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Christian Cambon
Question orale sans débat N° 592 au Secrétariat d'État aux aînés


Compensation des exonérations de taxe foncière sur les propriétés bâties

Question soumise le 25 juin 2009

M. Christian Cambon appelle l'attention de M. le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État sur le dossier très sensible des incidences des ventes en bloc des 32 000 logements du patrimoine Icade sur les finances locales des communes concernées.

Les logements locatifs sociaux bénéficient, au moment de leur construction ou de leur rachat, de différents régimes d'exonération de longue durée de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB), au profit des propriétaires bailleurs. En revanche, elle n'est pas systématiquement compensée par l'État aux collectivités locales qui bénéficient en principe du produit de la TFPB. La loi prévoyait que l'État ne compensait, très partiellement, les exonérations accordées que si celles-ci entraînaient une perte « substantielle » de recettes, soit une perte supérieure à 10 % du produit total de la TFPB perçu par la collectivité concernée. Aujourd'hui, les règles de compensation varient selon le type de logement social, la période de construction ou d'acquisition de celui-ci et selon que l'on se situe dans les quinze premières années de la période d'exonération ou dans les dix dernières. Il en résulte que les exonérations accordées pour les opérations de construction ou d'acquisition de logements sociaux sous financement PLS ne sont pas compensées aux collectivités par l'État sauf si ces exonérations entraînent une perte « substantielle » de recette supérieure à 10 % du produit total de la TFPB perçue par la collectivité concernée. Les exonérations accordées pour les opérations de construction ou acquisition de logements sociaux sous financement PLAI et PLUS sont compensées par l'État mais avec application au titre de 2009 d'un taux de minoration de 17,108 %, taux qui a vocation à évoluer chaque année en fonction des arbitrages de la loi de finances. Enfin, les règles de compensation sont différentes pour les dix dernières années d'exonération. L'État s'est engagé à compenser les exonérations pour toutes les catégories de logements (PLS, PLAI, PLUS) mais toujours avec application d'un taux de minoration fixé à 17,108 % pour 2009.

L'ensemble de ces mesures a naturellement des conséquences directes sur le budget des collectivités locales, et elles prennent une acuité toute particulière dans la période actuelle. La Caisse des dépôts et consignations a construit à travers sa filiale immobilière la SCIC (devenue Icade) un nombre considérable de logements après la guerre dans toute l'Île-de-France. Elle a commencé à se séparer de certains à la fin des années 1990 et au cours des années 2000 avant d'annoncer, par un communiqué du 12 décembre 2008, sa décision de procéder à la vente de l'ensemble de son parc de logement en Île-de-France soit 32 000 logements. Dans le Val-de-Marne, ce sont 5 800 logements qui sont concernés. Dans ce contexte, la politique d'exonération de TFPB vient sérieusement influer sur les équilibres des budgets locaux et ceci sur une longue période. Si les propriétaires bailleurs y trouvent leur compte, tel n'est pas le cas des collectivités locales. En conséquence, il lui demande si l'État envisage des mesures alternatives ou compensatoires pour aider les communes à faire face à des pertes de rentrées fiscales particulièrement lourdes de conséquences.

Réponse émise le 8 juillet 2009

La parole est à M. Christian Cambon, auteur de la question n° 592, adressée à M. le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État.

M. Christian Cambon. Madame la secrétaire d'État, je vous souhaite à mon tour la bienvenue dans cet hémicycle !

Je souhaite appeler votre attention sur le dossier très sensible de la vente en bloc des 32 000 logements du patrimoine de la société Immobilière Caisse des dépôts, ICADE, vente lourde de conséquences pour les finances des communes concernées, soit près d'une quarantaine rien qu'en Île-de-France.

Les logements locatifs sociaux bénéficient, au moment de leur construction ou de leur rachat, de différents régimes d'exonération de longue durée – généralement pendant quinze ans – de la taxe foncière sur les propriétés bâties, la TFPB. Cette exonération est décidée par l'État au profit des propriétaires bailleurs. En revanche, la perte de recettes pour les collectivités locales, qui bénéficient en principe du produit de cette taxe, n'est pas systématiquement compensée par l'État.

Initialement, la loi prévoyait que l'État ne compensait, de manière partielle, les exonérations accordées que si celles-ci entraînaient une perte « substantielle » de recettes, soit une perte supérieure à 10 % du produit total de la TFPB perçu par la collectivité concernée.

Aujourd'hui, les règles de compensation varient selon le type de logement social, la période de construction ou d'acquisition de celui-ci et selon que l'on se situe dans les quinze premières années de la période d'exonération ou les dix dernières : il s'agit donc d'un régime éminemment fluctuant.

La situation des collectivités locales varie excessivement : les exonérations accordées pour les opérations de construction financées par le prêt locatif social, ou PLS, ne sont pas compensées, sous réserve de l'application de la règle des 10 % que je viens d'évoquer ; quant aux opérations de construction ou d'acquisition sous le régime du prêt locatif aidé d'intégration, PLAI, et du prêt locatif à usage social, PLUS, elles sont compensées par l'État, mais avec application d'un taux de minoration de près de 17 %, qui évolue chaque année en fonction des arbitrages de la loi de finances.

Enfin, les règles de compensation sont différentes pour les dix dernières années d'exonération, mais je n'entrerai pas dans ces détails d'une grande complexité. L'ensemble de ces mesures a naturellement des conséquences directes sur le budget des collectivités locales, avec une acuité toute particulière dans la période actuelle.

En effet, pendant longtemps, le parc de logements sociaux, en particulier en Île-de-France, est demeuré relativement stable. Les constructions neuves étaient limitées et le patrimoine existant, datant pour l'essentiel des années 1950-1960, changeait peu de propriétaire.

Ainsi, la Caisse des dépôts et consignations a construit après la guerre, par l'intermédiaire de sa filiale immobilière, la Société centrale immobilière, ou SCIC, devenue ICADE, un nombre considérable de logements dans toute la région d'Île-de-France. Elle a commencé à se séparer de certains de ses logements à la fin des années quatre-vingt-dix et au cours des années deux mille, avant d'annoncer, dans un communiqué du 12 décembre 2008, sa décision de procéder à la vente de l'ensemble de son parc de logements en Île-de-France, soit 32 000 logements. Dans mon département du Val-de-Marne, 5 800 logements sont concernés, soit près de 700 pour la seule commune de Sucy-en-Brie, qui compte 25 000 habitants.

Par ailleurs, il est important de souligner que le patrimoine d'ICADE bénéficie d'un régime dérogatoire de rachat par les bailleurs sociaux : le rachat des logements sociaux appartenant aux sociétés immobilières à participation majoritaire de la CDC se fait sous financement PLS, mais des conditions d'occupation plus sociales que celles qui sont appliquées aux logements PLS « ordinaire » peuvent être prévues.

Autrement dit, même si le niveau de loyer pratiqué par le nouveau bailleur après rachat est de type PLAI ou PLUS, les ventes d'ICADE interviennent toutes dans le cadre d'un financement PLS, qui ne donne pas matière à compensation de l'État.

Ainsi, tout le patrimoine social conventionné d'ICADE actuellement mis en vente, une fois racheté par un bailleur social, bénéficiera pendant vingt-cinq ans d'une exonération de TFPB qui ne sera pas compensée par l'État.

En conséquence, la politique d'exonération de TFPB influera sérieusement sur les équilibres des budgets locaux pour une longue période.

Pour reprendre l'exemple de Sucy-en-Brie, qui permet de bien raisonner, la perte de recettes est estimée, en 2009, à 140 000 euros, alors même que la vente globale du patrimoine d'ICADE n'a pas encore eu lieu. Cette perte résulte de la vente partielle de 148 logements, réalisée en 2008, et à un changement de propriétaire pour 150 autres logements sociaux. Par ailleurs, 700 logements restent à vendre : si tous ces logements sont vendus à un bailleur social, 1 200 logements au total auront disparu des bases de TFPB en l'espace de deux ans.

Ainsi, du jour au lendemain, ou presque, le budget municipal de Sucy-en-Brie pourrait se trouver amputé d'une recette de l'ordre de 500 000 euros par an, ce qui correspond, dans cette ville de 25 000 habitants, à une augmentation des impôts locaux de plus de trois points – excusez du peu !

Or Sucy-en-Brie ne constitue pas un cas isolé dans notre région : trente-six maires d'Île-de-France se sont d'ailleurs mobilisés pour attirer l'attention de l'État sur les conséquences de la cession en cours du patrimoine d'ICADE.

Madame la secrétaire d'État, il est assez paradoxal de constater que l'État affirme sa volonté – qui ne saurait être mise en doute – d'encourager le logement social, alors que, dans le même temps, sa politique de compensation d'exonération de la TFPB peu lisible, souvent fluctuante et pour le moins partielle, n'incite pas les collectivités locales à s'engager dans cette voie, y compris celles qui ne respectent pas le fameux seuil des 20 % instauré par la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite loi SRU.

Ma question est donc très simple : quelles mesures compensatoires l'État envisage-t-il de prendre pour aider les communes à faire face à des pertes de rentrées fiscales particulièrement lourdes de conséquences ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Nora Berra, secrétaire d'État chargée des aînés. Monsieur le sénateur, permettez-moi de renouveler les excuses de M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, pour son absence de ce matin, en raison d'un déplacement en Chine.

La cession du pôle logements de la société ICADE relève, en premier lieu, d'une décision stratégique de l'entreprise et de son conseil d'administration.

Soyons clairs : l'État n'a pas d'intérêt particulier dans ce dossier. Des négociations sont en cours, entre ICADE et un consortium constitué par la Société nationale immobilière, la SNI.

La reprise de la majeure partie de ce parc de logements par les bailleurs sociaux aurait l'avantage de sécuriser du logement social de fait, en le faisant accéder au statut de logement social conventionné.

Elle ne résout par, pour autant, le déficit de l'offre de logements en Île-de-France où les besoins sont considérables. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement accorde la priorité à la construction.

Le Gouvernement est bien conscient de l'incidence que peut avoir l'opération de cession des logements d'ICADE sur l'équilibre des finances locales.

Comme vous l'avez rappelé, en l'état actuel des règles de compensation des exonérations de taxe foncière, la plupart des collectivités concernées seraient pénalisées financièrement, alors qu'elles bénéficient déjà d'un effort de redistribution important dans le cadre de la politique de la ville et qu'elles accueillent de nombreux logements sociaux, à un niveau bien souvent supérieur à celui de 20 % exigé par la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite loi SRU.

Pour vous répondre précisément, et comme Éric Woerth l'a assuré lors d'une réunion avec une délégation d'élus, au début du mois de juin, le Gouvernement est ouvert à une évolution des règles pour aider ces communes à faire face à des pertes de recettes potentiellement importantes.

Naturellement, cette évolution devrait se faire en concertation avec le comité des finances locales, car elle s'inscrirait dans le cadre de l'évolution d'ensemble des concours de l'État aux collectivités locales. Le Gouvernement vous donne donc rendez-vous lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2010.

Mme la présidente. La parole est à M. Christian Cambon.

M. Christian Cambon. Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de ces éléments de réponse. Ils ne sont pas d'une précision totale, mais je reconnais que le problème est particulièrement difficile à régler et qu'il relève, bien évidemment, de la loi de finances.

Je souhaite que les engagements pris par M. le ministre Éric Woerth puissent être tenus dans les meilleurs délais et j'attire votre attention sur le danger qui résulterait du maintien de la situation actuelle. En effet, un certain nombre de communes de mon département, dont la mienne, vont s'opposer à la transformation de logements en logements sociaux, à cause de ces règles et de leurs conséquences fiscales.

Un tel résultat serait contraire à la volonté de l'État, dans notre région qui manque tant de logements sociaux, et aux intérêts des collectivités territoriales.

Je souhaite donc, pour ma part, que des mesures concrètes puissent être prises rapidement, afin de rassurer les maires – et ils sont nombreux ! – qui entendent répondre à leurs obligations dans le domaine du logement social.

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