M. Georges Mouly attire l'attention de M. le ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité sur la situation des conjoints survivants qui, dans notre pays, ne semble guère satisfaisante pour au moins trois raisons : le taux de la pension de réversion, regrettablement inférieur aux 60 % souhaités, le déplafonnement de cette pension et l'assistance portée aux orphelins, qui ne perçoivent que 80 euros par mois. C'est pourquoi il le remercie de bien vouloir lui préciser de quelles façons le Gouvernement entend améliorer prochainement la condition des conjoints survivants.
M. le président. La parole est à M. Georges Mouly, auteur de la question n° 175, adressée à M. le ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité.
M. Georges Mouly. Madame la secrétaire d'État, la France compte 4 millions de veuves et de veufs, ainsi que 500 000 orphelins de moins de vingt ans. Leur situation demeure préoccupante, et l'annonce récente d'une augmentation du taux de la pension de réversion, qui sera progressivement portée de 54 % à 60 %, est évidemment bienvenue. Elle satisfait une revendication ancienne et légitime.
Au-delà de la douleur et du choc provoqués par la perte d'un être cher, se pose effectivement et souvent, pour le conjoint survivant, le problème d'une chute brutale du niveau des ressources, pouvant trop souvent conduire à une précarisation, voire à une exclusion.
Si l'augmentation du taux de réversion à 60 % donne satisfaction, le calendrier annoncé est source – chacun en conviendra aisément – de quelques frustrations, puisque la progression sera de 2 % par an de 2009 à 2011. C'est dire si l'impact sur le niveau de revenus des intéressés sera faible au regard de l'augmentation du coût de la vie. Toutefois, je le reconnais, on se trouve confronté à la difficile conciliation d'une revendication légitime et d'un contexte budgétaire contraint.
Cela étant, une diminution du délai pourrait-elle être envisagée, monsieur le secrétaire d'État ?
Par ailleurs, je profite de cette occasion pour rappeler une autre revendication de la fédération représentative, à savoir que le taux de réversion soit porté à 70 %, voire à 75 %, faisant ainsi correspondre la progression et la courbe « historique » constatée par les experts depuis 1946.
Le deuil est source de paupérisation, et le taux de la pension de réversion n'est pas seul en cause. Il faut aussi prendre en considération le plafond de ressources qui est, pension comprise, de 1 462 euros.
Alors que l'on peut légitimement considérer que la pension de réversion est un droit acquis sur les cotisations versées par celle ou celui qui a partagé votre vie, ce plafond ne pourrait-il être, pour le moins, relevé ?
En outre, se pose une nouvelle interrogation, source d'inquiétudes.
Compte tenu de la suppression du régime d'assurance veuvage, et donc du remplacement de la cotisation veuvage par une cotisation vieillesse, ne convient-il pas de s'interroger sur le montant réel d'une pension de réversion d'une veuve précoce dont le mari n'aura que faiblement cotisé ? N'y aurait-il pas lieu de profiter du rendez-vous sur les retraites pour y réfléchir ?
Je ne saurais terminer mon intervention sans aborder une autre problématique sensible pour nos concitoyens les plus modestes : l'allocation de soutien familial au bénéfice des orphelins, fixée à 84,60 mois par mois depuis le 1er janvier 2008.
Bien que la pension de réversion soit majorée pour enfant à charge, la prise en charge des enfants reste difficile pour le conjoint survivant. C'est pourquoi les responsables de la fédération des associations de conjoints survivants, la FAVEC, dont je me fais le porte-parole, considérant la qualité de ses responsables et la réalité des problèmes abordés, militent pour une augmentation de cette allocation. Quelle suite peut-elle être donnée à cette demande ?
Ces veuves et veufs ne constituent pas, c'est bien connu, la partie la plus revendicative de la population française. Mais ce n'est pas, chacun en conviendra, une raison pour ignorer leur fragilité et les risques d'exclusion qui guettent certains d'entre eux.
Je vous remercie, madame la secrétaire d'État, de bien vouloir m'apporter une réponse sur les trois points évoqués et, plus généralement, sur les droits des conjoints survivants dans le dispositif général de la solidarité nationale.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Valérie Létard, secrétaire d'État chargée de la solidarité. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d'abord de bien vouloir excuser l'absence du ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité, M. Xavier Bertrand, qui m'a chargée de vous apporter des éléments de réponse.
La revalorisation du niveau des pensions de réversion servies aux conjoints survivants des salariés et travailleurs indépendants est un engagement pris par le Président de la République lors de sa campagne électorale.
Cet engagement sera tenu, vous l'avez rappelé. Dans le document sur le rendez-vous des retraites de 2008, diffusé le 28 avril dernier par le Gouvernement, il est clairement indiqué que le taux des pensions attribuées à partir du 1er janvier 2009 sera de 56 %, contre 54 % aujourd'hui. Les pensions attribuées à partir du 1er janvier 2010 seront, pour leur part, liquidées au taux de 58 %, et celles qui seront attribuées à partir du 1er janvier 2011 seront liquidées au taux de 60 %.
S'agissant du déplafonnement mentionné dans votre question, je pense que vous faites allusion à la condition de ressources à laquelle est subordonné le bénéfice de la pension de réversion. Monsieur le sénateur, la suppression de cette condition serait difficile : son coût pour le seul régime général a été évalué, en 2004, à plus de 2 milliards d'euros.
Au demeurant, cette condition de ressources est déjà relativement souple. En effet, certains revenus ne sont absolument pas pris en compte pour apprécier si cette condition est ou non satisfaite : il s'agit notamment des pensions de réversion servies par les régimes de retraite complémentaire des salariés et travailleurs indépendants et des revenus tirés des biens mobiliers ou immobiliers acquis par suite du décès du conjoint. Ces revenus peuvent se cumuler en totalité avec la pension de réversion, même si cela entraîne un dépassement du plafond de ressources annuel de 17 555 euros.
D'autres revenus ne sont que partiellement pris en compte : il s'agit des revenus professionnels, lesquels sont retenus pour 70 % de leur montant dès lors que le conjoint survivant est âgé d'au moins cinquante-cinq ans. Cela participe de l'incitation à la poursuite ou à la reprise d'une activité à un âge où le taux d'activité est habituellement peu élevé.
Enfin, je rappelle que, grâce à la réforme des retraites de 2003, le conjoint survivant peut désormais, dans la limite du plafond de 17 555 euros, cumuler intégralement sa pension de réversion et ses pensions de retraite. Ce n'était pas obligatoirement le cas avant le 1er juillet 2004, ce qui pénalisait spécifiquement les conjoints survivants qui avaient travaillé.
En ce qui concerne la majoration attribuée au conjoint survivant pour chaque enfant dont il a la charge – 88,72 euros par mois –, elle est aujourd'hui prise en charge par la CNAV. Il convient de porter une attention particulière à la situation des veuves avec de jeunes enfants à charge. C'est la réflexion lancée par le Gouvernement dans le document remis aux partenaires sociaux dans le cadre du rendez-vous 2008.
J'ajoute que des dispositions relatives aux familles monoparentales existent d'ores et déjà dans la réglementation relative aux prestations familiales, soit que cette situation ouvre droit à des prestations ad hoc, soit qu'elle fasse l'objet de modalités particulières d'adaptation des prestations à vocation générale. Ainsi, les personnes isolées ayant à charge un ou plusieurs enfants peuvent bénéficier de l'allocation de parent isolé jusqu'aux trois ans de l'enfant et de l'allocation de soutien familial jusqu'aux vingt ans de l'enfant.
Par ailleurs, les plafonds de ressources applicables à certaines prestations familiales – prime à la naissance ou à l'adoption et allocation de base de la prestation d'accueil du jeune enfant, complément familial – sont majorés d'environ 40 % en cas d'isolement.
De même, l'allocation journalière de présence parentale versée en cas de maladie ou d'accident grave de l'enfant est majorée pour les personnes isolées.
Telles sont, monsieur le sénateur, les précisions que je suis en mesure de vous apporter pour répondre à vos différentes interrogations.
M. le président. La parole est à M. Georges Mouly.
M. Georges Mouly. Madame la secrétaire d'État, j'avais bien noté que le Président de la République avait pris des engagements, et que ceux-ci avaient été tenus. Certes, nous pouvons toujours les juger insuffisants, et c'est ce que je me suis permis d'avancer.
Cela dit, je vous remercie, ainsi que M. Xavier Bertrand, des précisions que vous m'avez apportées sur les revenus pris en compte ou non, et sur les veuves ou veufs qui ont en charge des enfants en bas âge.
Je ferai parvenir aux interlocuteurs directement intéressés la réponse qui m'a été faite. Bien des éléments leur sont certainement connus, mais peut-être pas tous.
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