M. Jean-François Voguet. Madame la ministre, depuis plusieurs semaines, chacun le constate, le mécontentement grandit dans nos universités parmi les étudiants, les enseignants et les personnels, et ce mouvement s'étend aujourd'hui dans les lycées.
Nous comprenons ces inquiétudes qui s'expriment contre votre loi en faveur d'une fausse autonomie des universités. (Exclamations sur les travées de l'UMP.) Nous sommes solidaires de cette contestation, qui, quelle que soit sa forme, ne fera que s'étendre.
Un sénateur socialiste. C'est vrai !
M. Jean-François Voguet. Nous avons combattu cette loi que vous avez fait voter « à la hussarde », en plein été et dans l'urgence. (Protestations sur les mêmes travées.) Nous sommes toujours opposés à son application, car elle ne répond ni aux défis de notre temps, ni aux besoins urgents de nos universités.
Même si le pire n'est jamais assuré, cette loi porte en elle, malgré vos démentis, la mise en concurrence des universités et le désengagement de l'État. Il y aura les facultés d'élites sélectionnant leurs étudiants et la grande masse des universités devant se contenter de maigres subventions d'État et du soutien toujours plus nécessaire des collectivités locales.
Cette loi casse aussi la vie démocratique universitaire au seul profit des places offertes aux entreprises et d'un pouvoir renforcé des présidents. Elle précarise, enfin, l'ensemble des personnels universitaires.
Pendant des semaines, vous avez parié sur le pourrissement du mouvement. (Mme la ministre fait un signe de dénégation.) Ce dernier est pourtant toujours là, et il vous a contraint à formuler une série de propositions pour, dites-vous, encadrer votre loi.
M. Gérard Cornu. La question !
M. Jean-François Voguet. Vous reconnaissez donc là les risques qu'elle portait. Nous vous invitons à aller plus loin dans sa remise en cause.
Vous avez aussi fait un petit geste concernant la vie étudiante, admettant ainsi l'urgence sociale que vous refusiez d'entendre.
Mais tout cela reste très insuffisant, d'autant qu'il ne s'agit que de promesses.
Alors, et c'est ma première question, allez-vous augmenter votre budget pour 2008,...
M. Yannick Bodin. Elle a déjà dit non !
M. Jean-François Voguet. ...trop faible pour faire face aux besoins ? Vos annonces d'augmentation ne servent qu'à boucher les trous de dépenses déjà engagées.
M. Jean-Pierre Michel. Ce sont des redéploiements !
M. Jean-François Voguet. Enfin, madame la ministre, plutôt qu'un protocole, sans valeur, signé par le Premier ministre avec les présidents d'université, êtes-vous prête - c'est ma seconde question - à engager la nation dans une réelle réforme démocratique de l'université,...
M. le président. Monsieur Voguet, veuillez conclure !
M. Jean-François Voguet. ...en proposant un projet de loi d'orientation et de programmation qui pourrait être préparé par des États généraux de l'enseignement supérieur ?
(Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC et sur quelques travées du groupe socialiste.)
Mme Valérie Pécresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le sénateur, vous avez parlé de démocratie, c'est donc que vous êtes un démocrate et que vous respectez le suffrage universel et la démocratie représentative.
La loi relative aux libertés et responsabilités des universités a fait l'objet d'une concertation de soixante heures (Applaudissements sur les travées de l'UMP) et d'un débat démocratique au Parlement ; elle a été adopté le 11 août 2007 et est aujourd'hui appliquée.
Vingt-cinq universités ont déjà voté les nouveaux statuts et les nouveaux conseils d'administration de trente universités ont d'ores et déjà fait connaître leur volonté de devenir autonomes au 1er janvier 2009. Je vous demande donc de respecter une loi de la République.
(Bravo ! et applaudissements sur les mêmes travées. - M. Yves Pozzo di Borgo applaudit également.)
Cela dit, j'entends bien les craintes et les préoccupations qui s'expriment. Je n'ai jamais pris des mesures pour encadrer ma loi, comme vous le dites, mais j'ai donné des garanties : il n'y aura pas de désengagement de l'État,...
Mme Éliane Assassi. Il n'y a pas d'argent !
Mme Valérie Pécresse, ministre. ...et, comme M. le Premier ministre l'a dit, c'est un engagement financier et historique de l'État. Dès cette année, 1 milliard d'euros supplémentaires...
M. Jean-Pierre Michel. C'est du rattrapage !
Mme Valérie Pécresse, ministre. ...sera consacré au simple enseignement supérieur, soit 8 % d'augmentation du budget.
Mme Éliane Assassi. D'où viendra l'argent ?
Mme Valérie Pécresse, ministre. Celui-ci croîtra de 50 % en cinq ans ! C'est historique ! Jamais l'État français n'a fait un tel investissement dans son enseignement supérieur.
Par ailleurs, les étudiants se disent très préoccupés de la privatisation. C'est évidemment une peur irrationnelle, puisque les conseils d'administration des universités, où siègent les étudiants, les personnels et les enseignants farouchement attachés à leur indépendance, auront la totale maîtrise des fonds qui seront investis à l'université.
(Mme Éliane Assassi s'exclame.)
Quant aux chantiers de réforme que nous allons poursuivre, ils sont extrêmement concrets : la réussite en licence, les aides sociales et les bourses, l'immobilier universitaire, les carrières des personnels et l'attractivité de la recherche.
Monsieur le sénateur, vous souhaitez connaître les moyens financiers. Je vous réponds : 15 milliards d'euros !
(Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
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