M. Marcel Rainaud interroge M. le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur le devenir de la compagnie de Castelnaudary, dans le département de l'Aude, dont le caractère de plein exercice est appelé à disparaître du fait du transfert de son commandement et de sa brigade de recherche à Carcassonne, chef lieu du département.
Si la proximité de la métropole toulousaine confère à ce territoire, une force économique, sociale et culturelle, elle génère des phénomènes de délinquance qui, malgré le professionnalisme des gendarmes, ont tendance à s'accroître nettement, et qui sont éloignés de la problématique spécifique que rencontre la compagnie de gendarmerie de Carcassonne dans son propre environnement économique et social. De plus, ce territoire devrait accueillir à l'horizon 2020, 20 000 habitants supplémentaires ainsi que des zones d'activités importantes à court terme.
Éloigner l'organe de décision et de commandement des unités de ce territoire ne ferait qu'altérer ses capacités d'analyse de la délinquance locale, sa connaissance du terrain et des populations. Cette démarche ne tendrait pas améliorer les capacités opérationnelles, mais bien au contraire à en réduire l'efficacité par un diagnostic établi à distance et sans concertation avec les élus locaux.
Seule, une compagnie de gendarmerie de plein exercice avec, à sa tête, un véritable groupe de commandement tel qu'il existe aujourd'hui et qui a fait ses preuves, paraît capable de bâtir une réponse adaptée et efficace à la nature de la délinquance propre au territoire, c'est ce que les élus souhaitent conserver aujourd'hui et qui ne parait nullement constituer une demande démesurée.
Il en va de même pour la brigade de recherche. Cette unité est, à ce jour, présente dans toutes les compagnies de gendarmerie. En prise directe avec son environnement, la brigade de recherche est un rouage opérationnel incontournable ; l'éloigner du territoire appauvrirait la connaissance des phénomènes de délinquance qui s'y produisent, réduisant son efficacité et, bien pire, sa capacité d'anticipation.
De plus, remplacer une unité à six par trois militaires en renfort dans une unité éloignée ne pourra jamais garantir la même efficacité surtout si l'on considère que le territoire de Carcassonne produit assez de délinquance à lui seul pour probablement occuper la brigade de recherche de Carcassonne, même renforcée. La crainte, quasi certaine, est de voir la brigade de recherche de Carcassonne travailler uniquement en périphérie de cette agglomération et de ne plus avoir d'unité à même de traiter les faits les plus importants sur notre territoire.
Il lui demande de préciser la façon dont la disparition programmée de la compagnie de Castelnaudary de sa fonction de plein exercice est de nature à renforcer la capacité opérationnelle du groupement de gendarmerie de l'Aude.
M. Marcel Rainaud. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, les élus audois ont accueilli avec une profonde surprise le projet de réorganisation territoriale du groupement de gendarmerie de l'Aude et, plus particulièrement, la partie relative à la compagnie de Castelnaudary, dont le caractère de plein exercice est appelé à disparaître, du fait du transfert de son commandement et de sa brigade de recherches à Carcassonne, chef-lieu du département.
La raison invoquée pour justifier cette proposition est la recherche d'une meilleure capacité opérationnelle. Cet argument est pour le moins surprenant, car les communes relevant du ressort territorial de cette compagnie sont situées, dans leur très grande majorité, de part et d'autre d'axes de circulations très fréquentés, à proximité de la métropole toulousaine. Si ces communes tirent une réelle force économique, sociale et culturelle de ce positionnement géographique, celui-ci est à l'origine de phénomènes de délinquance qui, malgré le grand professionnalisme des gendarmes, ont tendance à s'accroître et sont éloignés de la problématique que rencontre la compagnie de gendarmerie de Carcassonne, dont l'environnement économique et social est différent.
De plus, le territoire du Lauragais audois, particulièrement dynamique, devrait accueillir des zones d'activité importantes dans un avenir très proche, ainsi que 20 000 habitants supplémentaires à l'horizon de 2020.
Ces perspectives sont connues de tous, puisqu'elles font l'objet de l'élaboration du schéma de cohérence territoriale du Lauragais, et se situent dans le cadre d'une réflexion plus large, portant sur l'inter-SCOT toulousain.
Ainsi, éloigner l'organe de décision et de commandement des unités d'un territoire en plein développement ne ferait qu'altérer ses capacités d'analyse de la délinquance, sa connaissance du terrain et des populations. Cette démarche ne tendra pas à améliorer la politique de sécurité mise en œuvre au niveau de cet échelon de commandement. Bien au contraire, elle en réduira l'efficacité, parce qu'elle conduira à effectuer un diagnostic à distance et sans concertation avec les élus locaux. En effet, les communes relevant de la compagnie de Carcassonne doivent faire face à une délinquance aux caractéristiques différentes.
Dans ces conditions, placer les brigades de la compagnie de Castelnaudary sous le commandement de celle de Carcassonne entraînera une perte d'efficacité et éloignera inéluctablement les services de l'État des objectifs de sécurité publique que votre Gouvernement a affichés.
Pour ce qui concerne la brigade de recherches, force est de constater que cette unité est présente dans toutes les compagnies de gendarmerie. En prise directe avec son environnement, elle est un rouage opérationnel incontournable. Par conséquent, éloigner ce service du territoire appauvrira la connaissance qu'il peut acquérir des phénomènes de délinquance qui s'y produisent et réduira son efficacité ainsi que sa capacité d'anticipation.
De plus, remplacer une unité de six personnes par trois militaires affectés en renfort dans une unité éloignée ne saurait aucunement garantir une efficacité similaire. La délinquance constatée sur le territoire de Carcassonne, à elle seule, mobilise entièrement la brigade de recherches de cette ville, même renforcée.
Nous craignons donc de voir cette brigade de recherches travailler uniquement en périphérie du chef-lieu du département et de ne plus disposer d'une unité à même de traiter les faits les plus importants constatés dans le Lauragais. Je suis convaincu, madame la ministre, que telle n'est pas votre conception du service public de sécurité.
Ni les élus ni la population ne saisissent de quelle façon la disparition programmée de la compagnie de Castelnaudary, dans sa fonction de plein exercice, serait de nature à renforcer la capacité opérationnelle du groupement de gendarmerie de l'Aude !
Seule une compagnie de gendarmerie de plein exercice ayant à sa tête un véritable groupe de commandement – il existe aujourd'hui et il a fait ses preuves ! – paraît capable de garantir une réponse adaptée et efficace à la nature de la délinquance propre à ce territoire, au plus proche des attentes de nos concitoyens.
C'est ce que les élus, les Audoises et les Audois souhaitent conserver aujourd'hui, et il ne s'agit pas là d'une demande démesurée.
Je vous remercie donc, madame la ministre, de bien vouloir préciser la position que le Gouvernement entend adopter sur ce dossier.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer. Monsieur le sénateur, vous interrogez le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur le devenir de la compagnie de gendarmerie départementale de Castelnaudary, dans le département de l'Aude.
Assurer la sécurité de tous nos concitoyens sur l'ensemble du territoire national constitue naturellement une préoccupation majeure pour le ministre de l'intérieur. Il ne doit y avoir aucune population négligée ni aucun territoire oublié. Ainsi, le maillage territorial des forces de sécurité intérieure, qui répond parfaitement aux attentes des Français en termes de proximité et de contact, ne sera pas remis en cause. Le principe même de son existence est donc réaffirmé.
Toutefois, la situation n'est pas figée ; elle ne l'a jamais été. En effet, les ajustements ponctuels du maillage sont indispensables et permettent d'adapter le dispositif opérationnel aux évolutions observées, à savoir notamment la répartition de la population, les formes de la délinquance, les bassins de vie et flux de circulation.
S'agissant du département de l'Aude, et plus particulièrement de l'arrondissement de Carcassonne, des réflexions sont effectivement en cours. Elles visent à améliorer l'efficience des structures de la gendarmerie en rationalisant les fonctions support et l'architecture du commandement, sans dégrader la qualité du service public de sécurité assuré au profit de nos concitoyens.
Cette adaptation continue du dispositif opérationnel aux contingences locales a démontré toute sa pertinence et participé à la baisse de la délinquance. Ainsi, entre 2002 et 2009, les atteintes aux biens et les cambriolages constatés par les unités du groupement de gendarmerie départementale de l'Aude ont reculé respectivement de 7,6 % et 8,9 %.
En tout état de cause, monsieur le sénateur, soyez assuré que le niveau de sécurité assuré par la présence des gendarmes sur ce territoire sera maintenu. Aucune décision ne sera en outre arrêtée sans qu'une concertation préalable soit menée, avec les élus concernés, sous l'égide de Mme le préfet de l'Aude.
M. le président. La parole est à M. Marcel Rainaud.
M. Marcel Rainaud. Madame la ministre, votre réponse est bien entendu loin de nous satisfaire et d'apporter les garanties nécessaires aux élus et à la population de l'ouest Audois.
Cette réorganisation semble une nouvelle fois avoir pour seul objectif la réalisation d'économies de fonctionnement à court terme. À travers elle, nous voyons bien se dessiner les contours de ce qui nous attend : le transfert au commissariat de police de Castelnaudary de l'ensemble de la circonscription aujourd'hui couverte par la compagnie de gendarmerie.
Une telle solution, si elle peut apparaître comme un renforcement du pôle urbain de ce bassin de vie, va, là encore, démunir les territoires ruraux.
C'est votre conception de l'aménagement du territoire ; elle est à l'opposé de la mienne, à l'opposé aussi des besoins de celles et ceux qui vivent au quotidien le retrait des services publics des zones rurales !
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