M. Jean-Étienne Antoinette. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, en l'absence du ministre de l'intérieur, ma question s'adresse au ministre chargé des relations avec le Parlement.
Ces dernières semaines, l'actualité des faits divers en Guyane a fortement heurté les consciences et mis la population tout entière en état de choc.
Plusieurs meurtres de type crapuleux, touchant des personnes parfois connues, ont été commis avec une sauvagerie monstrueuse et inédite. En Guyane, un aussi grand nombre d'actes sur une aussi courte période de temps est un fait sans précédent.
Après la violence prédatrice dite « sud-américaine », qui a atteint la Guyane depuis quelques années et dont le caractère paroxystique est, la plupart du temps, lié au fait que les auteurs sont sous l'emprise de stupéfiants, il semble qu'un nouveau cap soit en train d'être franchi, encore mal cerné, avec l'émergence d'une criminalité qui, jusqu'ici, était propre à la pègre des grandes agglomérations, européennes ou américaines.
Sur fond de crise économique et sociale excluant de manière sévère une part importante de la population, dont une écrasante majorité de jeunes, certains, particulièrement démunis et déterminés, cèdent à la tentation de l'argent facile.
Cette violence, qui nous renvoie tous à nos responsabilités éducatives et préventives à l'égard de l'ensemble du corps social, rend aussi nécessaires des dispositifs opérationnels de répression susceptibles de rassurer la population et dont l'État a l'entière responsabilité.
Dans le même temps – oui, dans le même temps -, la criminalité liée aux activités d'orpaillage clandestin est en recrudescence. Elle n'est plus cantonnée aux abords des sites d'exploitation, légaux ou non, mais semble frapper partout, et comme aveuglément.
Imaginez donc, monsieur le ministre, la stupeur collective de la population ! Face aux violences urbaines, à la violence sud-américaine et à la délinquance juvénile, les dispositifs existent, mais leurs résultats sont plus ou moins probants…
Comment comptez-vous faire face à cette nouvelle violence crapuleuse qui s'abat sur la Guyane ?
Et comment, et surtout quand comptez-vous, en ce qui concerne en particulier les crimes « aurifères » – permettez-moi de les appeler ainsi, faute d'une expression meilleure –, placer ce grand État qu'est le Brésil devant sa responsabilité à l'égard de ses ressortissants, par la ratification du traité signé par la France et le Brésil dans le domaine de la lutte contre l'exploitation aurifère illégale et, surtout, la mise en place d'une vraie coopération économique, policière et judiciaire sauvegardant les intérêts de la Guyane ?
(Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE et de l'UCR.)
M. Patrick Ollier, ministre auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Monsieur le sénateur, le Gouvernement connaît la part que vous prenez face à ces problèmes d'insécurité propres à la Guyane : l'orpaillage clandestin, l'immigration clandestine et la montée de la délinquance. Il suit de manière attentive leur évolution.
Je rappelle que le département de la Guyane possède une frontière commune de 1 250 kilomètres avec le Brésil et le Surinam. Ce n'est pas à vous que je l'apprendrai, cette situation ne facilite pas la lutte contre l'insécurité.
Dans le contexte mondial d'augmentation du cours de l'or, nous assistons bien sûr à une intensification de l'orpaillage clandestin. L'opération Harpie, lancée en 2010, est donc devenue pérenne. Nous veillons à la poursuite de cette mission, dont nous avons d'ailleurs renforcé les moyens.
Une meilleure coordination entre les nombreuses forces de police et des armées a été mise en place. La création d'un état-major spécifique pour diriger la lutte contre l'orpaillage illégal permet d'améliorer la symbiose entre les gendarmes et les militaires de l'armée de terre.
L'ouverture, dès septembre 2010, d'un centre de coopération policière et douanière à Saint-Georges-de-l'Oyapock facilite aussi le travail commun avec le Brésil.
Vous avez eu raison, monsieur le sénateur, de rappeler qu'un accord avait été signé avec le Brésil. Parce que nous ne pouvons pas mener cette lutte sans le soutien des pays limitrophes, nous nous efforçons de renforcer la coordination entre la France, le Brésil et le Surinam.
L'accord signé en 2008 par le président Sarkozy et le président Lula sur la lutte contre l'orpaillage clandestin doit être ratifié. Je puis vous assurer que ce problème est au cœur des discussions entre la France et le Brésil.
Je le confirme, le Gouvernement poursuit ses efforts de lutte contre cette forme de délinquance ; soyez assuré qu'il est très vigilant et qu'il suit au jour le jour l'évolution de la situation.
Je profite de cette réponse à votre question, monsieur le sénateur, pour rendre hommage à l'action des forces de sécurité en Guyane, qui ne mesurent pas leur peine : elles s'engagent quotidiennement, et dans des conditions toujours particulièrement difficiles, face à des dangers très sérieux.
(Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UCR.)
M. Jean-Louis Carrère. Vous avez intérêt à leur rendre hommage... Avec tous les postes que vous leur supprimez !
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.