M. Alain Fauconnier attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur la situation de l'enseignement agricole public dans le département de l'Aveyron où, la réforme du bac professionnel et l'application de la réforme générale des politiques publiques imposent de regrettables fermetures de classes aux trois établissements du département, le LEGTA de Laroque-Rodez, le LEGTA de Beauregard-Villefranche de Rouergue et le LEPA de La Cazotte-Saint-Affrique. Ces fermetures de classes ayant pour conséquence de déstabiliser ces établissements et de poser la question de la survie de certains d'entre eux, il lui demande de bien vouloir reconsidérer ces fermetures de classes ou d'accepter les mesures de compensation proposées par les personnels de ces établissements et les professionnels du premier département moutonnier de France, avec ses produits phares, tel que le roquefort, le laguiole et le veau de l'Aveyron.
La parole est à M. Alain Fauconnier, auteur de la question n° 433, adressée à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.
M. Alain Fauconnier. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, comme d'autres, et sans doute plus que d'autres, le département de l'Aveyron est, par nature, une terre d'excellence agricole et agroalimentaire, premier département moutonnier de France de surcroît, avec ses produits phares que sont, vous le savez, le roquefort, le veau de l'Aveyron et le laguiole, pour ne citer que les plus connus. Monsieur le secrétaire d'État, puisque vous aurez l'occasion de venir, dans quelques jours, dans notre département, vous aurez probablement l'occasion de vous rendre compte par vous-même de la qualité de ces produits !
Préciser toutes ces caractéristiques, c'est souligner, d'entrée, toute la place qu'occupent, dans le paysage économique de l'Aveyron, les trois établissements d'enseignement agricole public que compte le département : les deux lycées d'enseignement général et technologique agricoles, ou LEGTA, que sont les établissements La-Roque à Rodez et Beauregard à Villefranche-de-Rouergue, ainsi que le lycée d'enseignement professionnel agricole, ou LEPA, La-Cazotte à Saint-Affrique.
Ces établissements ont, depuis quelques années, reçu des aides considérables de la région Midi-Pyrénées afin de préparer l'avenir de la profession agricole. À titre d'exemple, je rappellerai que, pour le seul établissement de Saint-Affrique, la région a investi 25 millions d'euros en quinze ans
Or la réforme du bac professionnel et la révision générale des politiques publiques menacent aujourd'hui gravement l'avenir de l'enseignement agricole. Par voie de conséquence et de manière mécanique, de nombreuses classes fermeront, compromettant ainsi la survie de ces trois établissements et provoquant un grand émoi non seulement chez les enseignants, les élèves, les parents d'élèves, mais aussi chez tous les acteurs de la filière agricole.
Je rappelle au passage que la transformation du cycle de préparation au bac professionnel, dont la durée sera réduite de quatre à trois années dès la rentrée prochaine, entraînera une dégradation des conditions de vie des élèves, avec une diminution progressive des cours de 2 % en moyenne par an jusqu'en 2012. Elle aura pour regrettable conséquence l'exclusion d'un certain nombre de lycéens, lesquels, dans ces conditions, ne pourront en effet suivre le cursus convenablement. Ils quitteront donc cet enseignement pour intégrer la voie de l'apprentissage ou, pire encore, interrompront là leur scolarité.
À l'établissement La-Roque de Rodez, qui a perdu 39 élèves à la rentrée scolaire 2008-2009, dont 30 sur les filières de niveau IV, c'est la fermeture de la classe préparatoire au BTS agroalimentaire, option « Viande », qui est ainsi prévue. Cette annonce a d'ailleurs tout récemment provoqué une forte mobilisation.
Au lycée Beauregard de Villefranche-de-Rouergue, lequel a perdu 16 élèves à la rentrée 2008-2009, c'est la classe de quatrième qui est menacée par un projet de fermeture.
Des inquiétudes se font également jour à l'établissement La-Cazotte de Saint-Affrique, qui a perdu 10 élèves à la rentrée 2008-2009.
Monsieur le secrétaire d'État, tels sont les trois volets relatifs à la situation actuelle de ces établissements, laquelle ne manque donc pas de nous préoccuper.
Ma question sera donc triple.
Qu'en est-il de la préservation des filières, en particulier celles de l'élevage ovin et de l'agriculture biologique ?
Quels sont les aménagements pédagogiques prévus pour accompagner la réduction de quatre à trois années du cycle de préparation au bac professionnel ?
Plus généralement, dans le contexte de bouleversements des politiques agricoles nationales en prévision de l'après-2013, quelles mesures comptez-vous prendre pour que l'enseignement agricole puisse continuer à jouer le rôle fondamental qui est le sien depuis trente ans ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Hubert Falco, secrétaire d'État chargé de l'aménagement du territoire. Monsieur Fauconnier, vous l'avez rappelé, je me rendrai effectivement jeudi prochain dans votre beau département, et ce avec grand plaisir tant l'authenticité y est une valeur encore largement cultivée. Je serai à vos côtés pour analyser les atouts et les faiblesses de ce monde rural qui nous est cher.
Pour en venir à votre question, je vous prie de bien vouloir excuser l'absence de Michel Barnier, qui, retenu à Bruxelles, ne peut malheureusement pas être présent au Sénat ce matin. Il m'a donc demandé de vous apporter les éléments de réponse suivants.
L'enseignement agricole est un enseignement spécifique, implanté au cœur des territoires ruraux, et d'une très grande qualité. Ses résultats en termes de diplômes, d'insertion sociale et professionnelle sont reconnus et souvent cités en exemple de ce qu'il faudrait faire pour que les jeunes réussissent mieux.
Cet enseignement, essentiel pour la conduite des politiques placées sous la responsabilité du ministère de l'agriculture et de la pêche, doit évoluer en réaffirmant sa mission et ses priorités.
Il se doit de contribuer à la compétitivité économique et au développement de notre agriculture. Les formations aux métiers de la production agricole et agroalimentaire sont donc prioritaires.
Il lui faut favoriser l'insertion culturelle, sociale et professionnelle au service des territoires ruraux, au travers, notamment, des classes d'enseignement général.
Il lui incombe de participer au développement du monde rural, sur l'ensemble du territoire national.
Monsieur le sénateur, la rénovation de la voie professionnelle, engagée pour une mise en application à la rentrée prochaine, vise à porter plus de jeunes au niveau du baccalauréat et à promouvoir la voie professionnelle, tout en garantissant une formation de qualité et une insertion performante. Actuellement, seuls 60 % à 65 % des jeunes qui intègrent en première année une classe de brevet d'études professionnelles agricoles, ou BEPA, obtiennent un diplôme de niveau IV en quatre ans.
Cette rénovation vise à faire de la voie professionnelle une filière d'excellence, dans laquelle le plus grand nombre pourra se révéler. Ainsi, l'une des finalités est de faciliter l'accès aux études supérieures, notamment aux BTS, tout en permettant aux jeunes qui rencontrent des difficultés dans l'acquisition des savoirs scolaires de combler leurs lacunes.
Toutefois, la maîtrise des dépenses publiques, rendue plus que jamais nécessaire dans le contexte économique difficile que traverse actuellement le monde entier, impose à tous les secteurs de l'administration des efforts particuliers, notamment en matière d'emploi public. Comme les autres, l'enseignement agricole doit y contribuer.
Dans ce cadre, et après consultation des partenaires locaux, le directeur régional de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt de Midi-Pyrénées, agissant en tant qu'autorité académique, a formulé les propositions suivantes.
Le lycée professionnel agricole La-Cazotte de Saint-Affrique offre uniquement des formations professionnelles. Il dispose ainsi des trois cycles préparant au baccalauréat professionnel spécialités « Conduite et gestion de l'exploitation agricole » et « Systèmes à dominante élevage », et d'un cycle conduisant au brevet d'études professionnelles agricoles « Activités hippiques » suivi de la filière préparatoire au baccalauréat professionnel spécialité « Élevage et valorisation du cheval ». Il est proposé de maintenir les quatre classes de BEPA à la rentrée prochaine.
Au lycée d'enseignement général et technologique agricole de Villefranche-de-Rouergue, force est de constater que deux classes fonctionnent avec des effectifs inférieurs au seuil requis dans la filière actuelle préparant au baccalauréat professionnel spécialité « Systèmes à dominante élevage ». À l'entrée de la filière, à la rentrée 2008, le recrutement a chuté de plus de 63 %. La question de sa viabilité est aujourd'hui posée. Cependant, il est proposé, d'un côté, de maintenir la classe à faible effectif à la rentrée 2009, pour répondre à l'attente territoriale, et, de l'autre, de fermer une classe de quatrième.
Quant à la formation conduisant au brevet de technicien supérieur agricole « Industries agroalimentaires » pour la spécialité « Industries des viandes » assurée au LEGTA La-Roque de Rodez, elle est maintenue, malgré un fléchissement dans son recrutement à la rentrée 2008.
Monsieur le sénateur, comme vous pouvez donc le constater, en dépit d'un contexte budgétaire contraint, tout est mis en œuvre pour permettre de maintenir et de conforter, au niveau des territoires, l'enseignement agricole, qui demeure une priorité.
M. le président. La parole est à M. Alain Fauconnier.
M. Alain Fauconnier. Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse. Les nouvelles sont bonnes puisque les fermetures de classes prévues sont reportées, voire annulées. J'en prends acte avec grande satisfaction, et de telles annonces ne manqueront pas de réjouir à la fois les familles et l'ensemble de la filière agricole du département.
Cela étant, je continue, avec beaucoup d'autres, de m'interroger sur l'opportunité de réduire à trois années la durée du cycle de préparation au bac professionnel. Avec le système actuel, un certain nombre d'élèves se voient offrir la possibilité de préparer ce baccalauréat avec une année supplémentaire, en « transitant » pendant deux ans par la voie du BEP. Dans l'enseignement agricole, qui n'est pas comparable avec l'éducation nationale, cette formule a rencontré un véritable succès. Certes, les effectifs concernés sont réduits, mais, chacun le sait, au vu de la situation de l'agriculture aujourd'hui, les établissements d'enseignement agricoles n'accueillent pas beaucoup d'élèves.
Il serait vraiment souhaitable, notamment pour l'enseignement agricole, de conserver des classes « passerelles » ou « d'adaptation ». Grâce à ce système, un certain nombre de jeunes, qui rencontreraient inéluctablement des difficultés s'ils devaient intégrer directement une classe de seconde, peuvent en effet obtenir leur baccalauréat professionnel en quatre ans.
Monsieur le secrétaire d'État, je vous demande donc de bien vouloir transmettre à M. Barnier cette demande ô combien importante à mes yeux.
M. Hubert Falco, secrétaire d'État. Bien sûr !
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.