M. Yves Krattinger. Ma question s'adresse à M. le ministre chargé des collectivités territoriales.
Monsieur le ministre, les chiffres du Gouvernement que vous nous avez donnés en réponse à mon collègue François Marc sont inexacts.
M. Pierre Hérisson. Non !
M. Yves Krattinger. Depuis les années quatre-vingt, la dépense totale des collectivités est stable par rapport au produit intérieur brut. En revanche, celle de l'État a augmenté, malgré les transferts massifs de compétences.
M. David Assouline. Eh oui !
M. Yves Krattinger. La dette des collectivités compte pour seulement 10 % dans la dette publique. C'est moins que dans les années quatre-vingt, malgré la crise.
Le besoin de financement annuel des collectivités est cinquante fois inférieur à celui de l'État.
Et pourtant, il manque chaque année plus de 5 milliards d'euros dans les compensations des allocations de solidarité, qui devaient être opérées « à l'euro près ».
Et pourtant, les collectivités locales subissent les impacts financiers de normes pléthoriques. M. Alain Lambert, qui n'est pas socialiste, s'en est ému bruyamment.
M. Roland Courteau. C'est la vérité !
M. Yves Krattinger. Et pourtant, le Gouvernement a supprimé la taxe professionnelle, privant les collectivités locales d'une ressource dynamique.
M. Jean Bizet. C'est faux !
M. Yves Krattinger. Malgré cela, ces collectivités ont répondu « présent » en 2009 à votre appel en faveur du plan de relance.
M. François Rebsamen. C'est vrai !
M. Yves Krattinger. Elles cofinancent les grands projets de l'État en matière de TGV, de routes nationales ou de rénovation ferroviaire.
(Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Mme Nicole Bonnefoy. Oui !
M. Roland Courteau. C'est la vérité !
M. Yves Krattinger. Elles investissent dans la téléphonie mobile et dans le très haut débit numérique.
Elles continuent de réaliser plus de 70 % de l'investissement public chaque année.
M. Michel Berson. Voilà la vérité !
M. Yves Krattinger. Le Gouvernement veut leur imposer la « règle d'or » ? C'est fait, et depuis longtemps !
M. Robert Hue. Très bien !
M. Yves Krattinger. Les collectivités ne peuvent en effet s'endetter que pour investir et, mieux encore, elles empruntent moins de 25 % du montant total de leurs investissements.
Le Gouvernement veut leur imposer la révision générale des politiques publiques, la RGPP, et il les accuse d'avoir embauché.
Il oublie le transfert de 130 000 agents de l'État affectés aux routes, à l'entretien des collèges et des lycées, à l'action sociale...
(Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste.)
Il oublie qu'elles ont répondu « présent » quand le Gouvernement leur a demandé de recruter des emplois aidés pour lutter contre le chômage.
M. Didier Guillaume. Les préfets le demandent tous les jours !
M. Yves Krattinger. Il oublie aussi que les intercommunalités ont créé de nombreuses crèches, des sites d'accueil périscolaire, des nouveaux services essentiels à la vie quotidienne de nos concitoyens.
Le Gouvernement veut leur imposer le non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, une révision générale des politiques publiques si aveugle qui a conduit à la désorganisation que tout le monde connaît.
Voulez-vous moins de personnels dans les crèches et dans les cantines, alors que vous imposez des normes d'encadrement ?
Non !
M. David Assouline. Bien sûr qu'ils en veulent moins !
M. Yves Krattinger. Voulez-vous moins de monde pour accompagner les personnes âgées ou les personnes handicapées ?
(Non ! sur les travées du groupe socialiste.)
Non !
Voulez-vous moins de transports scolaires, moins d'entretien dans les collèges et sur les routes ?
(Non ! sur les mêmes travées.)
Non !
Voulez-vous moins d'investissement avec pour conséquence plus de chômage dans les entreprises ?
(Non ! sur les mêmes travées.)
Non !
Le Gouvernement va-t-il enfin arrêter de stigmatiser les collectivités territoriales ? Monsieur le ministre, il faut faire confiance à l'intelligence des territoires !
(Bravo ! et applaudissements vifs et prolongés sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Philippe Richert, ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, chargé des collectivités territoriales. Monsieur le sénateur, j'ai déjà eu l'occasion de répondre à votre collègue François Marc sur le contexte dans lequel le Gouvernement, avec le Président de la République, organise le sommet local.
Vous venez une nouvelle fois de démontrer que, en réalité, ce n'est pas le Gouvernement qui essaie de mettre en lumière les difficultés des collectivités, c'est vous qui, en permanence, dites au Gouvernement : donnez-nous plus !
(Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
M. Pierre Hérisson. Eh oui !
M. Philippe Richert, ministre. La seule chose que vous êtes capables de faire, c'est de demander davantage au Gouvernement et aux fonds publics pour répondre aux besoins.
(Protestations sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. François Rebsamen. Laissez-nous faire !
M. Philippe Richert, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, regardez la réalité ! La France, aujourd'hui, comme l'ensemble des pays, subit une crise, et il ne suffit pas de vous agiter d'un bout à l'autre du territoire pour tenter de convaincre la population, la main sur le cœur, que vous souhaiteriez faire plus, mais que l'État ne vous donne pas assez !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est vous qui donnez moins !
M. Philippe Richert, ministre. La réalité, c'est que nous devons ensemble faire l'effort d'une meilleure utilisation des deniers publics.
M. Yves Krattinger. C'est ce qu'on fait !
M. Didier Guillaume. Faites-nous confiance !
M. Philippe Richert, ministre. Nous ne pouvons pas faire autrement.
J'ai indiqué tout à l'heure le contexte dans lequel nous sommes. Malgré la baisse de 20 % de ses recettes, monsieur Krattinger,...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Pourquoi une baisse ? Il y aurait beaucoup à dire à ce sujet !
M. Philippe Richert, ministre. ... l'État garantit aux collectivités le même niveau de ressources qu'auparavant.
C'est une réalité, et dire le contraire, mesdames, messieurs, c'est nier cette réalité, c'est mentir !
(Applaudissements sur les travées de l'UMP. - Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
M. Didier Guillaume. Et le social dans les départements ?
M. Philippe Richert, ministre. En 2009, l'État a reversé aux collectivités 98 milliards d'euros ; en 2010, 99 milliards d'euros ; en 2011, 100 milliards d'euros ; en 2012, il s'agira de 101 milliards d'euros. Certes, ce n'est qu'un milliard d'euros de plus par an, mais, dans une période où l'État a 20 % de recettes en moins...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. L'État a transféré de nombreuses charges !
M. Philippe Richert, ministre. ... lui faire le reproche de tenir son engagement et de n'augmenter son reversement « que » de un milliard d'euros par an, c'est un peu fort !
Ce n'est pas sérieux, monsieur Krattinger ! On n'a pas le droit de dire de telles choses !
M. Pierre Hérisson. Très bien ! C'est de la mauvaise foi !
M. Philippe Richert, ministre. Par ailleurs, je sais bien, monsieur Krattinger, que les collectivités ne représentent que 10 % à 15 % de la dette globale.
(Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
M. François Rebsamen. Non : 10 % !
M. Philippe Richert, ministre. Mais ces 10 % à 15 % s'ajoutent, bien sûr, aux dettes, notamment de l'État.
Aujourd'hui, lorsqu'il reverse aux collectivités 100 milliards d'euros, l'État est obligé d'emprunter.
(Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste.)
Il est donc vrai que ce ne sont pas les collectivités qui empruntent, mais l'État, lui, est contraint à l'emprunt, pour reverser l'argent aux collectivités.
(Protestations sur les travées du groupe CRC, du groupe socialiste et du groupe écologiste.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est faux !
M. Philippe Richert, ministre. D'où le besoin d'un vrai débat, un débat ouvert, pour en finir avec ces incessants reproches. C'est ce que propose le Président de la République, c'est ce que propose le Gouvernement.
M. Jean-Pierre Michel. Plus pour longtemps !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous avez été battus aux sénatoriales !
M. Philippe Richert, ministre. C'est cette rencontre que nous souhaitons pour demain !
(Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Pierre Hérisson. Très bien !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Les réformes de Nicolas Sarkozy ont été balayées !
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