M. André Trillard. Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé des transports, et porte sur la récente grève qui a secoué les ports de notre pays.
Monsieur le secrétaire d'État, comme l'a souligné avec justesse et gravité notre collègue Louis Nègre, mardi dernier, au cours du débat sur le schéma national des infrastructures de transport, aujourd'hui, le premier port français n'est ni Marseille ni Le Havre, c'est Anvers.
La modernisation des ports français, qui doivent faire face à la concurrence acharnée des ports européens et mondiaux, est un enjeu essentiel du développement économique futur de notre pays.
Ce constat est à l'origine d'une réforme profonde de notre système portuaire qui a abouti à l'adoption de la loi du 4 juillet 2008, saluée dans son rapport public annuel par la Cour des comptes présidée par M. Didier Migaud. Auparavant les ports français étaient soumis à un régime datant de 1967.
Aujourd'hui, ce processus de modernisation est dangereusement remis en cause par une série de grèves de la part des personnels portuaires. Ce conflit social, né du refus de certains de contribuer équitablement à l'effort national en matière de retraite, met en péril des centaines de milliers d'entreprises, soit 215 000 sur les seuls départements d'implantation des ports. Ces entreprises font face à des difficultés d'approvisionnement, ainsi qu'à des augmentations de coût de transport et de stockage dramatiques en ces temps de reprise fragile de l'activité économique.
Dans mon département de la Loire-Atlantique, le terminal fruitier a déploré, au mois de janvier, une diminution de son trafic de 93 % par rapport à l'année dernière. Une baisse du trafic conventionnel de l'ordre de 30 000 tonnes a également été observée sur la même période dans les autres secteurs.
Malgré l'annonce récente d'une suspension de la grève, les dommages causés à notre économie par ces interruptions de travail font craindre une dégradation irréversible de l'image de nos ports et, in fine, un détournement des trafics vers des ports concurrents plus fiables, ce qui est d'ores et déjà le cas pour le Grand Port de Marseille.
Monsieur le secrétaire d'État, ma question porte sur trois points précis.
Pouvez-vous nous assurer que la réforme portuaire sera bien menée à son terme ?
Quelle est la position du Gouvernement sur l'accord du 27 novembre dernier qui devait permettre aux 5 000 agents portuaires de partir à la retraite jusqu'à quatre ans avant l'âge légal en raison de la pénibilité des tâches qu'ils accomplissent ?
Qu'en est-il réellement de cette pénibilité au moment où un rapport de la Cour des comptes évoque les conditions particulièrement avantageuses dont bénéficient certains de ces salariés ?
M. Thierry Mariani, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé des transports. Monsieur Trillard, vous connaissez bien ce sujet. En tant que sénateur de la Loire-Atlantique, vous constatez, comme vos collègues des Bouches-du-Rhône et d'autres départements, ...
M. Charles Revet. La Seine-Maritime !
M. Thierry Mariani, secrétaire d'État. ... les effets de cette grève sur l'image des ports et de notre pays.
Je répondrai précisément à votre question.
Premièrement, nous mènerons à son terme cette réforme portuaire, qui a été décidée dans l'intérêt de notre pays, afin que nos ports retrouvent une réelle compétitivité. Nous en sommes à la dernière étape.
Deuxièmement, je rappelle que, avant le 27 octobre dernier, les organisations professionnelles et le patronat avaient commencé à discuter des questions relatives à la prise en compte de la pénibilité. Entre-temps, la loi portant réforme des retraites a été votée par le Sénat et par l'Assemblée nationale. Elle s'applique donc à tous les Français, travailleurs portuaires, agriculteurs, etc.
(Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
Mme Odette Terrade. Ce n'est pas ce qui a été dit pendant le débat !
M. Thierry Mariani, secrétaire d'État. La loi est très claire : la pénibilité peut être prise en compte, mais elle se traduit par un départ à la retraite anticipé de deux ans par rapport à l'âge légal.
MM. Jean-Claude Danglot et Guy Fischer. C'est une trahison de la parole donnée !
M. Thierry Mariani, secrétaire d'État. Quelle est la position du Gouvernement ? L'accord que vous évoquez du 27 octobre dernier a-t-il été signé ? La réponse est non, et je mets au défi quiconque dans cet hémicycle d'apporter la preuve contraire.
Certes, des discussions ont eu lieu entre les partenaires sociaux et une partie des employeurs. Cependant, il manquait un troisième partenaire qui n'avait pas donné son accord : excusez du peu, c'est l'État, qui payait à hauteur de 140 millions d'euros.
Par conséquent, si des discussions ont bien eu lieu, aucun accord n'a été signé.
Quel est l'enjeu aujourd'hui ? Faut-il permettre aux travailleurs portuaires de partir à la retraite à 58 ans, alors que l'on vient de proposer à tous les Français de porter l'âge de départ à la retraite à 62 ans ?
La réponse est claire : oui à la prise en compte de la pénibilité, mais dans le cadre de la loi ; oui à une application de la loi égale pour tous les Français. Nous avons tendu la main en proposant de tenir compte de la pénibilité par un départ à la retraite anticipé de deux ans, conformément à la loi.
Des négociations se déroulent en ce moment. Je pense, et j'espère, que nous parviendrons à un accord. C'est l'intérêt des ports français, c'est l'intérêt de notre pays et c'est l'intérêt des travailleurs portuaires !
(Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP. – M. Yves Pozzo di Borgo applaudit également.)
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