Mme Marie-France Beaufils attire l'attention de Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur les difficultés d'indemnisation rencontrées par les sinistrés de la sécheresse 2003. Elle lui rappelle ses engagements lors de la séance du 5 décembre 2007 qui lui ont été rappelés lors de la discussion de la loi de finances 2009. Elle souhaite également que la proposition de loi « visant à améliorer la transparence et l'équité du régime d'assurance des catastrophes naturelles » débattue au Sénat le 16 juin 2005 et déposée à l'Assemblée nationale, le 4 juillet 2007 puisse enfin venir en discussion dans cette assemblée. Elle lui demande ce qu'elle compte mettre en œuvre pour répondre précisément au sinistrés oubliés de 2003 et pour pérenniser le système d'indemnisation à travers le vote de la loi.
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, auteur de la question n° 364, transmise à Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.
Mme Marie-France Beaufils. Cette question, que j'avais communiquée au départ à Mme la ministre de l'intérieur, a été transmise à Mme la ministre de l'économie. Peut-être m'en expliquerez-vous les raisons, madame la secrétaire d'État ?
Cinq longues années se sont écoulées depuis l'été 2003, plus longues encore pour tous ceux qui ont eu à subir la catastrophe naturelle due aux mouvements de terrain. De nombreuses habitations situées en zone argileuse ont été profondément affectées. Elles le restent aujourd'hui, malheureusement. Des milliers de familles souffrent encore de vivre dans des maisons lézardées.
Les dégâts ont été estimés à 1,5 milliard d'euros et la procédure exceptionnelle mise en place par le Gouvernement n'a répondu à cette situation qu'à hauteur de 218,5 millions d'euros. Le compte n'y est pas, c'est l'évidence.
Les habitants touchés par cette catastrophe ne comprennent pas plus les silences que les promesses.
Le 5 décembre 2007, Mme Alliot-Marie déclarait ici même : « Par ailleurs, je viens d'obtenir l'accord de Bercy pour répondre au problème posé. [...] Ainsi, dans un délai assez court, sera résolu un problème qui se posait depuis longtemps. »
Depuis cette déclaration, rien n'a été fait. Seul un rapport, qui semble confidentiel, a été commis. Il s'agit de celui de Mme Boutin, dont je n'ai jamais été destinataire, comme nombre de mes collègues qui l'ont rappelé au sein même du Sénat. Ce qui est certain, c'est que pas un euro de plus n'a été obtenu pour les sinistrés.
Au cours de la dernière période, un certain nombre d'amendements ont été déposés dans le cadre des projets de loi de finances pour 2008 et 2009 afin d'augmenter l'indemnisation des sinistrés de la sécheresse. Nous les avons soutenus.
Le 27 novembre dernier, M. Bussereau s'engageait en ces termes : « Il n'était prévu aucune dotation supplémentaire dans le projet de loi de finances pour 2009, mais je comprends votre demande, et je m'engage à la relayer auprès de Mme la ministre de l'intérieur. »
Le 18 décembre, M. Marini, rapporteur général du budget, reconnaissait que « des demandes d'indemnisation portant sur des sommes tout à fait substantielles demeuraient en suspens ».
Madame la secrétaire d'État, pouvez-vous apporter à tous ces sinistrés non indemnisés à ce jour une note d'espoir pour qu'une solution digne leur soit enfin apportée ? C'est ce qu'ils attendent. Ils ne comprendraient pas une réponse négative alors qu'ils se mobilisent pour que soient reconnus leurs droits. C'était le premier élément de ma question.
En outre, madame la secrétaire d'État, le 16 juin 2005 a été débattue au Sénat une proposition de loi « visant à améliorer la transparence et l'équité du régime d'assurance des catastrophes naturelles ». Pour le moment, nous n'avons, pas de nouvelles de ce texte qui, s'il était encore amélioré, pourrait permettre une meilleure prise en charge des situations des sinistrés.
Un effort doit, me semble-t-il, être fait pour que la prévention soit privilégiée en prenant en compte les conditions géologiques locales. Je vous demande donc, madame la secrétaire d'État, de susciter dans chaque département concerné par les phénomènes de retrait-gonflement des terrains argileux la mise en place de plans de prévention des risques naturels, qui pourraient être appelés PPRN « tassements différentiels », afin de limiter les conséquences désastreuses liées à des constructions non respectueuses des règles.
Je dois le dire, je suis inquiète en raison des menaces qui pèsent sur les futures conditions d'indemnisation des sinistres liés aux mouvements de terrain. Les rapports d'inspection remis en septembre 2005 par l'inspection générale des finances, le conseil général des Ponts et Chaussées, l'inspection générale de l'environnement et de l'inspection générale de l'administration, prévoient d'exclure la sécheresse du régime des catastrophes naturelles et de renvoyer la définition des conditions de prise en charge de ce risque au marché, ce qui figurait, semble-t-il, dans les hypothèses possibles du rapport de Mme Boutin.
Une autre préconisation maintiendrait la sécheresse dans le champ du régime avec, toutefois, certains aménagements reprenant en fait la procédure exceptionnelle mise en place dans le projet de loi de finances pour 2006, qui n'indemnise au mieux que les dommages les plus lourds.
J'ai donc quelques raisons de vous demander, madame la secrétaire d'État, si la proposition de loi débattue au Sénat en 2005 et non encore inscrite, à ma connaissance, à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale finira par l'être. En outre, pouvez-vous nous informer sur les projets évoqués dans les différents rapports qui remettraient en cause la procédure actuelle de déclaration de catastrophe naturelle et les modalités d'indemnisation s'y rapportant ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État chargée du commerce extérieur. Madame la sénatrice, vous avez appelé l'attention du Gouvernement sur le phénomène exceptionnel de sécheresse qu'a connu le territoire métropolitain en 2003 et qui a été à l'origine de nombreux dégâts aux bâtiments dans plusieurs milliers de communes.
Dans un premier temps, le Gouvernement a procédé à une adaptation des critères utilisés par la commission interministérielle pour l'évaluation de cet aléa afin de tenir compte du caractère très atypique de la sécheresse de 2003. L'assouplissement des critères habituels a finalement permis la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle pour plus de 4 300 communes.
Au titre de la solidarité nationale et pour apporter une réponse aux sollicitations des communes non reconnues en l'état de catastrophe naturelle, le Gouvernement a mis en œuvre une procédure exceptionnelle d'indemnisation. Une enveloppe initiale de 118 millions d'euros a été prévue à ce titre par l'article 110 de la loi de finances pour 2006, puis portée à 218,5 millions d'euros par la loi de finances rectificative pour 2006.
Au total, ce sont finalement plus de 80 % des communes ayant demandé une reconnaissance au titre des catastrophes naturelles pour la sécheresse survenue en 2003 qui ont pu bénéficier d'une indemnisation soit au titre du régime des catastrophes naturelles, soit au titre de la procédure exceptionnelle.
Compte tenu des moyens déployés dans le cadre de cette procédure exceptionnelle, qui visait, selon les termes de la loi votée par le Parlement, les dommages lourds affectant la résidence principale rendue impropre à sa destination, le Gouvernement n'envisage pas de dispositif additionnel à cette procédure.
Comme Mme la ministre de l'intérieur s'y était engagée devant votre assemblée en 2007, le rapport relatif à l'indemnisation des dommages aux bâtiments causés par la sécheresse survenue durant l'été 2003, établi en application de l'article 68 de la loi du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable, a été transmis par le Secrétariat général du Gouvernement le 25 janvier 2008 aux assemblées parlementaires.
Vous interpellez enfin le Gouvernement sur l'évolution du régime d'indemnisation des catastrophes naturelles et souhaitez savoir si ce sujet sera débattu prochainement à l'Assemblée nationale. Des travaux sont actuellement en cours entre les différents départements ministériels concernés, sur la base des consultations menées en 2006 et à partir du rapport inter-inspections qui, à la suite de la sécheresse de 2003, a fourni une évaluation de ce régime et en a proposé certaines pistes d'évolution.
Les propositions qui pourraient être soumises au Parlement au cours de l'année 2009 auraient une portée plus large que la proposition de loi déposée à l'Assemblée nationale en juillet 2007 et viseraient l'ensemble des risques naturels couverts par le régime.
L'objectif de la réforme envisagée consiste à améliorer la transparence de la procédure de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle et à encourager les comportements de prévention tout en maintenant un haut niveau de protection des assurés dans le cadre de la solidarité nationale.
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Madame la secrétaire d'État, j'ai bien entendu votre réponse. J'espère que le rapport que vous évoquez nous sera communiqué. En effet, je n'ai pas eu connaissance qu'il ait été à notre disposition. Et, malgré mes efforts d'investigation, je n'ai pas réussi à obtenir d'éléments d'information.
En outre, je suis préoccupée par le fait que, dans les différents départements et communes reconnus en l'état de catastrophe naturelle, des personnes sinistrées ne sont toujours pas indemnisées. Certaines communes attendent encore que les tribunaux traitent leurs recours. Notre collègue qui fut rapporteur du texte pourrait le confirmer. Il me semble qu'on ne peut pas dire que le sujet est clos en termes d'indemnisation.
Enfin, je vous ai entendue annoncer une proposition du Gouvernement qui irait au-delà du contenu du texte débattu ici au Sénat. Je suis très sensible à la nécessité de débattre sur la prévention. Actuellement, on continue à construire sur des sols argileux sans prendre de dispositions efficaces pour éviter que des gens ne se retrouvent à terme dans des situations aussi catastrophiques que celle que l'on a connue en 2003.
Je considère qu'il y a urgence de débattre de cette question, tant sous l'angle de la transparence des règles mises en œuvre pour reconnaître les communes en l'état de catastrophe naturelle sur ces questions que sous l'angle de la prévention.
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