M. Adrien Gouteyron attire l'attention de Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales au sujet de la mise en place du statut de l'élu local.
À l'occasion de la révision de la Constitution adoptée par le Congrès le 21 juillet 2008, la place du statut de l'élu local est consacrée dans les institutions de la République, grâce à un amendement auquel il s'était associé.
C'est dans cet esprit qu'a été introduite à l'article 34 de la Constitution la disposition qui prévoit que la loi fixe les règles concernant « les conditions d'exercice des mandats électoraux et des fonctions électives des membres des assemblées délibérantes des collectivités territoriales ».
Une loi devra donc mettre en application ce nouvel article constitutionnel. Elle devra préciser les conditions matérielles, la responsabilité des élus devant les risques juridiques, la couverture sociale, l'accompagnement de l'élu qui se retire pour retrouver son emploi professionnel… Elle aura également à donner une réponse à la question délicate du cumul entre fonction exécutive locale et responsabilité nationale
(parlementaire ou membre du Gouvernement).
Il souhaiterait savoir où en est la préparation de cette loi et connaître les prochaines étapes qui permettront enfin de faire entrer notre pays dans le club des démocraties modernes, qui accordent à leurs élus locaux la reconnaissance qu'ils méritent.
M. Adrien Gouteyron. Je tiens tout d'abord à dire à M. Alain Marleix, secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales, que je suis très heureux que ce soit lui qui réponde à la question que je vais poser.
Je rappelle que, lors du débat qui a eu lieu ici même sur la réforme constitutionnelle, notre ancien collègue M. Puech avait proposé un amendement que j'avais défendu et aux termes duquel la loi devait fixer « les conditions d'exercice des mandats électoraux et des fonctions électives des membres des assemblées délibérantes des collectivités territoriales ». C'est devenu l'un des éléments de l'article 34 de notre Constitution.
Je rappelle également que, dans sa réponse à l'intervention que j'avais faite alors, Mme Rachida Dati, garde des sceaux, avait déclaré que le Gouvernement était favorable à cet amendement parce qu'il était de nature à affirmer « l'importance accordée au statut des élus locaux ».
Ma question porte sur l'application dudit article 34.
Monsieur le secrétaire d'État, je tiens à souligner, par le biais de cette question orale, le rôle que jouent les élus locaux dans notre pays.
Voilà plus d'une centaine d'années, Charles Péguy parlait des « hussards noirs de la République » à propos des enseignants. Certes, ces derniers sont toujours les « hussards noirs de la République », mais les élus locaux le sont aussi.
Je veux insister sur l'importance des élus locaux dans la société d'aujourd'hui. En effet, dans notre société, très atomisée, nous avons besoin de modérateurs, de gens qui écoutent, que l'on peut rencontrer facilement et qui sont capables de comprendre les situations. Jamais, peut-être, nous n'en avons eu autant besoin. Les maires sont des médiateurs.
Ils sont également des gestionnaires : ils ont à gérer leur budget, leur commune, avec leurs conseillers municipaux.
Les maires sont aussi des aménageurs. Je me permets d'insister un peu sur cette facette de leur rôle, fort de mon expérience d'élu dans le département de la Haute-Loire, dont vous êtes également un représentant, monsieur Jean Boyer. Nous constatons que, sans le maillage d'élus locaux existant, notre territoire ne serait pas, pour une bonne part, ce qu'il est, et ne serait pas forcément accessible, même aux touristes.
Le rôle des élus locaux – dans notre département comme ailleurs – est tout à fait essentiel en matière d'aménagement.
Enfin, les maires sont des bâtisseurs d'avenir. En effet, ils ne réfléchissent pas uniquement à ce que sera leur commune demain, ils pensent loin, ils songent à ceux qui y vivront quand eux ne seront plus là.
Monsieur le secrétaire d'État, les élus locaux ont parfois le sentiment que l'État ne pense à eux que lorsqu'il a besoin d'eux. Ils reçoivent maintes circulaires, nombre d'instructions, mais, parfois, ils se sentent un peu seuls, délaissés.
Je crois le moment venu de leur accorder l'importance qu'ils méritent dans notre République. Je reprends l'expression : « les hussards de la République ». Certes, parfois – mais rarement ! – leur poitrine est barrée de tricolore. Cependant, ce sont des obscurs, qui font leur travail sans chercher la renommée, sans être sous les feux des médias.
Il est temps de reconnaître, dans la loi, l'importance de ces élus locaux dans notre pays. La loi doit mettre en forme l'application de la Constitution.
Je souhaiterais savoir, monsieur le secrétaire d'État, où en est le Gouvernement quant à la mise en place du statut de l'élu local, où en est la préparation des textes, car je suppose qu'il y en aura plusieurs.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Alain Marleix, secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales. Monsieur Gouteyron, je constate que la Haute-Loire est très largement représentée ce matin dans cet hémicycle !
Vous m'avez interrogé sur la mise en place du statut de l'élu local, à la suite de la révision constitutionnelle.
Je tiens, tout d'abord, au nom du Gouvernement, à m'associer à l'hommage que vous avez rendu à ces « hussards de la République », pour reprendre une formulation qui fut appliquée, à l'origine, aux enseignants, mais qui sied parfaitement aux élus locaux, lesquels jouent un triple rôle de modérateurs, de gestionnaires et d'aménageurs.
De nombreuses mesures ont été instaurées pour définir les droits, garantir le statut et fixer l'indemnisation des élus locaux ; de plus, avec la réforme du 23 juillet 2008, à laquelle vous avez pris une part importante, monsieur le sénateur, la Constitution consacre désormais ces avancées successives.
Un ensemble de mesures sont d'ores et déjà constitutives d'un véritable statut de l'élu local.
Ainsi, les élus disposent d'un droit spécifique à la formation qui leur permet d'acquérir les compétences nécessaires à l'exercice de leur mandat. Des dispositifs d'autorisations d'absence ou de crédit d'heures leur permettent par ailleurs de concilier leur activité professionnelle et leur mandat local.
Un régime d'assurance maladie et d'assurance vieillesse est également prévu pour les élus locaux, qui sont affiliés, si nécessaire, au régime général de la sécurité sociale.
L'élu local, lorsqu'il cesse d'exercer son mandat, bénéficie aussi de mesures facilitant sa réinsertion professionnelle : priorité de réembauche, bilan de compétences, allocation différentielle de fin de mandat, etc.
Je rappellerai enfin qu'en matière de responsabilité pénale des élus, qui est un vrai problème de plus en plus récurrent, la loi du 10 juillet 2000, dite « loi Fauchon », a elle aussi constitué une avancée tout à fait majeure.
La loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 de modernisation des institutions de la Ve République n'a donc fait que confirmer la nature législative de ce statut de l'élu local. Elle n'implique pas par elle-même que soit forcément préparée une nouvelle loi sur le statut des élus locaux.
Toutefois, dans le cadre de la réforme des collectivités territoriales que prépare le Gouvernement, des dispositions complétant ce statut de l'élu local et qui figuraient dans l'avant-projet de loi de modernisation des collectivités locales que j'avais fait préparer lors de mon arrivée au secrétariat d'État à l'intérieur seront proposées prochainement au Parlement, dans le cadre du projet de loi « MODELOC », sur la modernisation de la démocratie locale. Elles visent notamment à renforcer le droit à la formation des élus locaux et à étendre l'indemnité de fin de mandat à toutes les communes, quelle que soit leur taille.
Vous constatez donc, monsieur le sénateur, que l'État pense à nos élus locaux et en donne cette fois-ci des signes tout à fait concrets.
M. le président. La parole est à M. Adrien Gouteyron.
M. Adrien Gouteyron. Je remercie le secrétaire d'État d'avoir rappelé la situation actuelle et les mesures déjà prises. Cependant, l'honnêteté m'oblige à souligner que, si l'on citait le montant de la retraite des élus, nos compatriotes seraient certainement surpris par la modicité des sommes en jeu. Cela mérite d'être relevé.
Je regarde maintenant l'avenir. J'ai cru un moment, monsieur le secrétaire d'État, qu'il n'allait rien se passer. Je me trompais – et je m'en réjouis ! –, puisque vous avez annoncé que des dispositions seraient incluses dans les textes à venir. Ce point des réformes futures est extrêmement important. C'est ce qui m'a conduit à poser cette question aujourd'hui.
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