Mme Bernadette Bourzai appelle l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, sur l'organisation des services de la justice à Ussel, en Corrèze.
La récente réforme de la carte judiciaire a décidé de la fermeture le 1er janvier 2010 du tribunal d'instance d'Ussel pénalisant gravement tout le nord du département puisque cela porte la distance à parcourir à 130 kilomètres pour se rendre au tribunal de grande instance qui se trouve à Brive. Actuellement seul reste comme service de proximité un point d'accès au droit qui est porté par le conseil départemental de l'accès au droit de la Corrèze et qui doit faire face à une demande croissante.
Le ministère a décidé de l'ouverture d'une maison de la justice et du droit en 2012 et de son implantation dans des locaux de la collectivité locale. Elle en avait été informée en mai 2011. Le ministère a aussi prévu de s'engager à rembourser à hauteur de 80 % les travaux qui seront engagés pour l'aménagement des locaux mais dans le cadre d'une enveloppe de l'ordre de 100 000 €, et il participera à hauteur de 13 000 € en dotation de premier équipement pour l'année d'ouverture. Mais il restera à la charge de la commune qui a été désignée d'office pour porter le projet, 20 % de l'investissement pour les travaux d'aménagement auxquels s'ajouteront les charges de fonctionnement, y compris celles du personnel qui s'élèveront à 1.5 ETP, et qui sont tout de même estimées entre 60 000 et 70 000 euros par an ! Ce qui constitue un double transfert de charges, en investissement et en fonctionnement.
Or, on a assisté sur cette année 2011 à une hausse significative de la demande et des besoins sur le point d'accès au droit implanté à Ussel. Sur les mois d'octobre et septembre 2011, le taux de fréquentation a presque atteint celui du tribunal d'instance de 2009.
Elle lui demande ce qu'il envisage pour compenser les charges de la commune et débloquer de nouveaux crédits pour permettre à la maison de la justice et du droit d'Ussel d'assurer efficacement et dans de bonnes conditions les missions qui lui sont attribuées.
Mme Bernadette Bourzai. Monsieur le ministre, la récente réforme de la carte judiciaire a entraîné la fermeture le 1er janvier 2010 du tribunal d'instance d'Ussel, ce qui pénalise gravement la population du nord du département de la Corrèze. Cela porte en effet à 90 kilomètres la distance à parcourir pour se rendre au tribunal d'instance de Tulle et à 130 kilomètres celle à parcourir pour se rendre au tribunal de grande instance de Brive-la-Gaillarde. Et je n'évoquerai pas les conséquences de cette fermeture sur les personnels judiciaires...
Ainsi, en Haute Corrèze, il ne reste comme service de proximité qu'un point d'accès au droit, lequel est porté par le conseil départemental de l'accès au droit de la Corrèze.
Ce point d'accès devant faire face à une demande croissante, le ministère a décidé l'ouverture d'une maison de justice et du droit en janvier 2013 et son implantation dans des locaux de la collectivité locale d'Ussel. M. le garde des sceaux m'en a informée en mai 2011.
Le ministère a également prévu de s'engager à rembourser à hauteur de 80 % les travaux qui seront effectués pour l'aménagement des locaux, dans le cadre d'une enveloppe de l'ordre de 100 000 euros. En outre, il versera une dotation de premier équipement de 13 000 euros l'année d'ouverture des travaux.
Il restera donc à la charge de la commune, qui a été désignée d'office pour porter le projet, 20 % de l'investissement pour les travaux d'aménagement, auxquels s'ajouteront les charges de fonctionnement. Ces charges incluent les dépenses de personnel, qui s'élèveront à 1,5 équivalent temps plein travaillé au début, voire deux ensuite en fonction des besoins, soit environ 60 000 euros par an. Au total, l'opération entraîne un double transfert de charges, en investissement et en fonctionnement.
Or le point d'accès au droit implanté à Ussel a fait face en 2011 à une hausse significative de la demande et des besoins. En octobre et en septembre 2011, le taux de fréquentation a presque atteint celui du tribunal d'instance fermé en 2010. L'ouverture de la maison de justice et du droit est donc urgente.
Qu'envisagez-vous, monsieur le ministre, pour compenser les charges de la commune et débloquer de nouveaux crédits pour permettre à la maison de justice et du droit d'Ussel d'assurer efficacement, et dans de bonnes conditions, les missions qui lui sont attribuées ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. David Douillet, ministre des sports. Madame la sénatrice, je vous prie tout d'abord de bien vouloir excuser l'absence de M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, qui ne peut être présent ce matin. Vous avez souhaité appeler son attention sur les conditions de mise en place de la maison de justice et du droit d'Ussel.
Comme vous le savez, madame la sénatrice, ce sont la loi n° 98-1163 du 18 décembre 1998, relative à l'accès au droit et à la résolution amiable des conflits, et le décret n° 2001-1009 du 29 octobre 2001, modifiant le code de l'organisation judiciaire et relatif aux maisons de justice et du droit, les MJD, qui fixent les modalités de création de ces maisons.
L'article R. 131-4 du code de l'organisation judiciaire prévoit que c'est à la collectivité locale de mettre à disposition de ces établissements judiciaires créés par arrêté du garde des sceaux un local adapté. Je puis vous indiquer que c'est le cas aujourd'hui pour les 133 MJD qui existent dans notre pays.
Depuis 2008, le ministère de la justice et des libertés a développé de nouvelles maisons de justice et du droit dans des zones rurales éloignées des tribunaux telles que la ville d'Ussel.
Afin d'aider ces communes, et contrairement à ce qui se faisait antérieurement, le ministère de la justice et des libertés participe au financement des travaux d'investissement. En outre, il verse une dotation exceptionnelle de 14 000 euros TTC pour l'aménagement des locaux de la structure.
Enfin, il convient de signaler la mise en place d'un dispositif innovant, le contact visio justice, le CVJ, permettant à l'usager d'entrer directement en contact avec des services de la juridiction éloignée. L'objectif est d'offrir au public des services dématérialisés de consultation, de transaction ou de visioconférence afin de faciliter ses démarches et de lui garantir un accès à distance à la justice, ce qui lui évitera d'avoir à se déplacer jusqu'au siège de la juridiction.
Ainsi, non seulement le ministère met à disposition au tribunal de grande instance un personnel pour répondre à la demande, mais en outre il assure pour quatre ans le coût du financement du CVJ, ce qui comprend la fourniture d'une borne expert et d'une borne usager, la connexion, la maintenance et l'audit sur site, pour un montant de 30 520 euros TTC.
Il est vrai cependant que, pour les prises de rendez-vous, nous demandons à la collectivité locale de mettre un personnel à disposition, ce qui n'est pas le cas dans le cadre d'un point d'accès au droit.
Vous m'indiquez que la fréquentation du point d'accès au droit d'Ussel est en augmentation. C'est à mon sens la preuve qu'il est nécessaire de créer une MJD. Une telle création ne se fera cependant pas sans l'accord des élus locaux, en particulier du maire d'Ussel.
M. le président. La parole est à Mme Bernadette Bourzai.
Mme Bernadette Bourzai. Je vous avoue que je ne suis pas du tout satisfaite de votre réponse, monsieur le ministre. La mairie d'Ussel n'a jamais demandé la création d'une maison de justice et du droit. Elle est contrainte de l'accepter parce que le tribunal d'instance a été supprimé. Il ne faut pas inverser les choses !
Si la réforme de la carte judiciaire n'avait pas entraîné la suppression du tribunal d'instance d'Ussel, la situation judiciaire serait tout à fait conforme aux besoins, ceux-ci ayant augmenté, comme vous venez de l'indiquer.
Par ailleurs, et vous l'avez confirmé, monsieur le ministre, la création d'une maison de justice et du droit entraînera un transfert de charges réel. Les charges de fonctionnement, notamment, pèseront sur le fonctionnement de la commune d'Ussel, alors que la justice ne relève pas du tout de sa compétence. Je ne suis pas juriste, mais je sais que la justice fait partie des missions régaliennes de l'État.
Permettez-moi de faire rapidement le point sur la situation du département de la Corrèze, qui a comme particularité d'être le seul de France dont la préfecture de France n'a plus de tribunal de grande instance. De ce fait, comme je l'ai indiqué tout à l'heure, il faut désormais parcourir 130 kilomètres depuis le nord du département pour se rendre au tribunal de grande instance de Brive-la-Gaillarde.
Le bilan judiciaire publié dans la presse montre, en ce début d'année, une diminution de la fréquentation des tribunaux, notamment de celle du tribunal d'instance de Tulle, qui est en baisse de 20 % à 30 %. Selon l'expression du président du tribunal, les gens « renoncent » en fait à exercer leurs droits.
Le Gouvernement ayant décidé d'instaurer une taxe de 35 euros pour engager une procédure, il ne faudra pas être étonné si les gens n'ont plus recours à la justice. La question qu'on peut se poser est la suivante : était-ce là l'objectif de la réforme de Mme Dati ?
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