M. Jean Bizet. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, un très large accord semble se dessiner quant à la nécessité de réformer la gouvernance économique européenne, tirant en cela les leçons de la crise financière.
L'un des points le plus souvent évoqués est le renforcement des sanctions à l'égard des pays ne respectant pas les règles de discipline inscrites dans le pacte de stabilité et de croissance, en particulier la suspension des droits de vote pour les États qui seraient en infraction. Cette éventualité a été envisagée par la Chancelière allemande elle-même.
Cependant, sur quelle base juridique précise une telle mesure pourrait-elle s'appuyer ? En effet, les traités ne prévoient la suspension des droits de vote qu'en cas de violation grave des principes démocratiques ou des droits de l'homme. Dans toute autre hypothèse, une telle sanction ne peut donc pas être appliquée à l'heure actuelle.
Madame la secrétaire d'État, une nouvelle révision des traités sur ce point précis, excluant tout débat sur les missions assignées à la Banque centrale européenne, est-elle envisagée ? L'indispensable unanimité à toute révision peut-elle être espérée ?
Je comprends parfaitement que, face à une crise inédite, l'on évoque les hypothèses les plus diverses, mais je me demande si nous sommes réellement prêts à remettre, une fois de plus, les traités en chantier…
Mme Nicole Bricq. Bonne question !
Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État. Monsieur Bizet, dans le cadre des avancées, dont je parlais tout à l'heure, faites par le Conseil européen, dues notamment aux relations étroites qu'ils entretiennent, le Président de la République et Mme Merkel se sont en effet prononcés en faveur de sanctions, parmi lesquelles la suspension des droits de vote des États membres qui ne respecteraient pas le pacte de stabilité et de croissance.
Comme vous l'avez dit, monsieur le sénateur, en l'état actuel du droit, il semble bien qu'une telle suspension exigerait une révision du traité sur l'Union européenne, dont l'article 7 n'autorise une telle procédure qu'en cas de violation grave des valeurs de l'Union européenne, et chacun se souvient des débats auxquels ce point a donné lieu voilà quelques années…
Le message délivré par le Président de la République lors de son déplacement du 15 juin à Berlin est clair : il faut agir avec pragmatisme.
C'est ainsi qu'il est possible d'envisager dans un premier temps un accord politique des États pour ne pas voter à certaines réunions, en particulier lors de celles qui pourraient concerner la surveillance budgétaire des pays ne respectant pas le pacte.
Dépourvu, certes, de conséquences juridiques, un tel engagement permettrait d'appliquer ce type de sanction politique à droit constant et de manière pragmatique.
Dans l'hypothèse où une révision des traités s'imposerait, la France et l'Allemagne pourraient alors éventuellement la proposer.
Au-delà de ce point particulier, je voudrais à nouveau insister sur le caractère global des réflexions, extrêmement importantes, actuellement menées par le groupe de travail présidé par M. Van Rompuy, dont les conclusions, je le rappelle, seront rendues au mois d'octobre : diverses propositions, y compris, je le suppose, concernant les sanctions, seront sur la table.
M. le président. La parole est à M. Jean Bizet, pour la réplique.
M. Jean Bizet. Madame la secrétaire d'État, je prends note de ces précisions – je vous en remercie –, qui font apparaître qu'il s'agit maintenant de passer par la recherche d'accords entre différents pays membres.
Entre respect des textes et pragmatisme, il faudra bien que l'on revoie un jour les traités sous l'angle de la rigueur, mais je partage tout à fait l'approche du Président de la République, qui conduit à passer plutôt, dans un premier temps, par un accord.
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