M. François Gerbaud attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur la situation des avocats au regard de la TVA.
Après de longues années de non assujettissement, les avocats ont été soumis, en France, au régime de TVA au taux normal de 19,6 % pour l'ensemble de leur activité, hormis l'aide judiciaire payée par l'État pour laquelle s'applique le taux réduit de 5,5 %.
Cette distinction fonde aujourd'hui une revendication légitime des avocats : ramener le taux de TVA à 5,5% pour l'activité générée par l'ensemble de la clientèle ne récupérant pas la TVA. Certains pays européens tels la Grèce ou la Belgique soumettent au taux de 0 % la consultation d'un avocat. En France, les arguments en faveur du taux réduit généralisé sont multiples : complexification des réalités juridiques et judiciaires, alourdissement des honoraires par les charges des cabinets d'avocat, avec répercussion mécanique sur le montant de la TVA à acquitter. Un procès représente un coût considérable pour un justiciable « moyen » ne bénéficiant pas de l'aide judiciaire et ne disposant pas de ressources élevées. D'où la désolvabilisation croissante constatée chez cette frange intermédiaire de la clientèle des particuliers. L'application de deux taux distincts peut également apparaître comme discriminatoire au sens de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, aux termes duquel « chaque partie doit avoir des chances égales de présenter sa cause et aucune ne doit bénéficier d'un avantage substantiel sur l'autre ». Par ailleurs, l'introduction du taux réduit en France n'a-t-elle pas été dictée moins par des préoccupations de justice sociale que par l'obligation, pour l'État, de régler les factures de l'aide judicaire ? Certes, les États de l'Union européenne ne sont plus libres de moduler comme bon leur semble la TVA, comme l'a montré la récente controverse autour du taux réduit revendiqué par les restaurateurs. Cela étant, les autorités communautaires autorisent de plus en plus l'application de taux réduits pour certains biens et services à caractère culturel ou social, dont la liste s'est élargie depuis 1977 aux denrées alimentaires, à la distribution d'eau, à la fourniture de livres en location dans les bibliothèques, au droit d'admission au spectacle, aux prestations des écrivains, compositeurs et interprètes, ainsi qu'aux droits d'auteur. Plus encore, la Commission européenne souhaite autoriser à l'avenir l'application de taux réduits de TVA aux biens et services de nature à favoriser la consolidation d'une société de droit. Dans ces conditions, l'application uniforme du taux réduit de TVA ne viendrait-elle pas à point nommé pour mettre fin à cette injustice qui fait qu'une PME consultant un avocat récupère la TVA, à l'inverse d'un particulier, qui reste à ce jour exagérément taxé ?
Les règles communautaires en matière de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) limitent l'application du taux réduit aux seules opérations inscrites sur la liste annexée à la directive n° 92/77 du 19 octobre 1992, relative au rapprochement des taux de TVA dans la Communauté. Les prestations de nature juridique et judiciaire n'y figurent pas en tant que telles et relèvent par conséquent du taux normal de la taxe. Cela étant, le droit communautaire permet l'application d'un taux réduit de TVA à certaines prestations ayant un caractère social marqué. C'est sur ce fondement que la France soumet au taux réduit de 5,5 % la rémunération perçue par les avocats et les avoués dans le cadre de l'aide juridictionnelle, c'est-à-dire l'indemnité reçue de l'Etat mais également, en cas de prise en charge partielle par l'Etat, la contribution versée par le bénéficiaire de l'aide. En effet, les conditions d'octroi de l'aide juridictionnelle et notamment celles relatives au niveau des ressources du bénéficiaire peuvent justifier, au regard du droit communautaire, l'application du taux réduit. En outre, les avocats dont le chiffre d'affaires annuel est inférieur à 37 400 bénéficient d'une franchise qui les dispense du paiement de la taxe. Ces dispositions permettent d'assurer aux personnes les plus modestes un meilleur accès à la justice et de limiter les conséquences de l'imposition à la TVA des opérations réalisées par les petits cabinets dont les particuliers constituent la principale clientèle.
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