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Simon Sutour
Question d'actualité au gouvernement N° 617 au Ministère de l'écologie


Gaz de schiste

Question soumise le 11 mars 2011

M. Simon Sutour. Madame la ministre de l'écologie, je souhaite appeler votre attention sur les permis exclusifs de recherches de mines d'hydrocarbures liquides ou gazeux et sur les conséquences désastreuses que pourrait avoir l'exploitation du gaz de schiste sur l'environnement.

En effet, en mars 2010, huit permis ont été accordés par votre prédécesseur, M. Borloo, dans la plus grande discrétion, à GDF-Suez et Total, associés pour l'occasion à des entreprises américaines afin de rechercher un gaz non conventionnel.

Est-ce compatible avec le Grenelle de l'environnement ? Est-ce compatible avec le classement des Grands Causses au patrimoine mondial de l'UNESCO,…

M. Guy Fischer. Non !

M. Simon Sutour. … pour lequel je vous remercie de votre aide précieuse.

De plus – ce n'est malheureusement pas un hasard –, une ordonnance portant modification du code minier – fait particulièrement rare –, prise en conseil des ministres le 19 janvier dernier, facilite ce type d'exploitation.

Cette situation suscite, et c'est bien justifié, une très vive émotion chez les habitants et les élus des zones concernées. Mais cette émotion est partagée bien au-delà puisque, chaque jour, des citoyens de l'ensemble de notre pays nous apportent leur soutien dans la lutte contre cette grave atteinte à notre environnement et, au-delà, à la santé publique.

En effet, comment ne pas être alertés lorsque nous examinons de près les conséquences de l'exploitation du gaz de schiste aux États-Unis, notamment en Pennsylvanie ? La pollution des nappes phréatiques y est irréversible, les paysages sont dévastés, et l'on s'inquiète de plus en plus des effets des procédés utilisés pour l'extraction sur la santé des populations vivant sur ces territoires.

Je le sais, vous avez précisé à de multiples reprises qu'il s'agit non pas de permis d'exploitation, mais de permis d'exploration. Il n'y a en réalité aucune différence ! En effet, d'après les documents remis par GDF-Suez aux maires des communes concernées, les strates de schiste doivent de facto subir une fracturation dans le cadre de l'exploration. Par conséquent, dès l'exploration, les conséquences sont irréversibles, et parler d'un simple carottage est erroné.

Avec M. Besson, vous avez confié à une mission interministérielle une réflexion sur les enjeux environnementaux, sociaux et économiques de l'exploitation des gaz et huiles de schiste.

Peut-être eût-il été préférable de la mettre en place avant que M. Borloo n'accorde ces permis d'exploration. Peut-être eût-il été également préférable, compte tenu de l'importance majeure de ce dossier, de saisir la Commission nationale du débat public. Cela aurait été de bonne gouvernance.

Sur nos territoires, madame la ministre, l'émotion est considérable.

M. le président. Posez votre question, mon cher collègue.

M. Simon Sutour. Les maires et les élus locaux n'acceptent pas de ne pas avoir été informés ni consultés au préalable. De nombreux parlementaires de tous bords se mobilisent.

Madame la ministre, ma question est simple : allez-vous enfin abroger ces permis d'exploration ?
(Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE. – Mme Jacqueline Gourault applaudit également.)

Réponse émise le 11 mars 2011

M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'écologie.

M. Didier Boulaud. Il faut la féliciter de sa prise de position sur le Front national !

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement. Monsieur Sutour, oui, les projets d'exploration de gaz de schiste suscitent une grande émotion et une vive inquiétude de la part de tous les élus.

Quelle est la situation ? Trois permis ont été accordés en mars 2010 : il s'agit bien de permis d'exploration, et non d'exploitation. S'il est vrai que la technique utilisée est la même, l'ampleur des deux opérations ne peut être comparée.

Néanmoins, il y a une grande inquiétude, fondée notamment sur les images du type d'exploitation qui a eu lieu aux États-Unis et sur ses conséquences sur le paysage et l'environnement, notamment sur les nappes phréatiques.

Par ailleurs, se pose la question de la compatibilité de ce projet avec celui de classement au patrimoine mondial de l'UNESCO des Grands Causses et des Cévennes, qui est porté par toute la France.

M. Jacques Blanc. Très bien !

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre. La concertation a-t-elle été insuffisante ? Accompagnée de nombreuses publications, elle s'est déroulée de manière régulière. Cela dit, le code minier est ancien et, à la vérité, il laisse relativement peu de place à la concertation pour ce qui concerne la phase d'exploration.

C'est la raison pour laquelle, à l'occasion de la loi de ratification de l'ordonnance de codification du code minier – elle s'est faite à droit constant et je m'inscris en faux contre ce que vous avez dit, monsieur le sénateur –, le Gouvernement pourrait proposer au Parlement d'adopter des modifications du code minier en vue de mieux associer les populations au stade de l'exploration.

Sur le fond, des interrogations subsistent sur l'exploration du gaz de schiste. C'est la raison pour laquelle nous avons décidé de suspendre l'ensemble des travaux qui y sont liés, qu'il s'agisse, j'y insiste, du forage par carottage ou par fracturation hydraulique.

M. Jacques Blanc. Très bien !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Jusqu'à quand ?

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre. Nous attendons, pour la fin du mois de mai ou le début du mois de juin, les résultats de la mission qui a été confiée conjointement aux ingénieurs du Conseil général de l'industrie, de l'énergie et des technologies et du Conseil général de l'environnement et du développement durable.

Mme Nicole Bricq. Il n'y a qu'à tout arrêter !

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre. C'est au vu des conclusions de cette mission qu'une décision sera prise.

Je le dis très clairement, les industriels nous affirment qu'ils recourent désormais à des technologies nouvelles, très différentes de celles qu'ils utilisaient autrefois aux États-Unis.

Mme Nicole Bricq. Ce n'est pas vrai !

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre. Nous leur répondons qu'il leur appartient d'apporter la preuve de ce qu'ils avancent. Pour notre part, nous n'accepterons pas, en France, des exploitations de cette nature compte tenu des conséquences qu'elles ont eues aux États-Unis.
(Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

M. Jacques Blanc. Bravo !

M. Didier Boulaud. Ça, c'est une réponse ! On a entendu d'autres ministres qui, eux, n'ont guère brillé !

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