M. Yannick Bodin. Monsieur le ministre, permettez-moi d'enfoncer le clou !
La rentrée scolaire de 2011 s'annonce particulièrement difficile : 1 500 classes seront fermées, ce qui suscite un très vaste mouvement de mécontentement, sinon de révolte.
Sentant le danger électoral de la poursuite d'une politique de déconstruction de l'éducation nationale, le Président de la République a annoncé qu'il n'y aurait pas de fermetures de classes dans le primaire en 2012. Après tout, cette promesse n'engage qu'un candidat à la présidence de la République…
Avant de nous réjouir, nous aimerions, monsieur le ministre, recevoir quelques assurances de votre part. Pouvez-vous nous assurer, par exemple, que vous n'allez pas, une fois de plus, augmenter les effectifs des classes, réduire le taux de scolarisation des enfants de moins de 3 ans, laisser se constituer des établissements « ghettos » ?
M. Guy Fischer. Très bien !
M. Yannick Bodin. Allez-vous cesser de supprimer les RASED, les réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté, de fermer des options et des formations, de menacer l'avenir des psychologues scolaires, de faire disparaître la médecine scolaire, d'éteindre le corps des remplaçants ?
M. Guy Fischer. Très bien !
M. Yannick Bodin. Depuis plusieurs mois, certaines académies ont choisi de faire appel à Pôle emploi dans des situations critiques. Ainsi, le rectorat de Paris a organisé une campagne de recrutement de remplaçants via Pôle emploi, afin de constituer son vivier pour l'année scolaire 2011-2012 !
L'éducation nationale n'est-elle plus un service public ? N'est-elle plus capable de recruter et de former ses personnels ? Dois-je revenir sur les problèmes que pose cette méthode de recrutement ? Les volontaires sont sans doute de bonne volonté et diplômés, mais que connaissent-ils du métier d'enseignant ?
On constate par ailleurs une désaffection pour le métier d'enseignant parmi les étudiants. La vocation d'enseigner se meurt.
M. le président. Veuillez poser votre question, mon cher collègue !
M. Yannick Bodin. La disparition d'une formation professionnelle digne de ce nom explique, pour l'essentiel, qu'il y ait de moins en moins de candidats aux concours. Alors, on recrute n'importe comment !
M. Alain Gournac. La question !
M. Yannick Bodin. En 2011, 16 000 postes ont été supprimés. Depuis 2007, on a atteint le chiffre abyssal de 66 000 postes en moins, alors même que le nombre d'élèves ne cesse d'augmenter et la scolarité de s'allonger. Les enquêtes internationales ne glorifient pas notre système éducatif…
Monsieur le ministre, l'annonce d'un moratoire sur les fermetures de classes dans le primaire en 2012 s'accompagnera-t-elle d'un gel des coupes budgétaires dans l'éducation nationale ou n'est-ce là que de la poudre aux yeux des électeurs, qui, de toute façon, ne seront pas dupes ?
(Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Luc Chatel, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs de l'opposition, j'ai parfois du mal à vous suivre ! En effet, alors que, depuis des mois, vous nous alertez sur la situation de l'école en milieu rural, vous vous indignez quand le Président de la République annonce que, à la rentrée de 2012, le nombre des fermetures de classes ne devra pas excéder celui des ouvertures !
Monsieur Bodin, ce qui m'intéresse, pour ma part, ce sont les résultats de nos élèves, l'amélioration de la performance de notre système éducatif, pour répondre aux exigences et aux attentes des parents.
Nous avons mis en place un système d'évaluation de nos élèves en CM 2 et en CE 1, que vous avez d'ailleurs contesté. Sortons quelques instants des querelles politiciennes, monsieur le sénateur, même si nous sommes en précampagne électorale, et examinons objectivement, de manière dépassionnée, les résultats de cette évaluation : on constate alors que, cette année, 50 % des élèves de CE 1 avaient des acquis très solides, soit six points de plus que l'année dernière. Cela signifie que la première cohorte d'élèves ayant bénéficié de la réforme du primaire de 2008, avec des programmes recentrés sur les apprentissages fondamentaux et un soutien scolaire personnalisé, notamment pour la lecture, a obtenu des résultats bien meilleurs que celle qui l'a précédée.
Ce qui m'intéresse, monsieur le sénateur, c'est que notre système éducatif soit capable de se moderniser, de s'adapter, de différencier ses moyens pour obtenir de meilleurs résultats ; il faut savoir tourner la page des vaines querelles du passé !
(Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Yannick Bodin, pour la réplique.
M. Yannick Bodin. Monsieur le ministre, comment allez-vous expliquer aux Français que vous entendez ne fermer aucune classe l'année prochaine dans le primaire, alors que, dans le même temps, vous supprimez 14 000 postes ? C'est absolument incompréhensible !
À propos de l'évaluation des élèves, je vous ferai observer que les enquêtes PISA menées par l'OCDE font apparaître que la situation du système éducatif de notre pays se dégrade, puisque le pourcentage d'élèves en difficulté à l'âge de quinze ans est passé de 15 % à 20 %. Or, cela fait dix ans que vous gouvernez, et bientôt cinq que le Président de la République s'attache à réduire l'encadrement des élèves au sein de l'éducation nationale ! Il ne faut pas s'étonner de la situation actuelle !
M. le président. Il faut conclure !
M. Yannick Bodin. En ce qui concerne la rentrée prochaine, c'est à bon droit que les parents d'élèves et les enseignants s'inquiètent ! Rendez-vous l'année prochaine !
(Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.