Mme Colette Giudicelli attire l'attention de M. le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social sur le système du détachement dans le secteur du bâtiment et des travaux publics. Ce système permet à une entreprise étrangère, de manière temporaire, moyennant certaines formalités et en respectant certaines règles du droit du travail français constituant un noyau dur, de rester rattachées à leurs pays d'origine pour ce qui est notamment de la protection sociale et des autres règles du droit du travail auxquelles elles ne sont pas astreintes par le droit français. Le régime du détachement a été fixé par la directive 96/71/CE du 16 décembre 1996. Il concerne toutes les entreprises établies en Europe ou dans un pays tiers qui viennent effectuer une prestation de service pour un maître d'ouvrage (public ou privé) ou pour une entreprise, dans le cas d'un contrat de sous-traitance. La possibilité pour les entreprises étrangères de rester rattachées aux caisses de protection sociale de leur pays leur permet donc de bénéficier de coûts salariaux très inférieurs à ceux pratiqués par les entreprises françaises. Cette législation européenne entraîne donc des difficultés pour nos entreprises, qui sont malgré tout bien obligées de s'y conformer alors même qu'il existe une distorsion dans le coût global du travail. En revanche, les entreprises françaises de BTP sont de plus en plus exaspérées par le caractère qui leur apparaît inopérant des contrôles qui sont effectués au sein des entreprises étrangères par les pouvoirs publics et organismes sociaux, ce qui permet à ces dernières de s'exonérer des obligations légales et réglementaires en toute impunité. De plus en plus nombreuses sont celles qui alertent les autorités publiques sur des cas de non-respect de la déclaration préalable auprès de l'inspection du travail, seul moyen pour l'administration d'être informée de l'entrée sur le territoire d'une entreprises étrangère, en dehors d'opérations ponctuelles sur les chantiers. Plusieurs autres cas relevés concernent l'exercice d'une activité pérenne en France, et donc non temporaire, sans ouvrir d'établissement secondaire dans notre pays ; l'inexistence d'une activité réelle dans le pays d'origine (sociétés « boites aux lettres » permettant d'invoquer le détachement) ; ou encore le remplacement de salariés en fin de période de détachement par d'autres salariés venant poursuivre la même activité (ce qui est contraire aux règles du détachement). Rien que dans le département des Alpes-Maritimes, ce sont ainsi près de 5 000 entreprises représentant 24 500 salariés qui sont mises en péril du fait de cette concurrence déloyale. Elle lui demande donc quelles mesures il entend prendre d'urgence afin de renforcer les contrôles des pouvoirs publics et des organismes sociaux, dans le but de protéger un secteur économique à fort taux d'embauche et d'une grande importance stratégique pour notre pays.
La loi n° 2014-790 du 10 juillet 2014 visant à lutter contre la concurrence sociale déloyale apporte plusieurs réponses aux détournements observés ces dernières années en matière de détachement transnational de travailleurs. À titre principal : elle instaure des obligations nouvelles, tant vis-à-vis de l'entreprise étrangère qui détache des travailleurs, qu'à l'égard du donneur d'ordre ou du maître d'ouvrage français qui accueille des travailleurs détachés ; elle renforce les moyens et les pouvoirs des agents de contrôle (inspection du travail, agents de police judiciaire, agents des organismes de sécurité sociale...) ; elle institue la responsabilité solidaire entre le donneur d'ordre et le sous-traitant, qu'il s'agisse du paiement du salaire minimum, des indemnités et charges diverses, comme du respect des autres aspects de la législation du travail. Enfin, la loi ne couvre pas seulement le secteur du BTP, mais tous les autres secteurs concernés par le détachement, notamment l'agroalimentaire et les transports.
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