M. Marcel Rainaud attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la nécessité de sauvegarder l'enquête sociale pour le juge aux affaires familiales.
L'enquête sociale constitue un outil particulièrement précieux, permettant au juge des affaires familiales de recueillir des renseignements objectifs sur les situations des familles et les conditions dans lesquelles vivent et sont élevés les enfants.
Cette évaluation, faite par des professionnels, permet au juge de disposer des éléments indispensables au moment de prononcer sa décision en matière de garde d'enfant notamment.
Or, le décret n° 2009-285 du 12 mars 2009 relatif aux enquêteurs sociaux et à la tarification des enquêtes sociales en matière civile et l'arrêté du 12 mars 2009 pris en application de l'article 12 du décret précité signent la disparition de l'enquête sociale, dont le tarif est dès lors fixé au tiers du tarif actuel.
L'État prend ainsi la décision de réduire l'enquête sociale à un simple relevé d'informations. Il fragilise l'organisation des services, écarte les services chargés de l'IOE et l'AEMO – investigation et orientation éducative, et action éducative en milieu ouvert - comprenant des équipes spécifiques.
Autant de mesures préventives qui seraient ainsi supprimées ou confiées à un marché non professionnel.
Il lui demande de ne pas sacrifier l'avenir des enfants concernés au nom de mesures d'économies budgétaires aveugles, et de préciser si elle entend dans un premier temps abroger ce décret, avant d'ouvrir une véritable discussion autour de l'évolution éventuelle de l'enquête sociale avec les principaux partenaires concernés.
La garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que s'il est exact que la publication de ces textes a été retardée, un important travail de concertation avait été mis en place par les services de la Chancellerie. Elle porte à la connaissance de l'honorable parlementaire les informations suivantes qui contribuent à éclairer les conditions d'application du nouveau droit en vigueur. Avant le décret du 12 mars 2009, les enquêtes sociales étaient confiées à, je cite, « toute personne qualifiée », c'est-à-dire, en pratique, des assistants sociaux, des éducateurs, des fonctionnaires de police ou de gendarmerie à la retraite... exerçant à titre libéral ou en qualité de salarié d'une association. En raison de l'absence de statut bien défini, le recrutement des enquêteurs sociaux était très hétérogène selon les juridictions et sans aucun contrôle. La pratique et la pénurie des enquêteurs ont conduit les magistrats à choisir des personnes sans procéder à une véritable vérification de leur aptitude professionnelle, si ce n'est a posteriori, au vu de « leurs rapports », conduisant à des prestations de qualité très inégale. Les nouveaux textes ont instauré des modalités de recrutement plus transparentes et collégiales en créant une liste d'enquêteurs sociaux par cour d'appel, sur le modèle de la liste des experts judiciaires, inscrits sous certaines conditions et en permettant au juge de désigner toute personne qualifiée ne figurant pas sur une liste. Ce modèle souple et éprouvé apporte des garanties en termes de qualification auxquelles les associations spécialisées répondent déjà pour la plupart et ne génère aucune incertitude quant à l'exercice de l'activité d'enquêteur social qui reste possible sous forme d'exercice individuel ou en qualité de salarié d'une association. S'agissant en outre de la question de la tarification, l'analyse élaborée avec l'appui de la direction de la protection judiciaire de la jeunesse, qui a été associée dès l'origine aux travaux d'élaboration de ces textes, fait apparaître que l'enquête social du JAF vise à brosser la situation familiale et les possibilités de réalisation du projet des parents quant aux modalités d'exercice de l'autorité parentale et ne préjuge pas de l'utilité postérieure d'une enquête plus approfondie menée dans le cadre d'une procédure devant le juge pour enfants. À la demande de la ministre, les associations représentatives des travailleurs sociaux ont été récemment reçues à la direction des affaires civiles et du sceau, laquelle a écouté, avec beaucoup d'attention, les observations formulées. Au vu de celles-ci, la garde des sceaux a demandé au secrétariat général du ministère de la justice d'étudier les conditions d'un réexamen de la tarification des enquêtes sociales en matière civile.
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