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Jean-Marc Pastor
Question orale sans débat N° 28 au Secrétariat d'État de l'écologie


Sécurité des tracteurs anciens en service

Question soumise le 13 septembre 2007

M. Jean-Marc Pastor attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur la mise en oeuvre de l'article 72 de la loi n° 2005-157 du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux, article 72 qui a pour objet la sécurité des tracteurs anciens en service sur une exploitation. Depuis 2005, une étude avait été confiée à la MSA Tarn-Aveyron-Lot en partenariat avec le ministère de l'agriculture et de la pêche, le CEMAGREF, la CCMSA, la FDCUMA du Tarn, la chambre d'agriculture du Tarn et le conseil général du Tarn. Son objet était, en premier lieu, d'évaluer l'importance relative du parc de tracteurs concernés par la réglementation sur une zone géographique déterminée et, en second lieu, d'apprécier comment il est possible d'équiper les tracteurs anciens d'un dispositif de sécurité anti-retournement d'un point de vue technique, juridique et économique. Cette étude est terminée depuis le mois de mai 2007 et le rapport qui en présente les résultats a dû être adressé au ministère dans le courant du mois de juillet dernier. Compte tenu de l'obligation fixée par la loi avant le 1er janvier 2010, il lui demande comment il envisage l'exploitation des résultats de l'étude qui lui a été remise.

Réponse émise le 24 octobre 2007

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Pastor, auteur de la question n° 28, adressée à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

M. Jean-Marc Pastor. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, depuis l'adoption en 2005 de l'article 72 de la loi relative au développement des territoires ruraux, une expérimentation a été mise en place dans le Tarn dans le cadre d'un partenariat entre le ministère de l'agriculture, le Centre national du machinisme agricole, du génie rural, des eaux et des forêts, ou CEMAGREF, la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole, la fédération départementale des coopératives d'utilisation en commun de matériel agricole, les CUMA, la chambre d'agriculture et le conseil général du Tarn.

Un énorme travail a été réalisé sur le terrain par la MSA Tarn-Aveyron-Lot, maître d'oeuvre de l'expérimentation. La MSA a diligenté une enquête directe auprès des agriculteurs et a piloté, en parallèle, une étude de faisabilité relative à l'équipement d'un dispositif de protection contre le retournement grâce au concours de la section de techniciens supérieurs en agroéquipement du lycée agricole Aucouturier de Carmaux.

L'enquête de la MSA conduite dans le Tarn - 635 questionnaires ont été envoyés - montre que 60 % des exploitations possèdent au moins un tracteur sans structure de protection contre le retournement et que 24 % en possèdent deux, certaines exploitations fonctionnant même exclusivement avec ce type de vieux tracteurs non équipés, lesquels représentent 28 % du parc.

L'enquête montre également que ces tracteurs sans structure de protection sont en réalité utilisés pendant un volume important d'heures - plus de 170 heures par an en moyenne - et pour des activités à risques - travaux de culture, de manutention, etc.

Il convient aussi de noter que 13 % des exploitations consultées ont connu un renversement de tracteur, ce qui n'est pas neutre.

Près de 75 % des exploitants possédant un tracteur sans système de protection contre le retournement jugent que cet équipement est applicable dans leur exploitation. La plupart d'entre eux sont d'ailleurs prêts à participer financièrement à l'aménagement de cet équipement.

S'agissant de la faisabilité, le logiciel du CEMAGREF pour l'installation d'un arceau, disponible en utilisation libre sur le site du ministère de l'agriculture, est largement méconnu des professionnels : deux concessionnaires sur trente en connaissaient l'existence dans le Tarn.

Sur le plan juridique, pour contrôler si le travail est réalisé dans les règles, deux cas se présentent : soit le travail est réalisé par un professionnel, et cela ne pose pas de problème majeur ; soit l'agriculteur réalise lui-même le travail, et il doit pouvoir prouver qu'il respecte les règles de l'art en matière de sécurité.

Sur le plan économique, le coût d'installation d'une structure de protection contre le retournement varie entre 800 euros et 1 200 euros, si ce n'est pas l'agriculteur qui procède à l'installation.

Madame la secrétaire d'État, depuis le mois de mai dernier, ce dossier n'a plus avancé ; je me permets donc de vous interroger sur quatre points.

Premièrement, quelle suite comptez-vous donner à l'application de cette mesure votée à l'unanimité par le Sénat ?

Deuxièmement, ne pouvez-vous envisager une meilleure communication du logiciel du CEMAGREF auprès des professionnels ?

Troisièmement, comptez-vous faire en sorte que le coût d'équipement de la structure soit maîtrisé, quitte à y affecter une partie de l'aide financière de l'État ?

Quatrièmement, comment comptez-vous passer de l'expérimentation tarnaise - voulue par vos services - à la généralisation du dispositif, ce qui implique une sensibilisation dans tous les départements ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État chargée de l'écologie. Monsieur le sénateur, le ministre de l'agriculture et de la pêche, Michel Barnier, retenu au Conseil « Agriculture et pêche » au Luxembourg, m'a demandé de vous répondre et, d'abord, de vous remercier d'appeler son attention sur la mise en oeuvre de l'article 72 de la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux, à l'origine de laquelle vous vous trouvez.

Cet article concerne la sécurisation des équipements de travail mobiles avec travailleurs portés, et plus particulièrement la prévention du risque de retournement des tracteurs en service sur une exploitation.

Comme vous l'avez souligné, un trop grand nombre d'accidents mortels du travail ont lieu par renversement de tracteurs dépourvus d'une structure de protection. Aussi, la loi prévoit qu'une structure anti-retournement devra équiper tous les tracteurs en service sur une exploitation, et ce au plus tard le 1er janvier 2010.

Un cahier des charges a fixé les prescriptions techniques applicables pour équiper les tracteurs du parc ancien d'un dispositif approprié de protection en cas de renversement. Les agriculteurs, les distributeurs et les constructeurs peuvent ainsi disposer de tous les référentiels techniques nécessaires. Ce texte a fait l'objet d'un arrêté publié au Journal officiel du 18 mars 2006.

Plusieurs mesures d'accompagnement ont été réalisées. D'abord, un logiciel disponible sur le site Internet du ministère de l'agriculture permet la conception et l'installation par toute personne compétente d'un arceau arrière de protection pour les tracteurs anciens. Ce programme informatique est enrichi en continu en fonction des besoins exprimés par les utilisateurs. Les partenaires sociaux du monde agricole ont été informés de l'ensemble de ces dispositions.

Les services du ministère de l'agriculture et de la pêche ont, bien sûr, participé à l'étude de faisabilité menée en 2006 et en 2007 par la Mutualité sociale agricole Tarn-Aveyron-Lot ; ils ont pu apprécier la qualité du travail effectué à cette occasion. Les conclusions et les propositions portant sur des points à la fois techniques, juridiques et économiques ont fait l'objet d'un examen attentif.

Le ministère de l'agriculture et de la pêche, en conséquence, a orienté son action vers les exploitations agricoles localisées en zone de montagne, où le risque de renversement du tracteur est très significatif. À ce titre, les dispositifs de sécurité anti-retournement sont éligibles à l'aide à la mécanisation, y compris pour les tracteurs du parc existant. L'aide accordée pour ce dispositif est de 20 % - part État et part Union européenne - en zone de montagne et de 30 % en zone de haute montagne.

Pour l'année 2007, une enveloppe de 1 million d'euros a été mobilisée en faveur de l'aide à la mécanisation, appelant un cofinancement européen équivalent dans la mesure où cette action est inscrite au programme de développement rural hexagonal, le PDRH.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Pastor.

M. Jean-Marc Pastor. Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse qui, si elle prend en considération le problème soulevé dans ma question et marque de bonnes intentions, me semble toutefois manquer de précisions quant aux incitations financières de l'État.

Vous avez indiqué que seules les zones de montagne seront éligibles. Je me permets d'insister sur le fait que, toujours d'après l'enquête que j'ai précédemment évoquée, la plupart des accidents ont lieu plutôt en zones de plaine ou de piémont, justement parce que les conducteurs se croient en sécurité. En zones de montagne, très pentues, ces derniers font plus attention, et les équipements sont plus larges.

Compte tenu de cette remarque, il conviendrait d'apporter quelques correctifs si l'on veut assurer la sécurité de nos concitoyens.

Depuis 2002, année où la MSA a pris en charge la comptabilisation des non-salariés agricoles, il apparaît que le nombre de décès lors de renversements de tracteurs, c'est-à-dire sans tenir compte des autres types d'accidents, se situe entre soixante-dix et une centaine par an, soit plus de deux fois et demi le nombre de salariés agricoles tués pendant la même période. Ces chiffres sont d'autant plus significatifs que, dans les exploitations où travaillent des salariés, les arceaux de sécurité sont obligatoires.

Dans le département du Tarn, six accidents mortels se sont produits durant le premier semestre de cette année. En moyenne, on dénombre une dizaine d'accidents mortels par an.

De la même manière qu'il est légitime de vouloir diminuer la mortalité routière, il me paraît légitime de vouloir abaisser le nombre de drames ordinaires sur des tracteurs anciens qui conservent une valeur d'usage pour leurs propriétaires. Une aide financière de l'État permettrait assurément, outre une sensibilisation à la sécurité, d'enclencher un processus de sécurisation qui ne s'avère certes pas prohibitif mais qui se mesure au regard de la valeur économique des tracteurs existants. Plusieurs partenaires - l'État, mais aussi la MSA, le conseil général... - pourraient d'ailleurs s'associer sur une telle question.

Telles sont les observations que je vous demande, madame la secrétaire d'État, de bien vouloir transmettre à M. le ministre de l'agriculture.

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