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Adrien Gouteyron
Question orale sans débat N° 166 au Ministère de la santé


Situation de la psychiatrie publique

Question soumise le 14 février 2008

M. Adrien Gouteyron attire l'attention de Mme la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports sur l'état de la psychiatrie publique. Depuis près de vingt ans, de nombreuses fermetures de lits sont à déplorer, passant de près de 80 000 lits en 1989 à 40 000 aujourd'hui. Or, le nombre de patients suivis en psychiatrie a pourtant été multiplié dans la même période par deux. De son côté, le nombre d'hospitalisations contre la volonté du patient ne fait qu'augmenter depuis vingt ans, atteignant aujourd'hui plus d'un patient sur trois. Certes, un plan « santé mentale » a été lancé en 2005, mais il apparaît qu'à peine une mesure sur dix est entrée en application. Pour la plupart - et cet effort est louable - les mesures concernent la sécurité, l'installation de chambres d'isolement, la vidéo surveillance. S'il s'agit là de questions importantes, elles répondent insuffisamment à la prise en charge des grands malades mentaux. Malgré le courage, la compétence et, parfois, l'héroïsme des personnels de ce secteur, il apparaît que la psychiatrie publique traverse une crise grave. Face à cette situation, il lui demande quelles mesures elle entend prendre.

Réponse émise le 30 avril 2008

M. le président. La parole est à M. Adrien Gouteyron, auteur de la question n° 166, adressée à Mme la ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative.

M. Adrien Gouteyron. Madame la ministre, je veux vous interroger sur la situation de la psychiatrie dans notre pays. Si vous le permettez, je profiterai de cette question pour évoquer le cas d'un établissement de mon département.

En ce qui concerne tout d'abord la situation de la psychiatrie, la plupart des études épidémiologiques évaluent la prévalence sur un an des troubles mentaux à environ 15 %. L'augmentation observée depuis plusieurs années de la demande adressée aux professionnels de la psychiatrie et de la santé mentale traduit toutefois moins une augmentation des troubles eux-mêmes qu'un changement global de la perception de la psychiatrie et des psychiatres, qui amplifie la connaissance du fait psychiatrique et permet l'expression de la demande. C'est donc, au fond, une bonne chose.

Dans le même temps – hélas ! –, on note une forte baisse du nombre de psychiatres et aussi de multiples fermetures de lits depuis vingt ans. Certes, les nouveaux médicaments apportent un confort jusque-là jamais atteint, en particulier pour les schizophrènes, et sont de plus en plus efficaces ; mais ils sont aussi de plus en plus coûteux ! En outre, si le médicament est très important, il ne doit pas se substituer à l'attention portée à un sujet qui n'est pas réductible à un catalogue de symptômes.

J'en arrive au cas particulier de l'établissement dont je souhaite vous parler : l'hôpital Sainte-Marie, dans le département de la Haute-Loire, plus précisément au Puy-en-Velay, seul établissement psychiatrique du département.

Cet hôpital a élaboré de manière concertée un projet d'établissement qui a été présenté à plusieurs centaines de salariés et qui prévoit une organisation en pôles. Ce projet s'accompagne d'un schéma directeur architectural prévoyant une mise aux normes absolument nécessaire, ainsi que parfois la démolition de bâtiments anciens impossibles à aménager et leur reconstruction.

Ce plan ambitieux est incontournable. Toutefois, les efforts très importants qui seront faits par l'établissement ne suffiront pas à équilibrer le projet. Aussi des aides sont-elles nécessaires.

Madame la ministre, permettez-moi, en terminant cette question, d'évoquer la situation de l'unité de soins de longue durée de cet établissement. La partition prévue, une réduction très importante d'après les responsables de l'établissement, conduirait à abandonner la moitié de l'unique capacité d'accueil relevant de la spécialité psychiatrique dans notre département de la Haute-Loire.

Telle était la question générale que je voulais vous poser au début de mon propos et je vous remercie, madame la ministre, de m'avoir permis de vous interroger sur le cas particulier d'un établissement auquel nous sommes très attachés.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Monsieur Gouteyron, la question que vous posez met l'accent sur la complexité de la prise en charge des malades en psychiatrie, particulièrement en psychiatrie publique.

Les troubles de la santé mentale, de toute nature et de toute intensité, concernent plus de 10 millions de nos concitoyens. Ainsi, 1 200 000 personnes sont prises en charge tous les ans en psychiatrie publique.

Même si, comme vous l'avez signalé, on observe une diminution du nombre de lits d'hospitalisation au cours des vingt dernières années, la psychiatrie dispose toujours de moyens importants : 73 000 lits et places, 63 000 infirmiers et près de 14 000 psychiatres, dans un contexte d'avancées thérapeutiques majeures. Le budget des établissements psychiatriques dépasse 8 milliards d'euros dans notre pays. Nous devons néanmoins continuer et encore progresser. Le plan Psychiatrie et santé mentale 2005 - 2008 y contribue en grande partie.

Ce plan prend en compte toutes les étapes de soins et d'insertion des patients. Il vise ainsi à développer les solutions de remplacement à l'hospitalisation, à rénover les structures ainsi qu'à favoriser la recherche clinique, l'évaluation et les bonnes pratiques. D'importants moyens y sont consacrés, dont j'ai d'ailleurs eu l'occasion de faire devant vous le bilan à deux reprises : 287,5 millions d'euros sur quatre ans pour les équipes médico-soignantes, 188 millions d'euros pour la formation et les équipements, 750 millions d'euros en investissements pour moderniser plus de 340 structures.

Le dernier bilan, qui remonte à juin 2007, est encourageant, même si la montée en charge est progressive : par exemple, près de 1 500 postes non médicaux et 173 postes médicaux ont été créés dans les établissements, 60 % des mesures prévues sont en cours de réalisation et une coopération accrue entre structures et professionnels est enregistrée.

Je ne méconnais cependant pas les difficultés rencontrées par les professionnels, dont les efforts, les compétences et le sens des responsabilités s'exercent au quotidien dans l'intérêt des patients et de leur entourage. Les métiers de la psychiatrie sont loin d'être faciles !

Les actions que je mène vont dans le sens de nouveaux progrès. Je vais continuer de renforcer les équipes hospitalières – 28,1 millions d'euros seront affectés dans les régions – et de développer les « équipes mobiles précarité », qui viendront renforcer les vingt-cinq équipes existantes, grâce à un effort de 3 millions d'euros. Il est en effet très important de « croiser », dans l'ensemble des structures hospitalières, la psychiatrie avec le concept de précarité. Par ailleurs, 1 million d'euros sera consacré au développement des équipes de psychogériatrie. La pédopsychiatrie sera un axe prioritaire.

Mme Marie-Thérèse Hermange. C'est très important !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. On voit trop de jeunes malades psychiatriques accueillis dans des services d'adultes. Je veillerai à remédier à cette situation, en créant des lits et en trouvant des solutions de remplacement à l'hospitalisation complète.

En outre, j'ai souhaité que soit élaborée une stratégie de prévention du suicide, consacrée en priorité aux jeunes, en particulier aux jeunes homosexuels, avec le développement de formations au repérage de la crise suicidaire.

Vous faites par ailleurs référence, monsieur le sénateur, à l'augmentation du nombre d'hospitalisations sous contrainte. Les précisions que je vous ai apportées vous montrent, je l'espère, combien je suis attachée à apporter des réponses adaptées aux problèmes de la psychiatrie, dans l'intérêt des professionnels, avec le souci constant d'un accès aux soins de qualité, au service des personnes en souffrance psychique et de leurs proches.

Quant au centre hospitalier Sainte-Marie du Puy-en-Velay, auquel vous êtes particulièrement attaché, tout comme le maire de cette commune, …
(Sourires.)

M. Adrien Gouteyron. En effet !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. … qui a appelé à de nombreuses reprises, comme vous-même, mon attention sur sa situation, il fait l'objet depuis 2006 de travaux de remise aux normes pour la prise en charge des patients et d'investissements en matière de sécurité.

L'établissement a bénéficié, en 2006, de 50 000 euros au titre des surcoûts liés à la rénovation du service de psychiatrie infanto-juvénile. Dès 2007, un effort de plus de 1 million d'euros a été consenti pour la création d'une unité fermée sécurisée, ainsi que pour la restructuration des consultations médicales.

Par ailleurs, la prise en charge des personnes âgées dépendantes retient pleinement l'attention de mes services. Il s'agit également d'un axe prioritaire de mon action. La demande d'un maintien d'une unité gérontopsychiatrique a été entendue par l'Agence régionale de l'hospitalisation d'Auvergne, laquelle a débloqué 40 000 euros en vue de la réalisation d'une étude sur la filière gériatrique dans ce territoire de santé.

Comme vous pouvez le constater, l'État s'est fermement engagé dans l'accompagnement des projets portés par le centre hospitalier Sainte-Marie. Bien entendu, monsieur le sénateur, chaque fois que vous viendrez me parler des difficultés rencontrées par ce centre, soyez assuré d'une très bonne écoute de ma part.

M. le président. La parole est à M. Adrien Gouteyron.

M. Adrien Gouteyron. Je vous remercie très chaleureusement, madame la ministre, de la réponse que vous venez de me faire.

J'avais prévu de ne poser qu'une question d'ordre général, mais les événements m'ont conduit à évoquer un cas particulier concernant mon département.

Sur le plan général, votre réponse est très intéressante et conforme à celle que vous m'aviez déjà faite lorsque je vous avais interrogée sur le suicide, véritable drame – hélas !– auquel est confronté notre pays. Des situations particulièrement douloureuses m'avaient amené à soulever cette question.

Je vous remercie des efforts que vous déployez, madame la ministre. Je ne manquerai pas de donner suite à l'invitation à vous rencontrer que vous m'avez faite.

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