'étranger est entré en France sans être muni du visa de long séjour réglementaire, à condition qu'il justifie d'une entrée régulière. Sous les mêmes réserves, cette carte de séjour mention « étudiant » peut également être délivrée à l'étranger qui a suivi une scolarité en France depuis au moins l'âge de seize ans et qui poursuit des études supérieures. Toutefois, conformément aux dispositions prévues par l'article 12 alinéa 2 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, la mise en oeuvre de cette procédure est subordonnée à l'adoption préalable d'un décret en Conseil d'Etat. En conclusion, la modification de l'article 21-12 du code civil ne porte pas atteinte aux principes de la convention des droits de l'enfant et le bénéfice de la nationalité française n'est pas un droit absolu qui peut être invoqué par tout mineur de manière automatique. Le dispositif institué repose sur des mesures équilibrées, qui doivent concilier à la fois la nécessité de lutter contre les flux migratoires irréguliers au nombre desquels figurent les arrivées de mineurs, phénomène important, et la nécessité de donner une protection juridique à des personnes qui sont en France véritablement dans une situation d'isolement et qui démontrent une insertion dans notre pays.

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