Mme Joëlle Garriaud-Maylam attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur l'affaiblissement du dispositif de prévention des déplacements illicites d'enfants engendré par le décret n° 2012-1037 du 10 septembre 2012 relatif à la mise en œuvre de l'interdiction de sortie du territoire du mineur sans l'autorisation des deux parents.
Ce décret fixe les dispositions nécessaires à l'application du troisième alinéa de l'article 373-2-6 du code civil qui dispose que le juge aux affaires familiales peut ordonner l'interdiction de sortie de l'enfant du territoire français sans l'autorisation des deux parents, interdiction qui est inscrite au fichier des personnes recherchées par le procureur de la République.
L'inscription d'un mineur dans ce fichier était autrefois simple et gratuite : il suffisait au parent concerné de se rendre une fois par an à la préfecture du lieu de domicile et d'y présenter le jugement fixant le droit de garde, la résidence habituelle de l'enfant et l'interdiction de sortie du territoire sans l'accord des deux parents. Désormais, cette démarche ne peut plus être réalisée à la préfecture : le parent concerné doit, à chaque demande, saisir le juge aux affaires familiales en complétant un dossier disponible au tribunal de grande instance. Il lui faut alors s'acquitter d'un timbre fiscal de 35 euros et rassembler, à nouveau, différents justificatifs. Ce nouveau dispositif crée des délais qui, dans les affaires d'enlèvements internationaux d'enfants, peuvent avoir des conséquences dramatiques. Le fait que l'autre parent - même lorsque l'autorité parentale lui a été retirée - soit averti par le juge du lancement de la démarche, peut lui laisser le temps de perpétrer un tel enlèvement.
Elle demande s'il ne serait pas envisageable de compléter le décret afin de prévenir un tel effet pervers. Elle souligne que l'accessibilité et la réactivité du dispositif empêchant la sortie du territoire national de mineurs risquant un enlèvement parental sont des éléments essentiels pour la prévention des déplacements illicites d'enfants, comme le montrent les pratiques de multiples autres pays (Allemagne, Etats-Unis, etc.).
La loi n° 2010-769 du 9 juillet 2010 relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants, a modifié l'article 373-2-6 du code civil. Aux termes de celui-ci, le juge aux affaires familiales peut ordonner l'interdiction de sortie du territoire français sans l'autorisation des deux parents et cette interdiction est inscrite au fichier des personnes recherchées (FPR) afin d'assurer l'effectivité de la mesure. Le décret n° 2012-1037 du 10 septembre 2012 relatif à la mise en œuvre de l'interdiction de sortie du territoire du mineur sans l'autorisation des deux parents prévoit les dispositions d'application nécessaires à la mise en œuvre de cette inscription sur le fichier des personnes recherchées. Il instaure ainsi une information entre le service du greffe des affaires familiales et le ministère public. Ainsi en application de l'article 1180-3 du code de procédure civile, lorsque le juge prononce ou modifie une mesure d'interdiction de sortie du territoire d'un enfant sans l'autorisation de ses deux parents, le greffe du juge aux affaires familiales en avise aussitôt le procureur de la République, qui fait inscrire cette mesure au fichier des personnes recherchées (FPR) ou fait procéder à la modification de l'inscription. Ce nouveau dispositif permet d'une part, que la mesure d'interdiction de sortie du territoire soit inscrite sans délai par le procureur de la République au FPR pour la durée mentionnée par le juge ou, à défaut de durée, jusqu'à une nouvelle décision ou jusqu'à la majorité de l'enfant. Le parent qui a sollicité l'interdiction de sortie du territoire n'est donc ni contraint de solliciter le renouvellement de la mesure chaque année, ni en charge de solliciter l'inscription de la mesure au FPR. D'autre part, l'inscription de la mesure au FPR demeure gratuite. Si effectivement, la saisine du juge emporte l'acquittement de la contribution pour l'aide juridique de 35 euros exigée de tout demandeur lors de l'introduction d'une instance civile, il convient de souligner que le 1° du III de l'article 1635 bis Q du code général des impôts dispense expressément du paiement de ladite contribution tous les bénéficiaires de l'aide juridictionnelle, que celle-ci soit partielle ou totale. De plus, la contribution pour l'aide juridique est comprise dans la liste des dépens, de sorte que, dans le cas où le demandeur initial assujetti à la contribution obtiendrait gain de cause, le juge, en application de l'article 696 du code de procédure civile, condamnera la partie perdante aux dépens qui comprendront de plein droit cette contribution, sauf à ce que le juge par décision motivée n'estime qu'il convient d'en mettre la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. En outre, la garde des sceaux recherche actuellement les moyens de supprimer cette contribution mise à la charge des justiciables. Par conséquent, le dispositif actuel parait assurer une protection efficace pour lutter contre les déplacements illicites d'enfants.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.