M. Daniel Raoul attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice sur la question de la délivrance des assignations par les huissiers de justice.
Les huissiers de justice ont, entre autres prérogatives, le monopole de la délivrance des assignations. Cet avantage exclusif implique tant un strict respect de leurs obligations légales et déontologiques, que le souci d'éviter toute attitude que les justiciables, contraints de recourir à leur ministère, pourraient ressentir comme un acte discriminatoire ou discrétionnaire.
En fonction de ces considérations, il demande au Ministre de donner son appréciation sur les points suivants :
Un huissier est-il fondé à refuser de délivrer une assignation en référé au motif qu'il considère comme un empêchement de principe, le fait que le destinataire de l'acte est un client habituel qui lui confie le recouvrement de certaines créances, sans que l'assignation en question ait un lien avec un litige au titre duquel l'huissier aurait officié ? Admettre un refus en l'espèce conduirait à reconnaître à l'huissier le droit de choisir à son gré le destinataire de ses actes, et priverait du droit d'ester en justice, le citoyen qui ne pourrait faire signifier l'indispensable assignation.
Un huissier est-il fondé à exiger une décharge de responsabilité avant de signifier une assignation en référé, au motif qu'elle est rédigée par le demandeur, et non par un avocat, dont l'assistance n'est pas obligatoire en l'espèce ? Le coefficient prévu à l'article 7 du décret du 12 décembre 1996 est-il applicable en cas d'assignation relative à une demande qui ne comporte pas d'autre prétention à caractère pécuniaire, que l'allocation au titre de l'article 700 du Code de la procédure civile, qui ne deviendra une obligation, que si elle est allouée par le juge ?
La garde des sceaux, ministre de la justice, fait savoir à l'honorable parlementaire qu'en application de l'article 1er de l'ordonnance n° 45-2592 du novembre 1945, les huissiers de justice sont des officiers publics et ministériels qui ont seuls qualité pour signifier les actes et les exploits, faire les notifications prescrites par les lois et les règlements lorsque le mode de notification n'a pas été précisé et ramener à exécution les décisions de justice, ainsi que les actes ou titres en forme exécutoire. Actuellement, ils exercent concurrement leur activité dans le ressort du tribunal d'instance. Leur compétence sera toutefois étendue au ressort du tribunal de grande instance à compter du 1er janvier 2009. en vertu du décret n° 2007-813 du 11 mai 2007. Selon l'article 15 du décret n° 56-222 du 29 février 1956, les huissiers de justice sont en principe tenus d'exercer leur ministère chaque fois qu'ils en sont requis, sauf dans les cas d'empêchement et pour cause de parenté ou d'alliance prévus par l'article 1er bis A de l'ordonnance mentionnée plus haut. En leur qualité d'officier public et ministériel, ils sont néanmoins statutairement soumis à des obligations professionnelles dont le respect peut les conduire à refuser de prêter leur ministère sous peine d'engager leur responsabilité. En application de l'article 2 de l'ordonnance n° 45-1418 du 28 juin 1945, ils ont notamment le devoir d'établir des actes réguliers, conformes aux lois et règlements, mais aussi un devoir de prudence, de conseil, de délicatesse et de loyauté à l'égard de leurs mandants. Pour se conformer à ces obligations, ils peuvent être amenésà refuser de délivrer une assignation dans les cas où elle serait dirigée contre l'un de leurs mandants habituels, ou encore à demander une décharge de responsabilité si l'assignation s'avérait manifestement abusive ou irrégulière. S'agissant du coût d'une assignation, il est déterminé en application des articles 6 et 7 du décret n° 96-1080 du 12 décembre 1996 fixant le tarif des huissiers de justice en matière civile et commerciale. L'article 6 de ce décret prévoit des droits fixes, exprimés en taux de base pour chaque acte, requête ou formalité. La valeur du taux de base est de 2,20 euros. L'article 7 du décret prévoit, lorsque les actes, formalités ou requêtes, sont relatifs à une obligation pécuniaire déterminée, d'appliquer un coefficient multiplicateur de 0,5, 1 ou 2 en fonction du montant de l'obligation (1 si le montant est supérieur à 128 euros et inférieur ou égal à 1 280 euros, 2 s'il est supérieur à 1 280 euros). S'agissant des assignations, elles sont rémunérées par 8 taux de base et demi. Pour ces actes, l'obligation pécuniaire se déduit de la demande en principal et non des frais exposés à l'occasion de l'instance, au titre desquels figure l'indemnité accordée sur le fondement de l'article 700. C'est ainsi que la demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile ne constitue pas une prétention dont la valeur devrait être prise en compte pour la détermination du taux du ressort de la juridiction (Cass. civ. III, 6 janvier 1981, n° 79-10.651).
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.