Mme Bernadette Bourzai appelle l'attention de M. le secrétaire d'État chargé des transports, sur la très vive émotion suscitée par l'éventuelle suppression de trois jours par semaine de la liaison TGV entre Brive et Lille.
Cette nouvelle relation entre Brive et Lille instaurée en 2008 entre la SNCF et les régions Centre et Limousin a démontré toute sa pertinence en terme d'aménagement du territoire en complémentarité des relations Téoz. Cependant, la SNCF ne veut plus financer cette relation, alors que la fréquentation n'a cessé de croître, et met la pression sur les régions Limousin et Centre pour payer la note. Ces dernières risquent de réduire l'offre et de ne proposer la prestation TGV que le week-end à partir du 12 décembre 2010. Cette situation, si elle se confirme, l'amène à se poser la question d'une réelle volonté politique à vouloir améliorer le désenclavement de la région Limousin. A ce propos, elle souligne que les travaux de modernisation de la ligne dite POLT, Paris-Orléans-Vierzon-Limoges-Toulouse, qui a une double utilité incontestable dans l'aménagement du territoire, d'une part, et dans la limitation des gaz à effet de serre, d'autre part, avancent lentement et que des inquiétudes existent quant à la réalisation du barreau LGV Poitiers-Limoges.
Ces deux exemples, couplés à l'éventuelle suppression de trois jours par semaine de la liaison TGV Brive-Lille, obèrent toute possibilité de désenclavement ferroviaire de la région Limousin et de mise en valeur de ses territoires ruraux. Dénonçant l'abandon programmé du ferroviaire, tant fret que voyageurs, qui détériore l'aménagement du territoire, elle le prie de bien vouloir lui préciser les initiatives qu'il compte prendre pour que la SNCF maintienne une liaison TGV quotidienne entre Brive et Lille.
Mme Bernadette Bourzai. Monsieur le secrétaire d'État, ma question concerne la liaison TGV entre Brive et Lille, dont l'annonce de la limitation à quatre jours par semaine avait suscité une vive émotion parmi les collectivités territoriales de la Corrèze et du Limousin, ainsi que parmi les syndicats et les usagers.
Cette question est pleinement d'actualité puisque, depuis cette semaine, la suppression de cette liaison trois jours par semaine est effective. Le conseil municipal de La Souterraine vient d'adopter à l'unanimité un vœu demandant « le maintien quotidien de cette relation dans la continuité de ce qui été mis en place depuis trois ans ». Le conseil régional du Limousin et le conseil général de la Corrèze débattront de cette question lors de leurs prochaines sessions plénières, à la fin de la semaine. Votre réponse est par conséquent particulièrement attendue, monsieur le secrétaire d'État.
Cette relation entre Brive et Lille a été instaurée il y a trois ans par la SNCF et les régions Centre et Limousin afin de participer au désenclavement de celles-ci. Ce format a démontré toute sa pertinence, puisqu'il a trouvé son public. La fréquentation est même plus importante que celle qui était envisagée. Cependant, la SNCF, affirmant être en déficit d'exploitation, ne veut plus financer cette relation sept jours par semaine. Elle prévoit toutefois une exception pour la période estivale. Enfin, la SNCF reporte la charge sur les régions, comptant sur elles pour « payer la note ». Cela n'est pas admissible étant donné qu'il s'agit d'une liaison nationale.
Monsieur le secrétaire d'État, les régions Limousin et Centre ont l'impression d'avoir été victimes d'un tour de passe-passe. En effet, cette liaison TGV a été substituée à une liaison Téoz. Or, sous cet ancien format, la liaison aurait pu prétendre au classement dans la catégorie « trains d'équilibre du territoire », au titre de laquelle l'État soutient contractuellement des lignes interrégionales déficitaires. On a donc remplacé une liaison qui aurait pu prétendre à une aide de l'État par une liaison TGV, maintenant réduite…
Cette situation est grave. Elle pose la question de l'existence d'une réelle volonté politique d'améliorer le désenclavement des régions Limousin et Centre, ainsi que de la part que l'État veut y prendre.
Devant ce qui apparaît comme un abandon programmé du ferroviaire et comme une détérioration de l'aménagement du territoire, pouvez-vous me détromper et préciser quelles initiatives le Gouvernement compte prendre pour que la SNCF maintienne une liaison TGV quotidienne entre Brive et Lille ?
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé du logement. Madame la sénatrice, vous évoquez dans votre question plusieurs liaisons ferroviaires.
Sur la ligne Paris-Orléans-Limoges-Toulouse, ou POLT, près de 250 millions d'euros ont d'ores et déjà été investis pour moderniser l'axe structurant du réseau ferré national que constitue cette ligne.
En ce qui concerne la branche Poitiers-Limoges de la ligne à grande vitesse Sud Europe Atlantique, elle figure dans le programme de 2 000 kilomètres de lignes nouvelles à lancer d'ici à 2020, défini en 2009 par la loi de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l'environnement. Les études de définition du projet sont actuellement en cours afin de permettre à l'enquête publique de se tenir à la mi-2013. D'ores et déjà, une proposition de tracé de la nouvelle infrastructure a été élaborée et fera l'objet d'une décision ministérielle au début de 2011.
Enfin, l'offre TGV expérimentale Lille-Brive a été lancée à la fin de l'année 2007 afin d'évaluer la pertinence de liaisons directes longue distance entre les régions Centre et Limousin, d'une part, et les pôles de Marne-La-Vallée, de Roissy et de Lille, d'autre part, en complément de l'offre Paris-Limoges-Toulouse.
À l'issue de ces trois années, la pertinence d'une telle offre quotidienne n'a pas été démontrée. Le taux d'occupation moyen du train est inférieur à 50 % sur le tronçon le plus chargé. Environ un tiers des clients voyagent du Centre et du Limousin vers le Nord. Cette moyenne recouvre une forte disparité entre la très faible fréquentation de ces trains en semaine, du mardi au jeudi, et la fréquentation plus importante en période de week-end, du vendredi au lundi.
Outre cette demande très faible, se pose la question de l'équilibre économique de cette relation, dans un contexte de forte hausse des charges d'exploitation entre 2008 et 2010.
À l'issue de la première année, le déficit était deux fois supérieur à ce qui avait été prévu. La SNCF a financé à elle seule 70 % de ce déficit. Il était donc nécessaire de poser la question du rapport entre le coût de cette expérimentation et le bénéfice pour les voyageurs.
Les régions Centre et Limousin et la SNCF ont donc décidé de proposer, depuis le 12 décembre dernier, un aller-retour quatre jours par semaine, et non plus seulement les samedis et dimanches. Cette nouvelle offre répond à la fois à l'attente principale de la clientèle et au souci de bonne gestion.
Le TGV Brive-Lille circulera les lundis, vendredis, samedis et dimanches en dehors de la période estivale, et tous les jours en été. En sens inverse, le TGV Lille-Brive circulera les jeudis, vendredis, samedis et dimanches en dehors de la période estivale, et tous les jours en été.
La SNCF continue de promouvoir cette destination et accompagne la nouvelle offre avec, dès la période de Noël, 3 300 places disponibles au tarif « Prem's » pour les clients du TGV Brive-Lille, soit près de cinq fois plus que l'année dernière.
Voilà, madame la sénatrice, les éléments de réponse que M. Mariani souhaitait vous fournir.
Mme la présidente. La parole est à Mme Bernadette Bourzai.
Mme Bernadette Bourzai. Je vous remercie de cette réponse, monsieur le secrétaire d'État, notamment concernant la ligne Paris-Orléans-Limoges-Toulouse et la liaison TGV Poitiers-Limoges.
S'agissant de la ligne POLT, une convention avait été mise en place entre la SNCF, l'État et les régions concernées dès 2000. Dix ans plus tard, cette ligne n'est toujours pas véritablement opérationnelle pour désenclaver le territoire. C'est vraiment dommage.
S'agissant de la liaison TGV Brive-Lille, je ne dispose pas des mêmes informations que vous. Peut-être les vôtres sont-elles plus précises que les miennes, mais il m'a été indiqué que la fréquentation de la ligne était supérieure à ce qui avait été envisagé au moment de la mise en place, expérimentale il est vrai, de ce TGV.
On peut certes s'interroger lorsqu'il existe des déficits très importants. Cela étant, le Président de la République Jacques Chirac, qui a été longtemps député de la Haute-Corrèze, disait à juste titre qu'il fallait réaliser une autoroute de désenclavement du territoire entre Clermont-Ferrand et Bordeaux. On peut se féliciter de ce que ce projet ait été mené à bien. Si la pertinence de la réalisation de cette liaison autoroutière avait été mesurée à l'aune de la fréquentation probable, cet équipement n'aurait jamais vu le jour.
Je pense par conséquent qu'il conviendrait de considérer que le désenclavement et l'aménagement du territoire, y compris dans les régions les plus difficiles, telles que les zones de montagne, s'imposent, quel qu'en soit le coût.
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