M. Roland Courteau. « La France qui se lève tôt, la France qui travaille dur… » Eh bien, cette France-là n'arrive plus à joindre les deux bouts !
Et qui a dit qu'il serait le Président du pouvoir d'achat ?
(Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
Pourtant, aujourd'hui, tout augmente. Tout, sauf le pouvoir d'achat !
À la hausse : les produits alimentaires, les tarifs de la SNCF, les péages, les carburants, les tarifs du gaz et de l'électricité et, surtout, l'exaspération des Français.
À la baisse : la confiance des ménages.
Concernant le secteur de l'énergie, pour ceux qui ont cru aux « comptes fantastiques » de la fée libérale, le retour sur terre est amer.
Dans quel imbroglio kafkaïen nous a-t-on fourrés depuis 2002 ?
Et dire qu'un certain slogan claironne : « Nous vous devons plus que la lumière » !
Après la privatisation de GDF, malgré l'engagement pris par le ministre Sarkozy, après la loi portant nouvelle organisation du marché de l'électricité, la loi NOME, dernier avatar d'un processus délétère, annonciateur de fortes hausses du prix de l'électricité, voici venu le temps des hausses du prix du gaz !
M. Alain Gournac. Mais non !
M. Roland Courteau. Une augmentation de 20 % en un an et de 55 % depuis la privatisation de GDF : autant de coups de massue pour les Français !
Bien entendu, pendant ce temps-là, les dividendes des actionnaires sont également à la hausse… Mais à la hausse aussi, la précarité énergétique : 4 millions de foyers sont frappés !
Certes, le Gouvernement, dans la perspective de l'élection présidentielle, vient de geler le prix du gaz au 1er juillet : excellente nouvelle pour les Français qui pourront ainsi, durant tout l'été, se chauffer sans retenue !
(Rires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
En revanche, l'hiver dernier, un Français sur dix n'a pu se chauffer, faute de moyens...
Mais le mauvais feuilleton énergétique continue.
Il y a dix ans, le Gouvernement a cédé à GDF – entreprise publique – 32 000 kilomètres de gazoducs pour presque rien. Aujourd'hui, GDF-Suez, entreprise devenue privée, vend une partie de ce réseau pour 1 milliard d'euros à la Caisse des dépôts et consignations, organisme d'État.
En fait, l'État rachète vingt fois plus cher ce qu'il a cédé à GDF il y a dix ans, et sans aucun bénéficie pour nos concitoyens.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Quelle bonne gestion des deniers publics !
M. Roland Courteau. Comment justifiez-vous cette vente spéculative ?
Et quand allons-nous sortir de cet imbroglio énergétique kafkaïen, qui plombe le pouvoir d'achat des Français et engendre tant de précarité énergétique ?
(Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Didier Boulaud. Ça, c'est une question !
M. Éric Besson, ministre auprès de la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique. Monsieur le sénateur, j'essaie de comprendre…
M. David Assouline. C'était très clair !
M. Éric Besson, ministre. … en quoi l'opération de cession partielle de GRT gaz, le réseau de transport de gaz en France, par GDF-Suez serait une opération de privatisation cachée, comme vous venez de le suggérer.
(Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
M. Roland Courteau. J'ai dit que c'était une opération spéculative ! Et ce sont les Français qui vont payer !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ça, c'est ce qui s'appelle gérer l'argent des Français !
M. Éric Besson, ministre. D'abord, elle a été menée de façon totalement transparente. L'annonce en a été faite le 14 avril dernier et il s'agit clairement d'un renforcement du secteur public dans la distribution du gaz en France, laquelle reste néanmoins contrôlée par GDF-Suez.
La valorisation du capital cédé est totalement conforme à celle qui avait été retenue lors de la fusion entre GDF et Suez, en 2008. Les actifs de GRT gaz avaient été évalués, sous le contrôle de la Commission des participations et des transferts, à 5,6 milliards d'euros. Leur valeur est aujourd'hui estimée à 6,7 milliards d'euros. Où est le problème ?
M. David Assouline. C'est nous qui ne comprenons rien !
M. Éric Besson, ministre. Il y a bien eu une augmentation de la valeur de GRT gaz, mais c'est grâce à la création de valeur réalisée par GDF-Suez, qui a investi 2 milliards d'euros.
M. Paul Raoult. Il ne maîtrise pas son dossier !
M. Éric Besson, ministre. Enfin, cette opération, si elle est menée, fera de GRT gaz l'un des leaders européens dans son secteur.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ce n'est pas la question !
M. Éric Besson, ministre. Ce projet s'inscrit bien dans une logique industrielle qui vise à renforcer un champion français dans la gestion des réseaux et des grandes infrastructures.
Vous me permettrez de relever à ce sujet un grand paradoxe.
À l'Assemblée nationale, vos collègues députés socialistes nous reprochent une « privatisation »…
M. Jean-Pierre Bel. Ce n'est pas la question !
M. Éric Besson, ministre. … et, en la circonstance, le reproche que vous pourriez nous faire serait presque une renationalisation partielle. Il faudrait choisir vos arguments !
(Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
MM. Jean-Pierre Bel et Didier Boulaud. Répondez donc à la question !
M. Éric Besson, ministre. Pour ce qui concerne les prix de l'énergie, vous avez redit à juste titre que, à la demande du Premier ministre,…
M. René-Pierre Signé. On n'a pas entendu ça !
M. Éric Besson, ministre. … la formule de calcul du gaz avait été provisoirement gelée : le gaz n'a pas augmenté jusqu'au 1er juillet de l'année dernière et le tarif social du gaz a été amélioré.
Concernant l'électricité, nous avons revalorisé le niveau du tarif social de l'électricité et limité la hausse à 2,9 % jusqu'au 1er juillet de l'année dernière.
M. Roland Courteau. Il ne répond pas parce qu'il ne sait pas !
M. Éric Besson, ministre. Nous avons également créé une prime à la casse pour les chaudières à gaz et à fioul.
Nous avons donc eu en permanence la préoccupation du pouvoir d'achat des Français les plus modestes.
Reste, monsieur le sénateur, la question de l'avenir, dont nous aurons sûrement à débattre, car il faudra bien continuer à produire de l'électricité. Vous devrez donc nous expliquer comment vous entendez sortir du pétrole et du nucléaire – c'est ce qui ressort des débats internes à votre parti – tout en préservant la compétitivité de notre industrie et le pouvoir d'achat des ménages français.
(Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Paul Raoult. On vous l'expliquera !
M. Roland Courteau. Ne nous faites pas dire ce que nous n'avons pas dit !
M. Didier Boulaud. L'important, c'est qu'on en sorte ! Le reste, c'est du détail !
M. Alain Gournac. Ils en sortiront avec du vent ! Comme pour le reste !
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