M. Roland Courteau rappelle à M. le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville sa question orale du 17 novembre 2008, par laquelle, il lui indiquait que la loi n° 2006-399 du 4 avril 2006 renforçant la prévention et la répression des violences au sein du couple ou commises contre les mineurs, précise dans son article 13, que « le Gouvernement dépose tous les deux ans, sur le bureau des assemblées parlementaires, un rapport sur la politique nationale de lutte contre les violences au sein du couple… ».
Il lui précise que dans sa réponse, au cours de cette même séance du 17 novembre 2008, il lui a été indiqué que « cet engagement sera respecté » et que « ce rapport sera déposé, d'ici à la fin de l'année 2008… ». Or, il lui fait remarquer, qu'à sa connaissance, cet engagement n'a pas été tenu. Il lui demande donc de bien vouloir lui en faire connaître les raisons et lui indiquer sous quels délais les deux assemblées parlementaires pourront disposer de ces informations.
La parole est à M. Roland Courteau, auteur de la question n° 404, adressée à M. le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville.
M. Roland Courteau. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, je souhaite attirer l'attention du Gouvernement sur certaines dispositions de la loi du 4 avril 2006 renforçant la prévention et la répression des violences au sein du couple ou commises contre les mineurs.
Je le rappelle, au mois de novembre 2004, j'avais pris l'initiative de déposer, avec le soutien du groupe socialiste, notamment de Mme Michèle André, une proposition de loi visant à lutter contre un tel fléau. Après son examen par le Parlement, ce texte est devenu la loi que je viens de mentionner.
La loi du 4 avril 2006 comporte de nombreuses dispositions en matière de prévention et d'éloignement de l'auteur des violences ou de prise en charge sanitaire et sociale des auteurs de violences. Elle complète également l'article 212 du code civil en y incluant la notion de « respect » et fixe l'âge légal du mariage à dix-huit ans pour les filles. En outre, elle introduit le principe de l'aggravation de la peine et l'extension de la circonstance aggravante aux anciens conjoints, concubins, partenaires pacsés, ainsi que plusieurs mesures visant à lutter contre les mariages forcés.
Par ailleurs, et c'est le principal objet de cette question orale, l'article 13 de cette loi dispose ceci : « Le Gouvernement dépose, tous les deux ans, sur le bureau des assemblées parlementaires, un rapport sur la politique nationale de lutte contre les violences au sein des couples, portant notamment sur les conditions d'accueil, de soin et d'hébergement des victimes, leur réinsertion sociale, les modalités de la prise en charge sanitaire, sociale ou psychologique des auteurs des faits […]. »
Le rapport aurait dû être déposé depuis le 4 avril 2008. Au mois de novembre 2008, j'avais interrogé M. le ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité sur le sujet. Il m'avait été répondu que l'engagement serait tenu et que le rapport serait déposé « d'ici à la fin de l'année 2008 ».
Cet article 13, inséré dans la proposition de loi à la suite de l'adoption d'un amendement que j'avais déposé en première lecture, est très important. Il s'agit de permettre au Gouvernement et au Parlement de disposer d'informations précises sur la politique nationale de lutte contre ce type de violences.
Faut-il le rappeler, les violences subies par les femmes au sein du couple augmentent plus vite que l'ensemble des violences faites aux personnes ?
Certes, si j'en juge par les observations des associations, des progrès ont été accomplis depuis l'adoption de la loi du 4 avril 2008. Surtout, et il convient de le noter, les victimes osent de plus en plus déclarer les violences qu'elles subissent, ce qui était moins vrai avant l'adoption de ce texte législatif et les campagnes de sensibilisation que vous avez-vous-même mises en œuvre, madame la secrétaire d'État. En effet, à cette époque, un grand nombre de victimes renonçaient à déposer plainte par manque d'information ou de sensibilisation.
Cela m'amène à répéter qu'il faut encore et encore renforcer les campagnes générales de sensibilisation.
Je me réjouis d'ailleurs que le Premier ministre m'ait fait savoir par courrier – j'imagine que vous n'y êtes pas étrangère, madame la secrétaire d'État – sa décision d'attribuer le label « campagne d'intérêt général » à la lutte contre les violences faites aux femmes pour l'année 2009. Cela, m'a-t-il également été précisé, pourrait permettre d'ouvrir ensuite la voie à la reconnaissance de cette lutte comme « grande cause nationale » pour 2010.
Mais, aux termes de l'article 13, le Parlement doit pouvoir prendre connaissance des conditions d'accueil et de réinsertion sociale des victimes et, ce qui est tout aussi important, des modalités de prise en charge sanitaire, sociale ou psychologique des auteurs des violences, autant d'indications dont les parlementaires souhaitent pouvoir disposer régulièrement.
Madame la secrétaire d'État, quel bilan peut-on dresser de l'application de ce dispositif législatif en matière de réinsertion sociale des victimes, mais aussi de prise en charge sanitaire et psychologique des auteurs de violence ? Sachez que nous n'entendons pas relâcher notre vigilance face à un tel fléau, trop longtemps sous-estimé ou relégué au rang de simple dispute de ménage.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Valérie Létard, secrétaire d'État chargée de la solidarité. Monsieur le sénateur, vous avez appelé l'attention du Gouvernement sur la mise en œuvre de l'article 13 de la loi du 4 avril 2006 renforçant la prévention et la répression des violences au sein du couple ou commises contre les mineurs.
Comme vous l'avez rappelé, cet article prévoit que le Gouvernement dépose un rapport relatif à « la politique nationale de lutte contre les violences au sein du couple » tous les deux ans sur les bureaux des assemblées. Je souhaite d'abord vous rassurer : ce rapport est désormais transmis au Parlement.
M. Roland Courteau. Bonne nouvelle !
Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Certes, c'est très récent, mais c'est fait !
(Sourires.)
J'aurai d'ailleurs l'occasion de revenir sur le contenu de ce document le 19 mars prochain à l'occasion d'une question orale avec débat portant sur cette thématique.
Un tel rapport est important. C'est le premier du genre, en application de la loi du 4 avril 2006, à laquelle vous avez largement contribué. Cela constitue un tournant dans un domaine où il est difficile de mesurer l'efficacité de l'action publique. Il nous a paru important, au risque d'un dépôt retardé, d'y intégrer des mesures qui ont été mises en œuvre très récemment, mais qui sont, nous le savons, importantes et attendues
D'abord, le Gouvernement souhaitait disposer du rapport d'évaluation du premier plan global 2005-2007 de lutte contre les violences faites aux femmes, que j'avais demandé aux inspections générales des affaires sociales, des services judiciaires et de l'administration de réaliser, avec le concours de la police nationale. Ce rapport a été rendu à l'automne.
En outre, certaines mesures phares du plan de lutte contre les violences faites aux femmes ont été mises en œuvre à la fin de l'année 2008 et au début de l'année 2009. Je pense notamment à la mise en place des référents départementaux ou au recrutement des familles d'accueil. Il paraissait essentiel de pouvoir inclure le démarrage de ces réalisations ou expérimentations dans un rapport portant sur l'action du Gouvernement en matière de lutte contre les violences.
M. Roland Courteau. En effet !
Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Par ailleurs, vous savez combien la question difficile du cadre juridique reconnaissant les violences psychologiques est importante.
M. Roland Courteau. Très bien !
Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Sur cette question, nous faisons des progrès importants. Il nous a également paru indispensable d'intégrer au bilan de ces deux années une avancée très attendue : les résultats du travail mené en partenariat avec le ministère de la justice pour progresser très concrètement dans la définition des violences psychologiques.
M. Roland Courteau. Très bien !
Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Enfin, et comme vous le savez, nous avons accompagné la constitution d'un collectif d'associations.
Comme l'avait suggéré M. le Premier ministre dans son discours du 25 novembre dernier, à l'occasion de la journée internationale de lutte contre les violences faites aux gemmes, ces associations bénéficieront – vous l'avez d'ailleurs rappelé, monsieur le sénateur –, du label « campagne d'intérêt général 2009 contre les violences faites aux femmes ». Ce label a été attribué le 7 mars dernier, en lien avec les associations impliquées dans cette cause. Nous ne pouvons que nous réjouir de cette décision.
Cette initiative témoigne, s'il en était besoin, de l'engagement du Gouvernement sur ces questions essentielles. Par conséquent, et à partir d'un document que nous avons voulu le plus complet possible, nous évoquerons de nouveau ce sujet le 19 mars prochain à l'occasion de la question orale avec débat posée par Michèle André.
Pour conclure, je voulais vous dire combien le Gouvernement est sensibilisé et mobilisé sur la question de l'information, que vous avez évoquée. Comment peut-on entrer dans les foyers, comment peut-on entrer dans les familles pour encourager les femmes à briser le silence ?
Nous continuerons à mener de telles campagnes de communication et de sensibilisation, notamment sur des points particuliers, comme les violences coutumières, le mariage forcé ou les excisions. Il y aura également des campagnes télévisées. Ainsi, un spot sur les violences conjugales sera lancé au milieu de l'année. En outre, dans le cadre de la préparation de la « grande cause nationale », nous allons réfléchir, avec l'ensemble des têtes de réseau, à des campagnes de communication qui pourront également avoir lieu au cours de l'année 2010.
Notre volonté est véritablement de travailler sur un projet global, de mobiliser tous les ministères, en liaison avec les associations. Nous en sommes convaincus, sur un tel sujet, il faut continuer la mobilisation au quotidien et remettre régulièrement l'ouvrage sur le métier pour parvenir à sensibiliser vraiment la population.
En tout cas, je vous remercie de votre engagement, monsieur le sénateur.
M. le président. La parole est à M. Roland Courteau.
M. Roland Courteau. Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de cette réponse particulièrement précise. Nous nous retrouverons vraisemblablement ici même jeudi prochain pour évoquer de nouveau cette question.
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