M. Daniel Percheron attire l'attention de M. le secrétaire d'État chargé du commerce extérieur sur la récente pénétration de l'industrie automobile coréenne en Europe et en France qui amène à se poser les traditionnelles questions liées au libre-échangisme irresponsable de la Commission européenne : quels sont les tarifs exacts depuis le récent accord passé entre la Corée et l'Union européenne qui conditionne l'accès du marché français aux automobiles européennes ?
Quel est l'état exact du juste échange entre la France et la Corée dans le secteur automobile ?
Quels sont respectivement les investissements français en Corée et coréen en France consacrés au secteur automobile ?
La région Nord-Pas-de-Calais, provisoirement forte de ses 55 000 emplois dans l'industrie automobile – fabrication et sous-traitance – peut-elle dormir encore longtemps sur ses deux oreilles de grande région industrielle offerte à la concurrence mondiale ?
Le marché européen, et donc français, occupe une place limitée dans l'orientation des exportations coréennes. La Corée est actuellement le cinquième producteur automobile mondial avec plus de six millions de véhicules produits en 2010 et réalise 70 % de ses ventes à l'exportation (29 Md$ sur les onze premiers mois de 2010), essentiellement à destination des États-Unis. Le marché local, le treizième mondial avec 1,5 million de véhicules vendus en 2010, est en constante expansion. Il est aussi l'un des plus fermés au monde avec des droits de douane élevés (8 %) et des barrières non tarifaires dénoncées par les constructeurs étrangers. Bien qu'en forte progression en 2010 (+ 29 %), les importations demeurent encore marginales (2,7 Md$ sur les onze premiers mois de 2010). Les constructeurs coréens visent d'abord le marché américain qui a absorbé 21 % des exportations coréennes en 2010 (6 Md$ sur les onze premiers mois). L'Australie est le second client de la Corée (1,8 Md$ en 2010 soit 6 % des exportations) et le Brésil arrive en troisième position (1,8 Md$ en 2010, soit 6 % des exportations). Suivent la Russie (1,7 Md$), la Chine (1,4 Md$) et le Canada (1,3 Md$). En 2010, la France n'est que le dix-septième acheteur mondial de la Corée et le troisième européen (430 M$) après l'Allemagne (treizième importateur mondial et premier européen avec 480 M$) et le Royaume-Uni (quatorzième avec 470 M$). Par zone commerciale, l'Amérique du Nord est donc le premier débouché de la Corée (30 %), devant le Moyen-Orient (18,5 %), l'Union européenne (15 %) et l'Amérique latine (13 %). La Corée a exporté pour 2,7 Md$ en 2009 vers l'Union européenne (300 000 véhicules) et 3 Md$ (265 000 véhicules) sur les onze premiers mois de l'année 2010. Le premier fournisseur de la Corée, pour 57 % des importations coréennes, est l'Allemagne (1,1 Md$ avec 31 000 véhicules exportés en 2009), suivie du Japon (21 % des importations) et des États-Unis (7 %). La France est le sixième fournisseur de la Corée avec un seul exportateur, PSA. Les importations coréennes de véhicules français se sont contractées en 2009 (20 M$) pour repartir sur les onze premiers mois de l'année 2010 (37 M$, soit 1 % des importations totales de véhicules). La présence française en Corée, dans le secteur automobile, se caractérise par les positionnements très différenciés des deux constructeurs nationaux. Renault Samsung Motors est le deuxième investisseur automobile étranger en Corée, avec un investissement cumulé de 1 Md$, et s'est hissé au rang de deuxième constructeur « local » en parts de marché derrière le leader coréen Hyundai-Kai. La Corée est aujourd'hui le septième marché en volume du constructeur français et une base industrielle majeure pour l'alliance Renault-Nissan. PSA constitue le seul exportateur français de véhicules en direction de la Corée (avec plus de 1 900 véhicules immatriculés en Corée en 2010) et souffre de la particularité des normes coréennes qui ne reconnaissent pas la norme OBD européenne. Peugeot a également été pénalisé sur le marché coréen par ses modèles peu automatisés et sa spécialisation en diesel (peu populaire en Corée). Toutefois, les perspectives 2011 sont positives avec le lancement prévu de nouveaux modèles sur le marché coréen, qui devraient contribuer à améliorer son positionnement sur ce marché. Par ailleurs, Peugeot sera l'un des tout premiers bénéficiaires européens de l'accord de libre-échange (ALE) conclu entre l'Union européenne et la Corée. L'ALE améliorera nettement les positions des constructeurs français sur le marché coréen et sa mise en oeuvre ne menace pas directement le marché français. L'ALE entre l'Union européenne et la Corée, en vigueur le 1er juillet 2011, permettra à l'Union européenne d'engranger une augmentation de ses exportations de biens et de services de 19 Md$ (soit 60 % d'augmentation de ses exportations) et de doubler le commerce de l'Union européenne-Corée du Sud au cours des vingt prochaines années. Le démantèlement effectif des droits de douane coréens répond aux intérêts de l'Union européenne et donc de la France. 1,6 Md€ de droits de douane devraient être supprimés sept ans après l'entrée en vigueur de l'accord (850 M€ de droits supprimés immédiatement). Pour les produits industriels, alors que les droits de douane sont actuellement de 7 % en moyenne avec d'importants pics tarifaires à 20 %, ils seront réduits à 0 pour 85 % des lignes tarifaires dès l'entrée en vigueur de l'accord et pour 100 % de ces lignes au bout de sept ans. S'agissant du secteur automobile, le résultat de l'accord apparaît équilibré du point de vue de l'Union européenne. Au terme de la négociation, l'Union européenne a obtenu la levée des nombreuses barrières non tarifaires coréennes qui entravent le développement des exportations. Cela contribuera à améliorer la part des constructeurs européens sur le marché coréen (aujourd'hui, la part des constructeurs étrangers n'est que de 6 %). Le marché automobile coréen est en effet l'un des plus fermés au monde, en raison des normes coréennes mêlant normes européennes et américaines, qui imposent des modifications coûteuses aux constructeurs étrangers pour des volumes encore réduits. Aujourd'hui, deux barrières principales (normes de sécurité UNECE et normes OBD) sont résolues par l'ALE, tandis qu'une troisième (normes sur les émissions de CO2, fixant un standard minimum en termes d'efficacité énergétique) a fait l'objet d'un accord entre la Commission européenne et la Corée pour assurer un contingent en dérogation des normes environnementales coréennes. Peugeot bénéficiera d'un quota d'importation, en progression constante jusqu'en 2014, de véhicules assemblés en dérogation à la norme coréenne OBD. Sur le plan défensif, l'ALE protège également les intérêts européens sur une durée significative via un démantèlement graduel des droits de douane européens, en particulier sur le segment des petites voitures. L'accord prévoit ainsi l'élimination des droits de douanes coréens sur les véhicules en deux temps : trois ans après l'entrée en vigueur de l'ALE pour les cylindrées supérieures à 1 500 cc, cinq ans après l'entrée en vigueur de l'ALE pour les cylindrées inférieures à 1 500 cc. Enfin, pour préserver les intérêts de son industrie et ses emplois, la France a obtenu au niveau de l'Union européenne des clauses de sauvegarde protectrices de certains secteurs sensibles dont l'automobile : d'une part, une clause de sauvegarde générale visant à faire face à une éventuelle augmentation soudaine des importations de véhicules en provenance de Corée et, d'autre part, une clause de sauvegarde se déclenchant automatiquement dès lors que les produits coréens incorporeraient une part croissante d'inputs tiers (chinois, japonais) dans des conditions non prévues dans l'accord.
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