M. Nicolas About. Je tiens tout d'abord à remercier M. le Premier ministre des informations qu'il vient de nous communiquer à propos du drame d'Haïti et de l'intervention de la France. Nous ne doutons pas que notre pays fera face à ses obligations de secours immédiats et participera à l'effort de reconstruction, conformément aux vœux du Président de la République et du Premier ministre.
Ma question s'adresse à Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports.
Madame la ministre, après l'affaire du sang contaminé, la canicule et l'inscription, peut être à tort, du principe de précaution dans notre Constitution, quelle peut bien être la marge d'action des pouvoirs publics en matière de risque sanitaire ? Soit ils n'agissent pas et sont comptables de toute réalisation du risque, soit ils prennent la menace au sérieux et s'exposent à l'écueil inverse : se voir reprocher d'avoir « sur-réagi ».
C'est ce dernier cas de figure qui, aux dires de certains, vient de se produire avec la grippe A.
Un très important dispositif a été mis en place contre la pandémie, qui a touché trois millions de personnes et causé 269 décès en France.
Or le virus s'est révélé beaucoup moins virulent qu'on n'avait pu le craindre et la campagne de vaccination n'a pas rencontré le succès escompté. Les décisions prises se sont donc trouvées invalidées par les faits.
Nous ne vous blâmons pas d'avoir pris ces décisions, madame la ministre.
M. Alain Gournac. Non !
M. David Assouline. Si !
M. Nicolas About. Nous demandons seulement de la transparence.
La représentation nationale souhaite savoir par quel cheminement ces décisions ont été prises. En particulier, quel rôle ont joué l'OMS et les commissions d'experts ?
Nous aimerions également que la situation actuelle nous soit clairement exposée : nous savons que, sur les 94 millions de doses de vaccin qui ont été commandées et produites par les laboratoires, 88 millions sont toujours inutilisées. Des millions de doses d'antiviraux et un milliard de masques de protection ont aussi été achetés.
Enfin, à notre sens, la gestion des ressources humaines n'a pas été idéale. Pourquoi, en ce domaine, les outils prévus n'ont-ils pas été mis en œuvre ?
Combien, au total, cette opération va-t-elle coûter ?
Quels sont, et où en sont les accords avec les laboratoires ?
Les relations avec les professionnels de santé n'ont-elles pas souffert de cette crise ?
En bref, madame la ministre, quelles leçons tirez-vous de cette expérience ?
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et de l'UMP.)
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je veux à mon tour exprimer mon émotion devant le drame épouvantable que vit le peuple haïtien. Sous l'égide du Premier ministre et du ministre des affaires étrangères, le ministère de la santé s'impliquera évidemment totalement, comme il a commencé de le faire, pour apporter les secours sanitaires dont ce pays a tellement besoin.
Monsieur le président About, vous avez demandé de la transparence, et vous avez entièrement raison. C'est la démarche que j'ai toujours suivie depuis le début de cette crise, m'exprimant longuement et à plusieurs reprises devant les assemblées afin de répondre à toutes les questions posées par les parlementaires et d'expliquer précisément les décisions prises par le Gouvernement.
Comme d'autres pays, nous avons décidé de mener une large campagne de vaccination. En effet, cette grippe avait une typologie différente de celle des autres grippes et nous devions offrir à tous nos concitoyens qui le souhaitaient la possibilité de se faire vacciner.
Cette stratégie choisie par le Gouvernement s'explique par une raison technique, mais aussi par une raison éthique. Nous nous sommes référés à l'avis n° 106 du Comité consultatif national d'éthique, selon lequel, au nom du principe de l'égalité républicaine, dans le cadre d'une pandémie grippale, tous nos concitoyens qui le souhaitent doivent pouvoir être vaccinés.
Sur le plan technique, les autorités sanitaires nationales et internationales nous ont indiqué qu'il s'agissait d'une vaccination à deux doses mais que, à l'évidence, certaines personnes n'allaient recevoir qu'une seule dose. En tenant compte, là encore comme d'autres pays, d'un taux d'attrition de 25 %, nous avons donc acheté 94 millions de doses.
Le 20 novembre 2009, les autorités sanitaires internationales et européennes nous ont fait savoir que l'immunité pouvait être raisonnablement obtenue avec une seule dose. J'ai donc pris la décision de résilier l'acquisition 50 millions de doses.
M. René-Pierre Signé. Il n'y a pas de clause de résiliation !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Sur les 44 millions de doses restantes, 5,5 millions ont déjà été utilisées et 10 millions ont été offertes à l'OMS. Compte tenu du taux de perte inéluctable, il nous reste donc environ 25 millions de doses.
(M. René-Pierre Signé s'exclame.)
La campagne de vaccination ne fait que commencer ! Elle a débuté voilà deux mois et va se prolonger jusqu'en septembre. Le risque pandémique est toujours là, et nos compatriotes doivent se faire vacciner, car c'est la meilleure technique de prévention.
(Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)
M. René-Pierre Signé. Vous saviez pourtant comment les choses s'étaient passées à la Réunion !
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