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Marcel Rainaud
Question orale sans débat N° 1192 au Ministère de l'outre-mer


Adaptation des moyens accordés à la justice et à la sécurité dans le département de l'Aude

Question soumise le 3 février 2011

M. Marcel Rainaud attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration sur les chiffres de la délinquance.

Pour le département de l'Aude, qui compte 349 237 habitants, le taux de criminalité est pour 2010 de 38 faits pour 1 000 habitants. Il est supérieur à celui d'autres départements de strate démographique identique.

Il s'explique en partie par la situation géographique de l'Aude, située entre trois départements plus peuplés : les Pyrénées-Orientales (441 000 habitants), l'Hérault et la Haute-Garonne
(plus d'un million d'habitants chacun).

Si cette situation géographique est un atout pour le développement de l'Aude, elle constitue une spécificité dont il convient de tenir compte pour appréhender la réalité de la délinquance sur le territoire.

Or, sur notre département, nous avons eu à déplorer le transfert du commandement de gendarmerie de Castelnaudary vers Carcassonne, ainsi que la suppression de la gendarmerie mobile de Narbonne.

La fermeture du tribunal de Castelnaudary a renforcé les difficultés de la juridiction de Carcassonne. Sur l'année 2010, le tribunal de grande instance de Carcassonne a dû faire face à un accroissement général de son activité. Les personnels sont soumis à rythme de travail particulièrement difficile à soutenir.

La refonte de la médecine légale engendre la concentration de celle-ci à Montpellier, où s'effectueront les autopsies jusque-là réalisées dans huit départements ! Cela engendrera des surcoûts et des pertes de temps puisque les enquêteurs seront contraints de se déplacer à Montpellier, soit 300 kilomètres aller-retour pour ceux de Carcassonne, autant de frais aussi pour le transfert de corps.

Il lui demande de préciser s'il entend engager une concertation sur la problématique de la délinquance et de la justice avec les acteurs du territoire, afin de permettre au département de l'Aude de bénéficier des moyens adaptés à la situation du territoire.

Réponse émise le 9 mars 2011

M. Marcel Rainaud. Madame la ministre, la récente publication des chiffres de la délinquance soulève bon nombre d'interrogations.

Le silence imposé aux préfets sur ce dossier, de même que les consignes adressées aux policiers et aux gendarmes sur cette question, jette un doute sur la crédibilité des statistiques annoncées. La modification des modes de recensement des actes et de compilation des données pour 2010 ne fait que renforcer la suspicion des acteurs locaux sur la réalité des chiffres officiels.

Pour autant, ces précautions ne suffisent pas à masquer la réalité d'une situation pour le moins dégradée.

Pour le seul département de l'Aude, qui compte 349 237 habitants, le taux de criminalité est de l'ordre de 38 faits pour 1 000 habitants, soit plus que dans les autres départements de strate démographique identique. Cela s'explique en partie par la spécificité de la situation géographique de l'Aude, qui se situe entre trois départements plus peuplés : les Pyrénées-Orientales, avec 441 000 habitants, ainsi que l'Hérault et la Haute-Garonne, avec chacun plus d'un million d'habitants.

Par ailleurs, l'Aude est au carrefour d'axes de circulation importants : un axe nord-sud, qui va jusqu'en Espagne via Perpignan, et un axe est-ouest, qui relie Montpellier à l'agglomération toulousaine.

Si une telle situation géographique est un atout fort pour le développement économique et culturel du département, c'est aussi un état de fait dont il convient de tenir compte pour appréhender la réalité de la délinquance sur le territoire.

Ce département a eu à déplorer le transfert du commandement de gendarmerie de Castelnaudary – c'est la troisième ville du département, aux portes de la Haute-Garonne – vers Carcassonne, ainsi que la suppression de la gendarmerie mobile à Narbonne.

La fermeture du tribunal de Castelnaudary est venue accroître les difficultés de la juridiction de Carcassonne, qui doit faire face à une charge trop lourde.

Le tribunal de grande instance de Carcassonne a certes décroché un bon point à l'échelon régional pour la rapidité de sa réponse pénale, mais son activité pour l'année 2010 a été marquée par 47 jours d'audiences criminelles, contre 30 en 2009, par 1 867 saisines du tribunal correctionnel, contre 1 558 en 2009, et par 17 332 affaires reçues au parquet, dont 3 760 sont « poursuivables ». La dizaine de magistrats du siège, les quatre parquetiers et les quarante-trois fonctionnaires sont donc soumis à rythme de travail particulièrement difficile à soutenir.

De plus, la refonte de la médecine légale, qui est entrée en vigueur depuis le 15 janvier, a conduit à concentrer l'activité de ce service sur le seul site de Montpellier, où s'effectueront désormais les autopsies jusque-là réalisées dans l'Aude, les Pyrénées-Orientales, l'Hérault, l'Aveyron, le Gard, la Lozère, le Vaucluse et l'Ardèche. Excusez du peu !

Une telle centralisation entraînera certainement des surcoûts. Les enquêteurs seront en effet contraints de se déplacer à Montpellier pour les autopsies, soit un trajet aller-retour de 300 kilomètres pour ceux de Carcassonne. Cette centralisation occasionnera également des frais pour les transferts de corps. Par ailleurs, le risque est grand que les enquêteurs perdent du temps, du fait à la fois de ces déplacements, mais aussi de l'engorgement inévitable d'une telle structure.

Madame la ministre, je vous serais reconnaissant de bien vouloir me préciser si vous entendez engager une réelle concertation sur les problématiques de la délinquance et de la justice avec les acteurs du territoire afin de permettre au département de l'Aude et à ses habitants de bénéficier, dans ces domaines, des moyens adaptés à la réalité de la situation locale.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marie-Luce Penchard, ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, chargée de l'outre-mer. Monsieur le sénateur, vous interrogez M. Claude Guéant, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, sur la délinquance dans votre département et sur l'organisation des forces de sécurité. En son absence, il m'a demandé de vous apporter les éléments de réponse suivants.

Une lutte sans relâche est menée contre la délinquance dans l'Aude, comme partout ailleurs en France. Cette mobilisation porte ses fruits. Dans ce département, le nombre d'atteintes aux biens a baissé de 9 % en 2010, les escroqueries et les infractions économiques et financières de 7 % et les cambriolages de résidences principales et secondaires de près de 11 %. Quant aux atteintes à l'intégrité physique des personnes, elles ont légèrement diminué en 2010, de 0,33 %.

Les réorganisations territoriales du dispositif de la gendarmerie ont pour objectif essentiel de répondre au mieux aux nécessités locales, tout en permettant une meilleure maîtrise des dépenses publiques.

Ainsi, dans le département de l'Aude, le dispositif territorial a été adapté sur proposition des échelons locaux de commandement et après concertation avec les élus du territoire. Cette adaptation se traduit par la dissolution du groupe de commandement de la compagnie de gendarmerie départementale et de la brigade de recherches de Castelnaudary et par la réorganisation des circonscriptions sous le commandement de la compagnie de Carcassonne.

Cette évolution s'accompagne d'une réorganisation des unités de sécurité routière dans le département afin d'apporter une réponse opérationnelle plus efficiente tant sur le réseau autoroutier que sur les réseaux routiers secondaires.

Enfin, la réforme de la médecine légale conduit à une centralisation des lieux de réalisation des autopsies. Si elle est effectivement porteuse de contraintes nouvelles pour les policiers et les gendarmes, elle laisse pour autant la place à des adaptations locales.

En matière de thanatologie, l'institut médico-légal de Montpellier est désormais chargé d'effectuer les autopsies et les examens de corps demandés par les magistrats de neuf tribunaux de grande instance, répartis sur six départements. Face à la pénurie de médecins légistes qualifiés dans l'Aude, cet institut est chargé de former des médecins légistes, qui pourront toujours être requis afin de se déplacer pour procéder à une levée de corps.

En matière de médecine légale du vivant, dans le département de l'Aude, la totalité des actes continueront d'être réalisés par le réseau de proximité, comme c'était déjà le cas avant la réforme.

Les mesures mises en œuvre visent donc à répondre aux besoins locaux, et ce en concertation avec les élus et les acteurs du territoire. Plus globalement, elles ont pour objectif d'assurer la sécurité de tous nos concitoyens sur l'ensemble du territoire national, malgré un contexte budgétaire contraint.

M. le président. La parole est à M. Marcel Rainaud.

M. Marcel Rainaud. Madame la ministre, votre réponse ne me rassure pas…

Les Audois attendent de vous que vous répondiez à leurs craintes et que vous leur accordiez les moyens nécessaires pour permettre aux services de police, de gendarmerie et de justice de faire face à la réalité de la situation et à l'évolution démographique de leur département. Ils ont besoin d'une présence plus forte de gendarmes dans les zones rurales, de plus de policiers dans les villes, et d'une justice dotée de moyens adaptés au bon accomplissement de sa mission.

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