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François Grosdidier
Question écrite N° 5768 au Ministère de l'économie


Présence de résidus de pesticides et de médicaments dans les eaux minérales

Question soumise le 11 avril 2013

M. François Grosdidier attire l'attention de M. le ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation, sur la présence des traces de pesticides et de médicaments décelées dans environ 10 % des eaux minérales, selon une étude de l'association « 60 millions de consommateurs » et de la Fondation France Libertés. L'analyse a porté sur 47 bouteilles d'eau, trois bonbonnes d'eau et une dizaine d'échantillons d'eau du robinet, prélevés dans trois départements. Sur les bouteilles d'eau étudiées, 37 ne présentaient aucune trace des 85 molécules recherchées. Dix, en revanche, contenaient des résidus chimiques et pharmaceutiques. L'analyse a aussi relevé la présence de tamoxifène, hormone de synthèse utilisée dans le traitement du cancer du sein, dans la Mont Roucous, Saint-Yorre, Salvetat, Saint Amand et Carrefour Discount (Céline Cristaline). Elle a aussi relevé la présence de vasodilitateurs buflomédil dans l'eau Hépar et naftidrofuryl dans l'eau Saint Amand, ainsi que des désherbants interdits depuis 2001, atrazine et hydroxyatrazine, dans la Vittel (Grande source), la Volvic (Clairvic), la Cora (Saint-Pierre) et la Cristaline (Louise). Dans les trois bonbonnes, ont été relevées des traces de diéthylphtalate dans l'Obio, et de bisphénol A, d'atrazine et de retardateur de flamme dans la Culligan. Certes la teneur est faible et ne remet pas en cause la potabilité. Cependant, la variété de ces résidus peut entraîner des effets cocktail très préjudiciables à la santé humaine. Enfin, la présence de ces résidus, aussi faible soit-elle, contrevient à la règlementation sur les eaux commercialisées comme minérales. Les responsabilités ne sont pas nécessairement celles des embouteilleurs et peuvent se situer plus en amont. Il lui demande quelles mesures le Gouvernement compte prendre pour vérifier la pureté des eaux minérales ou de source et ne plus interdire effectivement la commercialisation des eaux ne répondant pas à ces critères. Il lui demande aussi si le Gouvernement entend, par la voie administrative ou par la voie judiciaire, rechercher et identifier les responsabilités sur cette tromperie des consommateurs.

Réponse émise le 22 août 2013

D'une façon générale, trois types d'eau peuvent être conditionnés : l'eau minérale naturelle, l'eau de source et l'eau rendue potable par traitements. Ces eaux se distinguent par les critères de qualité qu'elles doivent respecter et les traitements dont elles peuvent faire l'objet. Ainsi, une eau minérale naturelle et une eau de source sont des eaux souterraines, microbiologiquement saines, qui doivent être tenues à l'abri de tout risque de pollution. Les eaux conditionnées en France doivent être conformes à la réglementation européenne relative aux eaux destinées à la consommation humaine et aux eaux minérales, transposée en droit français dans le code de la santé publique (CSP). Elles sont soumises à plusieurs niveaux de contrôles réguliers qui reposent sur la surveillance journalière effectuée par l'exploitant et sur l'action de contrôle des autorités sanitaires régionales. Afin de vérifier le respect des dispositions législatives et réglementaires prévues par le CSP, conformément aux articles R. 1321-15 et R. 1322-40 de ce code, un contrôle sanitaire des eaux conditionnées est mis en place sous l'égide des agences régionales de santé (ARS), au même titre que pour l'eau du robinet. Le contrôle sanitaire comprend notamment l'inspection des installations, le contrôle des mesures de sécurité sanitaire mises en œuvre par l'exploitant et la réalisation d'un programme d'analyses de la qualité de l'eau. Au total, plus de 70 paramètres réglementés peuvent être recherchés ; il s'agit notamment de paramètres microbiologiques, physicochimiques, minéraux, organiques et de paramètres indicateurs de radioactivité. En outre, les directions départementales de la cohésion sociale et de la protection des populations procèdent à des inspections et contrôles complémentaires et s'assurent de la loyauté de l'information délivrée au consommateur. Récemment, un article de presse a fait mention d'analyses réalisées qui auraient mis en évidence la présence de traces infinitésimales de substances pharmaceutiques dans un certain nombre d'eaux minérales naturelles et d'eaux de source. Les modalités de réalisation de cette enquête privée ne sont pas connues des autorités sanitaires françaises et ne permettent pas de vérifier la pertinence de ces résultats. A ce jour, il n'y a pas lieu de remettre en cause la sécurité sanitaire ni la commercialisation des eaux conditionnées en France. Par ailleurs, la réglementation sur les eaux est en constante évolution. Pour l'instant, les substances pharmaceutiques ne font pas partie des paramètres de surveillance décidés au niveau européen et leur mesure n'est pas intégrée au contrôle sanitaire des eaux assuré par les ARS. Cependant, les résultats des analyses réalisées dans le cadre du contrôle sanitaire sont intégrés par les ARS dans la base « SISE-Eaux », base de données nationale du ministère chargé de la santé. Chaque année, une synthèse de ces données est communiquée à la Commission européenne, conformément aux dispositions prévues par la réglementation européenne. Pour améliorer le suivi sanitaire des eaux, la direction générale de la santé lance régulièrement des campagnes exploratoires d'analyses de certaines substances non réglementées dans les ressources en eau utilisées pour la production d'eau destinée à la consommation humaine et notamment les résidus de médicaments pour lesquels un plan national sur les résidus de médicaments dans les eaux (PNRM 2011-2015) a été publié en mai 2011. Sur ce sujet, le ministère chargé de la santé avait lancé, dès septembre 2009, en collaboration avec le laboratoire d'hydrologie de Nancy rattaché à l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES), une campagne nationale de mesure de 45 substances pharmaceutiques d'origine humaine ou vétérinaire ou de leurs métabolites dans les eaux non conditionnées, sur la base d'une liste établie par l'ANSES et l'agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) devenue depuis l'agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM). Les principales familles thérapeutiques de médicaments y étaient représentées (hormones, médicaments cardiovasculaires, antibiotiques, neuroleptiques, anticancéreux, anti-inflammatoires non stéroïdien). Les prélèvements ont été effectués sur des ressources utilisées pour la production d'eau destinée à la consommation humaine (eau de surface et eau souterraine) et sur des eaux traitées, en sortie de station de potabilisation. Cette campagne avait pour objectif d'estimer l'occurrence des résidus de médicaments permettant de disposer de données pour l'évaluation de l'exposition de l'homme via les eaux destinées à la consommation humaine. Les résultats de cette étude publiés en février 2011, consultables sur les sites internet du ministère chargé de la santé et de l'ANSES, ont montré que pour environ 75 % des échantillons d'eau traitée, qu'elle soit d'origine souterraine ou superficielle, aucune des 45 molécules recherchées n'a été quantifiée. Pour les 25 % d'échantillons restants, les analyses révèlent la présence simultanée d'une à quatre molécules à des concentrations dans les eaux traitées qui sont 1 000 à 1 million de fois inférieures aux doses utilisées dans le cadre des doses thérapeutiques. En outre, à la demande du ministère chargé de la santé, une enquête nationale sur la qualité des eaux conditionnées vis-à-vis de la présence de substances dites « émergentes » (dont les résidus de médicaments) est en cours depuis le début de l'année 2012. Une méthode d'évaluation des risques sanitaires liés à la présence de ces substances dans l'eau destinée à la consommation humaine, proposée par l'ANSM et l'ANSES et appliquée à la carbamazépine (médicament humain) et à la danofloxacine (médicament vétérinaire), viendra très prochainement compléter ces travaux ; elle sera ensuite appliquée aux autres molécules identifiées lors de la campagne nationale sus mentionnée. En conséquence, il est encore nécessaire d'acquérir des connaissances sur le sujet de la présence de micropolluants dans l'environnement, dont les résidus de médicaments aux doses mentionnées auparavant et aux dangers et risques environnementaux et sanitaires qui y seraient potentiellement associés. Il convient également de s'assurer de la capacité analytique des laboratoires réalisant les diverses campagnes analytiques. C'est au terme de ces travaux que des recommandations adéquates et proportionnées pourront être proposées.

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