M. Simon Sutour. Ma question s'adressait à Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.
La crise économique est devant nous. Selon l'ancien président de la Réserve fédérale américaine, M. Alan Greenspan, elle serait la plus grave depuis 1929. Pour le directeur général du Fonds monétaire international, Dominique Strauss-Kahn, la finance mondiale fait aujourd'hui face à un « risque de rupture ».
L'économie française subit une crise liée à l'envolée des cours du pétrole et des matières premières.
Après avoir soutenu fermement pendant des semaines qu'il n'y avait aucune raison de changer les prévisions de croissance de 2008, qui se situaient entre 2 % et 2,25 %, le Gouvernement, contraint par la réalité, s'est résigné à admettre que le taux réel pourrait descendre sous la barre des 2 %, pour se situer entre 1,6 % et 1,8 %.
Pour le premier semestre, l'INSEE table désormais sur une croissance de 0,7 %, contre une précédente prévision de 0,9 %. L'augmentation de l'inflation, qui dépasse 3 % en rythme annuel, affecte le pouvoir d'achat, donc la consommation des ménages.
Pour affronter une telle crise, notre pays est affaibli par l'adoption du paquet fiscal, qui a été une double erreur : il a créé de l'injustice et il a été inefficace économiquement.
(Marques d'approbation sur les travées du groupe socialiste.)
La note que les Français vont devoir payer pour ces erreurs économiques sera très lourde. Entre le coût du paquet fiscal - 9 milliards d'euros -, les recettes manquantes liées à l'erreur de prévision de croissance - 10 milliards - et le coût des promesses électorales - près de 7 milliards -, elle s'élèvera à une bonne vingtaine de milliards d'euros.
Pour régler la facture, vous semblez préparer un plan de rigueur, d'abord pour l'État, sous la forme d'annulations de crédits, de suppressions massives d'emplois publics et de baisses de dotations en direction des collectivités locales.
Ensuite, les Français seront évidemment mis à contribution. La hausse de la TVA, de la CSG et de la CRDS, pour financer la dette sociale, sera alors inévitable.
Le Gouvernement doit prendre la mesure de la situation économique et adopter les dispositions qui s'imposent pour préparer notre pays à affronter cette crise.
Nous demandons l'annulation du paquet fiscal. Nous proposons également d'utiliser la présidence française de l'Union européenne pour renforcer le bouclier communautaire par une coordination accrue, avec notamment la création d'un gouvernement économique et le renforcement de l'Eurogroupe. Enfin, nous jugeons qu'il est essentiel de moraliser les pratiques financières. Procéderons-nous comme certains de nos partenaires, qui font assumer aux contribuables les bêtises d'un capitalisme financier totalement dérégulé sans jamais en affronter les limites ?
Que propose donc ce gouvernement qui n'entend ni les messages adressés par les Français aux élections locales - ils sont pourtant forts et puissants (Exclamations sur les travées de l'UMP) - ni ceux des entreprises, inquiètes de l'effondrement de leur compétitivité ? Quand Mme la ministre de l'économie acceptera-t-elle de considérer sérieusement nos propositions, afin de répondre aux difficultés que subissent quotidiennement les Français ?
(Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l'emploi. Monsieur le sénateur, en l'absence de Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, qui est aujourd'hui au Royaume-Uni, vous me permettrez de répondre à votre question.
Vous nous interrogez sur le climat économique. Comme vous l'avez relevé, l'environnement international, et ce n'est une nouvelle pour personne, est incertain, qu'il s'agisse du renchérissement du prix des matières premières ou du climat des marchés financiers, notamment avec les conséquences de la crise des subprimes.
Pour autant, il faut également analyser la situation au niveau de la zone euro, et plus particulièrement de notre pays. S'agissant de la zone euro, les fondamentaux sont beaucoup plus sains puisque les prévisions de croissance de l'OCDE sont, pour les deux premiers trimestres, respectivement de 0,5 % et de 0,4 % pour la zone euro, contre 0 % et 0,1 % aux États-Unis.
S'agissant de la France, la situation économique est encore plus positive, notamment à la suite des réformes qui ont été engagées sous la conduite du Premier ministre.
Prenons des chiffres, monsieur le sénateur.
Tout d'abord, la consommation est restée dynamique en février, avec une hausse de 1,2 %.
M. Jacques Mahéas. Ce sont les prix qui ont augmenté, ce n'est pas la consommation !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Ensuite, les chiffres de la production industrielle sont également en hausse de 1,2 % au mois de février.
Enfin, et nous l'avons mentionné en début de séance, les chiffres de l'emploi restent également orientés de manière favorable.
Par conséquent, monsieur le sénateur, les fondamentaux de notre économie nous incitent à adopter une vision de la réalité un peu moins manichéenne que celle qui a été la vôtre.
L'objectif du Gouvernement est précisément de maintenir une position équilibrée, prenant en compte un climat international qui nous incite à la prudence - sur ce point, vous avez raison -, mais également le fait que l'économie française reste bien orientée.
C'est la raison pour laquelle le Gouvernement a prévu un taux de croissance pour 2008 compris entre 1,7 % et 2 %, ce qui est parfaitement conforme aux évaluations de l'OCDE, de l'INSEE et de la Commission européenne.
Pardonnez-moi, monsieur le sénateur, mais voilà un an que vous prédisez l'Apocalypse ! Or l'objet de la politique, c'est non pas de prédire le pire, mais d'agir pour le mieux !
(Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF. - Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
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