Photo de Jean-Luc Mélenchon

Jean-Luc Mélenchon
Question d'actualité au gouvernement N° 282 au Ministère de l'intérieur


Organisation du sommet de l'OTAN

Question soumise le 3 avril 2009

La parole est à M. Jean-Luc Mélenchon.

M. Jean-Luc Mélenchon. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Il est temps, trois jours avant le somment de l'OTAN, de rappeler aux militaires américains et aux responsables de la sécurité du Président des États-Unis que Strasbourg n'est pas Bagdad !

Les mesures inouïes de contrôle de la population qu'ils ont imposées, selon leurs détestables habitudes en la matière, sont insupportables ! Vous avez eu la faiblesse de les accepter.

Comment le Gouvernement peut-il justifier le blocus de la ville de Strasbourg qui s'organise ? Comment justifiez-vous la démesure des atteintes à la liberté de circuler imposées à ses habitants ?

Jugez-en, mes chers collègues : la totalité des écoles primaires fermées vendredi ; douze lycées et onze collèges fermés vendredi et samedi ; l'université fermée depuis une semaine pour empêcher les rassemblements d'étudiants ; une quinzaine d'avenues, boulevards, places et rues vidées de leurs véhicules et de toute circulation ; des déviations mises en place sur six autoroutes de transit régional et international ; des dizaines de milliers d'habitants de Strasbourg devant présenter un laissez-passer pour circuler à pied dans les zones dites « orange » et « rouge » ; des fouilles pratiquées dès à présent à la gare de l'Est

Pire encore, depuis la semaine dernière, on assiste à des atteintes inadmissibles à la liberté d'expression. Notre seul réconfort est qu'elles couvrent leurs auteurs de ridicule !

Approuvez-vous l'irruption illégale de policiers aux domiciles de personnes qui avaient pavoisé leurs fenêtres de drapeaux pour la paix ? Acceptez-vous la demande, non moins illégale, de retrait de ces drapeaux ?

Cautionnez-vous la systématisation des contrôles d'identité, qui confinent au harcèlement, exercés sur toutes les personnes arborant des signes pacifistes ou d'opposition à l'OTAN ?

Sachez que, nous, parlementaires, depuis nos travées, nous encourageons à porter ces insignes, et que nous appelons nos concitoyens à pavoiser pour la paix, n'en déplaise aux Américains !

À Strasbourg, la liberté de manifester est mise en cause par le refus réitéré de la préfecture d'autoriser un parcours décent pour la manifestation anti-OTAN.

M. Alain Gournac. La question !

M. Jean-Luc Mélenchon. Est-ce croyable ?

La préfecture voulait carrément diriger cette manifestation vers l'Allemagne ! Faut-il donc passer la frontière pour trouver la liberté de manifester ?

Plusieurs sénateurs de l'UMP. La question !

M. Jean-Luc Mélenchon. Notre groupe, comme vous le savez, a exprimé à maintes reprises son opposition à l'OTAN.

M. Alain Gournac. La question !

M. Jean-Luc Mélenchon. Oui, nous sommes opposés au retour de la France dans le commandement intégré qui entraîne notre pays dans une dérive belliciste dont l'envoi de 150 gendarmes en Afghanistan est une nouvelle manifestation.
(La question ! sur les travées de l'UMP.)

Chers collègues, ma question arrive (Ah ! sur les mêmes travées), si vous voulez bien vous taire le temps que je la pose !

Après cet alignement, M. le Premier ministre va-t-il rééquilibrer la position de son gouvernement lors du sommet entre l'Union européenne et les États-Unis qui se tiendra le dimanche 5 avril à Prague ?

Ou bien va-t-il soutenir le projet de « grand marché transatlantique de la concurrence libre et non faussée sans entraves » que l'Union européenne prépare avec les États-Unis dans le dos des citoyens ?

Avec l'alignement de la France sur l'OTAN, l'enterrement de toute défense européenne indépendante par le traité de Lisbonne et la dilution de l'Europe dans un grand marché transatlantique, que restera-t-il de la souveraineté du peuple qui fonde la République et commande sans partage à ses armes ?
(Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG. – M. Jean Desessard applaudit également.)

Réponse émise le 3 avril 2009

La parole est à Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Monsieur le Mélenchon, dans le méli-mélo de vos questions, je ne retiendrai que ce qui a trait à la sécurité du sommet de l'OTAN.

Tout sommet de l'OTAN présente des risques sécuritaires sérieux. Pour avoir moi-même participé à de nombreux sommets en tant que ministre de la défense, j'ai assisté à des violences inouïes ! Il suffit d'ailleurs de constater ce qui s'est passé hier à Londres pour mesurer la détermination de certains à user de la violence !
(Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

M. Alain Gournac. Exactement !

M. René-Pierre Signé. Il n'y a pas eu de mort dans la police !

M. Didier Boulaud. Les morts sont du côté des manifestants !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. En tant que ministre de l'intérieur, je suis chargée de veiller à la protection à la fois des Strasbourgeois, des délégations internationales qui viennent dans notre pays et des manifestants eux-mêmes.

M. René-Pierre Signé. Ils sont provoqués !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Je suis en effet responsable de la protection des personnes, des biens et des libertés publiques !

Je dois protéger chacun contre le risque terroriste majeur qu'entraîne la forte couverture médiatique de cet événement, mais aussi contre un certain nombre d'extrémistes qui ont déjà manifesté, notamment par la voie d'internet, …

M. Alain Gournac. Ils viennent casser !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. … leur volonté de désobéissance civile, leur refus absolu de respecter un certain nombre de règles, leur souhait de provoquer la violence, voire de l'exercer eux-mêmes.

C'est là une réalité ! Pour y faire face, j'ai mis en place, de mon propre chef, sans aucune demande de qui que ce soit,…

M. Jean-Luc Mélenchon. Ce n'est pas vrai !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. … un dispositif destiné à protéger les personnes.

M. Michel Billout. Mettre un drapeau à la fenêtre, est-ce un acte terroriste ?

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Les drapeaux menacent qui ?

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Il s'agit d'un dispositif mesuré : 9 000 policiers et gendarmes y participent, contre 15 000 policiers en Allemagne, où très peu de manifestations sont attendues à l'occasion du sommet de l'OTAN, et 20 000 à Londres pour seulement 4 000 manifestants.

Je vous rappelle que nous attendons de 45 000 à 50 000 manifestants samedi, venant de tous les États européens, dont 20 000 à 25 000, d'Allemagne.

Prendre de telles mesures relève de mon devoir.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Pour des drapeaux aux fenêtres ?

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. J'ai bien conscience que cela crée un certain nombre de contraintes, en particulier pour les habitants de Strasbourg, mais leur protection est notre première préoccupation.

Par ailleurs, je note que toutes les fermetures que vous avez mentionnées, monsieur le sénateur, ont eu lieu avec le total accord et même le soutien du maire de Strasbourg qui, en l'espèce, n'appartient pas à la majorité !

Quant à l'université, si elle est fermée depuis plus de huit jours, c'est parce qu'elle était occupée, notamment par des éléments étrangers, lesquels ont été évacués à la demande du président de l'université en raison des dégradations qu'il avaient commises.
(Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. Alain Gournac. Très bien !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Il est essentiel d'assurer un équilibre entre la sécurité et la liberté.

M. René-Pierre Signé. C'est facile à dire !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. En ce qui concerne le problème des banderoles, je reconnais bien volontiers qu'il y a eu, effectivement, un excès de zèle : légalement, il est possible de retirer les banderoles injurieuses, ce qui n'était pas le cas en l'espèce.

M. Michel Billout et Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ah, quand même !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. C'est la raison pour laquelle j'ai donné des instructions très fermes à la police pour que cela ne se reproduise pas.

M. René-Pierre Signé. Avec un peu en retard !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Il n'empêche que, si des personnes, avec le soutien de certains élus, ce que je ne peux que regretter, veulent venir flanquer la pagaille…

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Manifester, ce n'est pas mettre la pagaille !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. … et représenter une menace pour l'ensemble de nos concitoyens, je ne le permettrai pas !
(Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées de l'UMP, ainsi que sur plusieurs travées de l'Union centriste.)

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