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Marie-Thérèse Hermange
Question orale sans débat N° 21 au Secrétariat d'État de la solidarité


Structures d'insertion professionnelle pour les personnes handicapées en Ile-de-France

Question soumise le 2 août 2007

Mme Marie-Thérèse Hermange attire l'attention de Mme la secrétaire d'État chargée de la solidarité sur l'éventuelle réduction du nombre de structures d'insertion professionnelle pour les personnes handicapées au sein de la région Ile-de-France.

Afin d'améliorer l'insertion professionnelle des personnes handicapées en recherche d'emploi, qui se révèle deux fois plus importante que pour l'ensemble de la population, la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 « pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées » a modifié le mode de prise en compte des travailleurs handicapés dans le décompte de l'entreprise. Cette dernière est en effet passée d'une notion d'unité bénéficiaire en fonction du degré de handicap (énoncé à travers les catégorie A, B, C) à un décompte correspondant à une personne pour une unité. De plus, ladite loi a créé une forte incitation pour les entreprises en augmentant de façon significative leur contribution qui a progressé de près de 20%
(600 fois le SMIC contre 500 auparavant).

Les « recettes » de l'association de gestion des fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées, l'AGEFIPH, s'en trouveront donc abondées de façon mécanique. Quant à la renégociation de la convention entre l'État et l'AGEFIPH régissant les organismes de placement spécialisé (OPS) labellisés CAP emploi (au nombre de 118 à l'échelle nationale et 17 dans la région Ile-de-France), elle devrait intégrer logiquement un accroissement des moyens dédiés à l'insertion et à la réinsertion professionnelle des personnes handicapées. Compte tenu de l'augmentation significative de la contribution au service de l'insertion professionnelle, les budgets des CAP emploi qui ne représentent que 17% du budget de l'AGEFIPH devraient aussi connaître un renforcement. Or, paradoxalement, il s'avère que l'AGEFIPH envisage de recourir à un appel d'offre afin de réduire le nombre de CAP emploi dans certains départements, notamment dans la région Ile-de-France où la réalité économique des bassins d'emploi est potentiellement plus importante que dans d'autres régions. Ces CAP emploi, créés pour certains depuis 1976, dont les interventions s'inscrivent dans le cadre de la convention État/ AGEFIPH sous la forme de délégation de service public et de partenariat avec le service public de l'emploi, jouent un rôle primordial dans l'accueil, l'accompagnement et l'insertion des travailleurs handicapés, mais aussi représentent les interlocuteurs privilégiés des entreprises en matière de placement
(obtention de plus de 120 000 contrats de travail en faveur de ce public).

Se fondant sur une interprétation erronée de la loi, l'AGEFIPH estime à tort, de sa seule responsabilité d'organiser une procédure de conventionnement des CAP emploi au terme d'un appel d'offre ouvert notamment aux entreprises ou agences d'intérim, alors que les spécificités de ce public très fragile, rendent indispensable l'intervention de véritables professionnels ayant une connaissance approfondie du handicap tels que les CAP emploi.

Ainsi que le rappelait la commission des affaires sociales du Sénat lors de l'examen du rapport d'information sur l'application de la loi du 11 février 2005 précitée : « Le législateur a souhaité que l'État conserve ses responsabilités de pilotage du dispositif CAP emploi : en témoigne d'ailleurs la création du comité national de pilotage auquel participent l'État et le service public de l'emploi. Il n'a donc jamais été question de confier à la seule AGEFIPH le conventionnement des CAP emploi ».

C'est pourquoi, elle lui demande de préciser le rôle et la position de l'État à l'égard du conventionnement des CAP emploi et d'intervenir urgemment auprès de l'AGEFIPH pour interrompre la procédure d'appel d'offre actuellement organisée en Ile-de-France et qui apparaît aujourd'hui totalement infondée.

Réponse émise le 10 octobre 2007

M. le président. La parole est à Mme Marie-Thérèse Hermange, auteur de la question n° 21, adressée à Mme la secrétaire d'État chargée de la solidarité.

Mme Marie-Thérèse Hermange. Madame la secrétaire d'État, ma question porte sur l'éventuelle réduction du nombre des structures d'insertion professionnelle pour les personnes handicapées au sein de la région d'Île-de-France.

La loi de 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées que nous avons adoptée a modifié le mode de prise en compte des travailleurs handicapés dans le décompte de l'entreprise. En augmentant de façon significative leur contribution, qui a d'ailleurs progressé de près de 20 %, elle a créé une forte incitation pour les entreprises.

Les « recettes » de l'Association de gestion des fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées, l'AGEFIPH, doivent s'en trouver abondées de façon mécanique. Quant à la renégociation de la convention entre l'État et l'AGEFIPH, elle devrait intégrer logiquement un accroissement des moyens dédiés à l'insertion.

Or, de façon paradoxale, l'AGEFIPH, qui envisage de recourir à des agences d'intérim ou à d'autres entreprises, va réduire le nombre des Cap Emploi dans certains départements, notamment dans la région d'Île-de-France, mais peut-être pas uniquement.

Les interventions des Cap Emploi, créés pour certains d'entre eux en 1976, s'inscrivent dans le cadre de la convention liant l'État à l'AGEFIPH, sous la forme de délégation de service public et de partenariat avec le service public de l'emploi.

Or ces Cap Emploi non seulement jouent un rôle primordial dans l'accueil, l'accompagnement et l'insertion des travailleurs handicapés, mais aussi constituent les interlocuteurs privilégiés des entreprises en matière de placement.

En se fondant sur une interprétation erronée de la loi, l'AGEFIPH met en quelque sorte de côté les Cap Emploi.

Pourtant, je le rappelle, la commission des affaires sociales du Sénat avait indiqué, lors de l'examen du rapport d'information sur l'application de la loi de 2005 : « Le législateur a souhaité que l'État conserve ses responsabilités de pilotage du dispositif Cap Emploi : en témoigne d'ailleurs la création du comité national de pilotage [...]. Il n'a donc jamais été question de confier à la seule AGEFIPH le conventionnement des Cap Emploi ».

Ce problème se pose dans les départements de la région d'Île-de-France, mais d'autres sont peut-être également concernés. Quelle est donc, madame la secrétaire d'État, la position de l'État à l'égard du conventionnement des Cap Emploi par l'AGEFIPH ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État chargée de la solidarité. Madame la sénatrice, comme vous, je suis extrêmement attachée à l'existence des Cap Emploi, qui rendent des services considérables pour l'emploi des handicapés, puisqu'ils accompagnent chaque année plus de 80 000 personnes et contribuent au placement de 45 000 d'entre elles.

Les Cap Emploi disposent d'une compétence propre, qui leur est confiée par la loi, celle de préparer, d'accompagner vers l'emploi et de placer les travailleurs handicapés en milieu ordinaire de travail. Ils ne constituent donc pas des prestataires auxquels l'AGEFIPH peut choisir de recourir, ou non, afin d'exercer l'une de ses missions propres. Ils sont des partenaires, et la loi impose à l'AGEFIPH, compte tenu de son objet social, de contribuer à leur financement.

Cette précision apportée, vous conviendrez, madame la sénatrice, qu'il est indispensable de s'assurer de la qualité des prestations offertes en matière de préparation, d'accompagnement vers l'emploi et de placement des travailleurs handicapés. C'est pourquoi la loi a prévu que les organismes de placement spécialisés, auxquels cette mission est confiée, sont préalablement conventionnés et voient leurs résultats régulièrement évalués.

En cas de défaillance, un déconventionnement doit pouvoir intervenir et un nouvel opérateur être sélectionné, afin que ces missions continuent d'être assurées sur le territoire considéré. Dans ce contexte, il n'est pas anormal de prévoir une procédure de sélection par appel d'offre.

Madame la sénatrice, vous vous interrogez sur l'autorité responsable du conventionnement des Cap Emploi, et je reconnais volontiers que la loi n'est pas explicite à ce sujet.

En l'absence de précision législative, vous concluez, légitimement d'ailleurs, que cette responsabilité incombe à l'État, et vous avez raison. Toutefois, l'État est libre de déléguer cette compétence, sous son contrôle, à un autre opérateur, s'il juge que c'est plus pertinent. En l'occurrence, c'est ce qu'il a choisi de faire pour le conventionnement des Cap Emploi.

L'État intervient ainsi de deux manières dans le conventionnement des Cap Emploi.

Tout d'abord, il exerce un rôle d'orientation et d'impulsion de la politique en faveur des Cap Emploi, à travers la définition de leur offre nationale de service. Ainsi, un protocole national a été signé sur ce sujet en janvier 2007 avec l'AGEFIPH et les têtes de réseau Cap Emploi.

Ensuite, il cosigne chaque convention passée au niveau local avec les Cap Emploi. Il s'agit donc de conventions tripartites, car il était normal d'associer l'AGEFIPH, en tant que financeur.

Au quotidien, l'État a choisi en revanche de déléguer le suivi des conventions à l'AGEFIPH et à son réseau régional. À ce titre, l'association s'assure du respect de l'offre de service élaborée avec l'État, à travers une procédure d'audit dont les conclusions auront été rendues pour l'ensemble des structures d'ici à la fin de l'année 2007.

Enfin, L'AGEFIPH assure, pour le compte de l'État, la sélection du nouvel opérateur lorsque l'audit conclut à un nécessaire déconventionnement du Cap Emploi existant. Néanmoins, l'État continue de ratifier cette sélection à travers la signature de la convention.

Vous le voyez, madame la sénatrice, l'État reste largement mobilisé dans le pilotage du réseau Cap Emploi. Je veillerai d'ailleurs à ce qu'il en aille encore ainsi à l'avenir : des instructions seront données aux directions départementales du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, afin notamment qu'elles participent activement aux comités de pilotage régionaux chargés d'instruire les décisions de conventionnement.

S'agissant du recours à l'appel d'offre, il ne me paraît pas contestable, tant qu'il demeure un moyen de sélectionner le nouvel opérateur en cas de défaillance du précédent et non une procédure systématique visant, tous les trois ans, l'ensemble du réseau. En effet, une telle démarche conduirait véritablement à déstabiliser le dispositif, en empêchant la constitution d'une authentique expertise professionnelle.

Je m'attarderai toutefois sur la question particulière de l'appel d'offre lancé par l'AGEFIPH en région parisienne, car tel est votre souci, madame la sénatrice.

L'Île-de-France se trouve dans une situation particulière : pour des raisons historiques, elle compte dix-sept Cap Emploi pour huit départements. Bien que la taille des bassins d'emploi puisse justifier un nombre de structures plus important qu'ailleurs, vous conviendrez, madame la sénatrice, qu'il est légitime de s'interroger sur une optimisation de l'implantation de ces dernières.

Un travail est engagé en ce sens depuis 2004, mais il n'a abouti à ce stade qu'à une seule fusion. Considérant cette unique fusion comme insuffisante, l'AGEFIPH, en accord avec ses autorités de tutelle, a décidé de prendre en main cette optimisation en définissant elle-même un schéma régional d'implantation et en lançant un appel d'offre afin de sélectionner les structures qui répondent aux orientations de ce schéma.

Si cette démarche est légitime, l'AGEFIPH est allée trop vite, me semble-t-il, en considérant d'emblée, de façon systématique et sans attendre les conclusions de l'audit qu'elle avait elle-même lancé, que le schéma optimal d'implantation est un seul Cap Emploi par département ; or, sélectionner de façon rigide une organisation unique sans attendre les conclusions de l'audit, c'est prendre le risque de supprimer des structures qui rendent de réels services.

Je crois donc prudent de nous donner du temps dans cette procédure, pour pouvoir prendre connaissance des résultats de l'audit et définir un schéma d'implantation des Cap Emploi partagé entre l'AGEFIPH, le ministère de l'économie, des finances et de l'emploi, qui est chargé de la tutelle de l'agence, et les organismes de placement spécialisés concernés. Ces démarches accomplies, l'appel d'offre pourrait être réactivé, sur des bases plus saines.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Thérèse Hermange.

Mme Marie-Thérèse Hermange. Je vous remercie, madame la secrétaire d'État, de votre réponse très complète. Je proposerai à certains collègues de Paris et d'Île-de-France de réunir les Cap Emploi de la région pour leur indiquer le contenu de votre réponse. Je ne doute pas que cela suffira à apaiser les esprits.

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