Mme Muguette Dini interpelle Mme la secrétaire d'État chargée de la solidarité sur deux revendications essentielles pour les parents d'enfants handicapés.
La première se situe dans l'actualité sociale puisque relative aux pensions de retraite et pensions de réversion. Les assurés ayant eu ou élevé au moins trois enfants bénéficient d'une majoration de 10% desdites pensions. Les parents d'enfants handicapés demandent, dans leur cas, l'abaissement de ce plancher afin que la charge financière qui est la leur, soit prise en compte.
La seconde revendication de ces parents a trait au régime fiscal du contrat d'assurance dit « rente survie », souscrit par nombre de parents d'enfants handicapés. Ce contrat garantit, après le décès du parent cotisant, le versement d'une rente viagère ou d'un capital au profit de son enfant handicapé. Toutefois, ces assurés trouvent, notamment, « injuste et même scandaleux » que les arrérages de la rente versés aux bénéficiaires handicapés soient soumis, totalement ou partiellement, à la CSG, à la CRDS et à l'impôt sur le revenu.
Elle souhaite donc qu'elle lui fasse part de sa position sur ces sujets et lui fasse savoir quelle suite elle entend donner à ces revendications.
Mme Muguette Dini. Madame la secrétaire d'État, je souhaite soulever deux questions essentielles pour les parents d'enfants handicapés.
Pour ce faire, je me permettrai de citer le cas concret, que m'a présenté par courrier, une habitante d'Écully, commune du Rhône que je connais bien pour y avoir été adjointe au maire.
Cette Éculloise est maman de deux enfants, dont l'aîné, âgé de trente-huit ans, est lourdement handicapé. À la retraite et veuve depuis deux ans, elle ne perçoit pas de pension de réversion, sa pension de retraite personnelle dépassant, malheureusement de fort peu, le plafond de ressources fixé. Surtout, elle ne bénéficie pas de la bonification de 10 % pour enfants prévue au titre de l'article R. 353-2 du code de la sécurité sociale, car cet avantage n'est accordé qu'à partir de trois enfants.
Lors de l'examen de la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites, le rapporteur à l'Assemblée nationale, M. Bernard Accoyer, avait proposé deux mesures en direction des parents d'enfants handicapés : d'une part, une majoration de durée d'assurance à raison d'un trimestre par période de trente mois d'éducation, soit jusqu'à huit trimestres supplémentaires ; d'autre part, un abaissement du nombre d'enfants à partir duquel les deux parents ont droit à une majoration de 10 % de leur pension de retraite. Ces deux propositions avaient été déclarées irrecevables au regard de l'article 40 de la Constitution.
Toutefois, le Gouvernement a décidé de reprendre à son compte la mesure relative à la majoration de la durée d'assurance. En revanche, il n'a pas retenu celle qui concerne la bonification de 10 %.
Ces trimestres de majoration de durée d'assurance constituent sans aucun doute une disposition avantageuse pour ces parents, parce qu'elle leur permet de quitter plus tôt la vie active, en diminuant donc le nombre de trimestres qu'ils doivent valider pour une carrière complète. Mais la bonification de 10 % de la pension de retraite aurait été bienvenue, car elle représenterait un salaire différé, ce qui n'est pas négligeable quand on assume seule, comme cette Éculloise, la prise en charge de son enfant handicapé.
Madame la secrétaire d'État, pensez-vous possible de revenir sur cette disposition qui n'a pas été retenue en 2003 ?
Par ailleurs, nombreux sont les parents d'enfants handicapés qui, comme l'avait fait cette habitante d'Écully du vivant de son époux, souscrivent un contrat de rente-survie, lequel garantit, après le décès du parent cotisant, le versement d'une rente viagère ou d'un capital au profit de son enfant handicapé.
Toutefois, ces assurés estiment – je reprends ici les termes de la correspondance reçue – « injuste et même scandaleux » que les arrérages de la rente versés aux bénéficiaires handicapés soient soumis, totalement ou partiellement, à la contribution sociale généralisée, à la contribution pour le remboursement de la dette sociale et à l'impôt sur le revenu.
« Tous nos efforts et nos sacrifices destinés à protéger notre fils et à ne pas le laisser à la charge entière de la société, sont mal considérés et mal reconnus », regrette cette personne dans ce même courrier.
Il convient de noter que la modification du régime fiscal du contrat de rente-survie est, depuis plusieurs années, une attente forte de l'Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales et de leurs amis, l'UNAPEI.
Là encore, madame la secrétaire d'État, quelle suite envisagez-vous de donner à cette demande ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Nadine Morano, secrétaire d'État chargée de la famille. Madame le sénateur, vous avez appelé l'attention de Valérie Létard, secrétaire d'État chargée de la solidarité, sur la situation financière des parents d'enfants handicapés.
Comme vous l'avez indiqué, les parents qui ont eu ou élevé au moins trois enfants bénéficient d'une majoration de pension de retraite de 10 %. Or, les parents d'un enfant handicapé souhaiteraient bénéficier d'un abaissement de ce plancher afin que la charge financière qui est la leur soit prise en compte.
Bien conscients des difficultés financières auxquelles sont confrontés les parents d'enfants handicapés, ainsi que de la difficulté pour eux d'exercer à temps plein une activité professionnelle, le Gouvernement et le législateur ont voulu mieux prendre en compte leur situation.
Ainsi, la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites a considérablement amélioré les droits à la retraite des parents d'enfants handicapés. Ces derniers bénéficient d'une durée d'assurance – nombre de trimestres cotisés – majorée d'un trimestre par période d'éducation de trente mois, dans la limite de huit trimestres par enfant.
À cette mesure peut également s'ajouter une majoration de durée d'assurance de douze trimestres au maximum par enfant liée au congé parental d'éducation, prévue par l'article L. 351-5 du code de la sécurité sociale.
Enfin, cette mesure est cumulable avec la majoration de durée d'assurance de huit trimestres au maximum par enfant dont disposent les femmes ayant élevé des enfants, en application de l'article L. 351-4 du code de la sécurité sociale.
Au total, la « bonification » des droits à retraite peut atteindre 21 trimestres. Cette mesure n'est pas négligeable, puisque la durée légale de cotisation d'un salarié ou d'un fonctionnaire pour une retraite à taux plein, sans abattement, est de 160 trimestres, soit 40 annuités.
Par ailleurs, vous avez également évoqué, madame le sénateur, les contrats de rente-survie, qui peuvent être souscrits par des parents d'enfants handicapés.
Croyez bien que le Gouvernement partage tout à fait le souci des parents qui cherchent à protéger le mieux possible leurs enfants handicapés après leur décès.
Comme vous l'avez souligné, la rente viagère versée à la personne handicapée est effectivement assujettie à la CSG sur les revenus du patrimoine, à la CRDS et au prélèvement social de 2 %.
Toutefois, seule est imposable une fraction du montant de cette rente, qui est décroissante en fonction de l'âge du bénéficiaire lors de l'entrée en jouissance de la rente.
Par ailleurs, ces types de contrats d'assurance dénommés « contrats d'épargne handicap » ou « rente-survie » ne sont pas totalement soumis à l'impôt, puisqu'ils donnent droit à une réduction d'impôt à hauteur de 25 % du montant des primes versées, dans la limite d'un plafond de versements.
De surcroît, durant toute la période de constitution du capital, les produits capitalisés sur ces contrats sont exonérés d'impôt sur le revenu et de l'ensemble des prélèvements sociaux.
Au total, la mise en œuvre de l'ensemble de ces dispositions aboutit à une exonération partielle ou à une réduction d'impôts des contrats évoqués. Il est vrai que ces dispositions, pourtant très avantageuses, méritaient d'être présentées globalement, et nous vous remercions, madame le sénateur, d'avoir donné l'occasion au Gouvernement de le faire, afin de montrer qu'il partage le souci, bien légitime, de prendre en compte la totalité des effets financiers liés au handicap de l'enfant.
M. le président. La parole est à Mme Muguette Dini.
Mme Muguette Dini. Je formulerai simplement une remarque.
Les parents d'enfants handicapés qui se sentent responsables de leur enfant au-delà de leur propre existence consentent, pour certains, beaucoup d'efforts en vue de constituer une rente-survie. Lorsque le parent survivant d'un enfant handicapé majeur qui réside encore à la maison, comme dans l'exemple que j'ai cité, constate que l'argent qu'il a économisé en sa faveur est encore grevé de certaines charges, on peut comprendre qu'il soit un peu révolté, car la collectivité prendra totalement en charge les enfants pour lesquels les parents n'auront rien fait.
Ce serait reconnaître les privations que tous ces parents – et ils sont très nombreux – se sont imposées que d'exonérer totalement de toute charge les contrats de rente-survie.
(M. Claude Biwer applaudit.)
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