M. Yves Pozzo di Borgo attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables, sur les nuisances et la pollution dans le métro parisien, préjudiciables aux usagers et aux personnels. Il expose le contexte de pollution dans le métro parisien résultant plus particulièrement des particules fines produites par les freinages, l'usure des rails et les roues. Il souhaite que le Gouvernement établisse un constat précis de l'état de pollution dans le métro : ses origines, son degré, son évolution et ses incidences sur la santé. Il lui demande ainsi qu'aux organismes compétents de lui indiquer les mesures qu'ils comptent prendre, dans l'échelle du temps, pour atténuer ces pollutions et nuisances.
M. le président. La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo, auteur de la question n° 19, adressée à M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables.
M. Yves Pozzo di Borgo. Monsieur le secrétaire d'État, la moyenne du temps passé pour chaque voyageur dans le métro est de cinquante minutes par jour.
Mme Catherine Procaccia. Pas en ce moment !
M. Yves Pozzo di Borgo. C'est en effet un peu plus actuellement !
Lorsqu'il n'y a pas de grève, 6 millions de Franciliens empruntent quotidiennement le métro dans la région d'Île-de-France.
Avant d'aborder le point central de ma question, je souhaiterais vous demander où en est l'automatisation de l'ensemble des lignes du métro parisien. La ligne 14, automatisée, fonctionne normalement, quels que soient les aléas sociaux. C'est une ligne propre, régulière, sans interruption du trafic.
Or, nous le savons, les anciennes lignes pourraient être automatisées. Y a-t-il des études et des chiffrages sur ce dossier ? Ne serait-il pas temps d'aborder très rapidement cette problématique ? Monsieur le secrétaire d'État, je vous prie de m'excuser de poser ces questions supplémentaires, mais c'est l'actualité qui l'impose !
Cela étant, ma question principale porte sur la qualité de l'air dans le métro.
Les dispositifs de freinage des rames, par érosion et contacts avec les rails, émettent des quantités notables de particules qui peuvent comporter des éléments métalliques, comme du fer, mais aussi des polluants plus toxiques, comme des hydrocarbures polycycliques.
Le Conseil supérieur d'hygiène public de France a émis divers avis sur ce sujet, en 2001, 2003 et 2005, pour inciter la RATP à renforcer la surveillance de l'air du métro et à mettre en place des actions de prévention.
Les mesures récentes effectuées par la RATP, avec notamment l'aide financière de l'ADEME, l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, montrent que c'est surtout pour les particules inhalables, c'est-à-dire les plus dangereuses, que l'on rencontre des niveaux de poussière significatifs.
Cela présente un risque en matière de santé pour les personnels de la RATP, mais aussi pour les populations plus particulièrement sensibles, notamment les enfants, les personnes âgées et les personnes qui éprouvent des insuffisances respiratoires, de sorte que cette question est un vrai problème de santé publique.
Des chiffres non communiqués semblent effrayants. Dans certains endroits, cette pollution serait dix fois supérieure aux pics de pollution que le périphérique parisien peut connaître lors de gros embouteillages.
En Europe, selon le Conseil national de l'air présidé par notre collègue Philippe Richert, ces particules sont responsables de plus de 350 000 morts « prématurées » par an, soit environ dix mois de vie perdus par personne décédée !
Dans un récent communiqué de presse commun, la RATP et le MEDAD, le ministère de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables, annoncent des mesures nouvelles en matière de surveillance et de diffusion de l'information sur ce sujet, ce qui va dans le bon sens.
La question de fond demeure toutefois la quête de solutions techniques, pour diminuer le niveau de pollution du métro et des enceintes ferroviaires, tant pour les personnels que pour les usagers.
En 2003, le ministère de la santé avait demandé par circulaire à l'ensemble des préfets concernés de s'assurer que soient développées une surveillance de la qualité de l'air et une stratégie de réduction des émissions dans les enceintes ferroviaires souterraines lors de la mise en oeuvre des plans régionaux de la qualité de l'air.
Monsieur le secrétaire d'État, ma question est multiple.
Tout d'abord, où en est la mise en oeuvre des mesures annoncées, notamment celles qui visent à obtenir une réduction des émissions ?
Ensuite, le problème de l'air du métro parisien pouvant, le cas échéant, se rencontrer pour d'autres infrastructures de transport, le Gouvernement envisage-t-il d'engager des actions auprès des gestionnaires concernés en vue de les sensibiliser à cette question ?
Par ailleurs, dans la mesure où il s'agit d'un problème de santé publique, où en sont les études épidémiologiques en cours puisque aucun résultat n'est disponible à ce jour ?
Autre question annexe, est-il raisonnable de laisser un problème de santé publique aussi important à la responsabilité de la RATP, entreprise certes publique, mais dont l'objet n'est pas de gérer ce type de questions, même si, curieusement, c'est elle qui a autorité sur l'air du métro ?
Est-il envisageable de mettre en place un programme d'actions et de recherches associant les pouvoirs publics, la RATP, les industriels et les équipementiers concernés, en vue de progresser dans la recherche de solutions techniques opérationnelles à courte ou moyenne échéance ?
Monsieur le secrétaire d'État, les problèmes de pollution atmosphérique ne doivent pas être dissociés de la question du réchauffement climatique. Où en est la loi sur l'atmosphère, qui devrait porter à la fois sur la question de la pollution, au-delà du problème des particules, et du réchauffement climatique ?
Je le reconnais, ma question est un peu plus large que celle qui vous a été adressée. Je ne vous en tiendrai donc pas rigueur si certains éléments nécessitent plutôt une réponse écrite.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports. Monsieur Pozzo di Borgo, vous avez effectivement posé de très nombreuses questions. Je vous prie de m'excuser par avance si certaines sont laissées en attente. Comme vous l'avez d'ailleurs fort cordialement suggéré, j'y répondrai par écrit. Je vous saurais donc gré de bien vouloir me fournir l'intégralité de la nouvelle version de votre question.
En cette période de mouvement social, la question de l'automatisation des lignes de métro est effectivement d'actualité. Tous les Franciliens, les Parisiens ont pu constater, comme vous, que la ligne automatisée 14, autrefois appelée METEOR, fonctionne normalement depuis le début du conflit.
De surcroît, la ligne 14 mise à part, la ligne qui fonctionne le mieux pendant la grève est justement celle qui sera prochainement automatisée, à savoir la ligne 1. C'est la ligne historique du métro parisien, la toute première, construite par Fulgence Bienvenüe, qui relie aujourd'hui Vincennes à La Défense. Le système de portes palières mis en place permet d'assurer à la fois de meilleures conditions de sécurité et un contrôle des flux plus efficace.
La RATP a d'ailleurs d'autres projets d'automatisation de lignes à fort trafic, avec pour objectif l'augmentation de la sécurité et de la fréquence des rames.
J'en viens maintenant au problème de la pollution que vous avez évoqué.
Ma collègue Nathalie Kosciusko-Morizet est venue récemment faire un état des lieux sur le réseau de la RATP, en compagnie du président de l'entreprise, Pierre Mongin. La situation soulève effectivement de réelles préoccupations.
Sur l'ensemble du réseau, il existe cinq stations fixes de mesure, implantées aussi bien dans le métro que dans le RER.
Les polluants que l'on retrouve dans les enceintes du métro à des concentrations bien plus élevées qu'à l'extérieur sont effectivement les particules. Vous l'avez souligné à juste titre, celles-ci sont produites par frottement, lors du freinage des rames en station.
Dans l'ensemble, les niveaux relevés sont conformes à ceux qui sont recommandés par le Conseil supérieur d'hygiène public de France.
M. Yves Pozzo di Borgo. C'est faux !
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Monsieur Pozzo di Borgo, si vous détenez des informations contradictoires, il importe véritablement que vous puissiez nous les fournir. Si mes renseignements sont erronés, il faudra que quelqu'un se « fasse tirer les oreilles », soit au Conseil supérieur d'hygiène public de France, soit chez ceux qui leur fournissent de mauvais chiffres !
Vous l'avez rappelé, la RATP a réalisé des études d'exposition auprès de ses personnels, pour rechercher s'il existe un lien entre la situation sanitaire des salariés et le temps passé dans les enceintes ferroviaires. En l'état actuel, les études ne montrent pas d'incidence notable de cette pollution.
Sont par ailleurs mises en place des mesures techniques pour diminuer les concentrations de particules et atténuer les nuisances associées.
L'un de nos plus grands ingénieurs, Louis Armand, qui a d'ailleurs été membre du gouvernement avant-guerre, avait coutume de dire que, si le chemin de fer franchissait le xxe siècle, il serait le mode d'avenir du xxie siècle. C'est le cas aujourd'hui puisque, partout dans le monde, de nouvelles lignes de métro, de tramway et de chemin de fer sont construites. Cela étant, le problème de freinage et de contact avec l'acier demeure.
Il importe donc de poursuivre nos efforts de recherche, pour optimiser le freinage, mieux renouveler l'air à l'intérieur du réseau de la RATP, mais aussi dans les autres réseaux - comme à Marseille, monsieur le président ! -, améliorer les systèmes d'extraction et supprimer les portes d'accès au métro et au RER, afin d'assurer une circulation d'air maximale.
Il convient de citer également la mise au point de techniques de nettoyage des tunnels alliant le lavage, le chaulage et l'aspiration. Monsieur Pozzo di Borgo, si vous le souhaitez, je demanderai au président Mongin de vous emmener un soir dans un des trains qui parcourent les lignes de métro la nuit. Vous verrez, c'est assez impressionnant !
Naturellement, il faut vérifier si le dispositif d'ensemble est efficace.
Il faut aussi, et c'est l'intérêt de votre question, que le public concerné puisse avoir accès à l'information. À ce titre, Nathalie Kosciusko-Morizet et moi-même avons donc demandé à la RATP et à AIRPARIF, l'association de surveillance de la qualité de l'air en Île-de-France, de se rapprocher afin de pouvoir communiquer les chiffres dont elles disposent.
Plus globalement, tous les efforts doivent être amplifiés, pour poursuivre notamment les actions de connaissance des facteurs déterminants de la qualité de l'air intérieur, qui sont actuellement conduites par l'Observatoire de la qualité de l'air intérieur. Il faut également impliquer davantage les associations et le public et développer la recherche technique sur les produits et les matériaux de construction.
De même, j'ai demandé aux services du ministère de nous proposer un indice de la qualité de l'air intérieur, ce qui nous permettrait d'assurer une bonne information du public et une meilleure gestion des réseaux.
Monsieur Pozzo di Borgo, en tant que sénateur de Paris, vous connaissez assurément bien votre ville. Si vous avez donc des informations complémentaires de quelque nature que ce soit, je suis très preneur. Vous avez eu raison de soulever ce vrai problème, car nous voulons effectivement développer le transport public, mais dans les meilleures conditions possibles, à la fois pour l'environnement et pour la santé des usagers.
M. le président. La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo.
M. Yves Pozzo di Borgo. Mon tempérament méditerranéen m'a fait dire de façon quelque peu excessive que les statistiques concernant la pollution que vous avez citées, monsieur le secrétaire d'État, étaient fausses.
Les informations dont je dispose et que je tiens, comme souvent dans ce type de dossiers, des agents en charge de ces missions, indiquent en fait que les cinq stations de mesures existantes ne sont pas suffisantes. Des mesures ponctuelles effectuées par ailleurs ont montré que le taux réel de pollution était bien plus important que ne veut bien l'admettre, à des fins d'apaisement, la RATP.
Je vous prie de bien vouloir m'excuser si j'ai un peu « grossi » les faits, mais je tenais à dire que l'appréhension du problème de la pollution dans le métro devait être plus significative, plus scientifique et plus large.
J'ai eu l'occasion, lorsque j'étais inspecteur général de l'éducation nationale en charge des questions d'hygiène et de sécurité, et notamment des problèmes d'amiante, d'organiser plusieurs réunions sur le sujet. J'avais déjà été surpris, à l'époque, d'entendre ce type de discours, le même qui est en vigueur aujourd'hui s'agissant de la pollution dans le métro.
Les chiffres que j'ai obtenus confirment qu'il s'agit d'un problème très grave, et mon collègue Philippe Richert est d'accord avec moi sur ce point. La RATP relevant de votre compétence, monsieur le secrétaire d'État chargé des transports, je vous pose la question suivante : ne devrait-on pas retirer à la RATP, en concertation avec elle, son autorité dans un dossier aussi lourd, dans la mesure où cette entreprise n'a pas la compétence pour gérer ce type de problème, qui se posera de nouveau à l'avenir ?
Je vous remercie encore pour votre réponse, monsieur le secrétaire d'État, et je ne manquerai pas de vous envoyer une question écrite détaillée sur le sujet.
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