Mme Joëlle Garriaud-Maylam interroge M. le ministre délégué auprès du ministre des affaires étrangères, chargé du développement, sur la décision française de se retirer fin 2014 de l'Organisation des Nations unies pour le développement industriel (ONUDI).
Elle rappelle que l'ONUDI, créée en 1966, a pour mission de promouvoir l'industrialisation des pays du Sud. À ce titre, elle joue un rôle essentiel dans la poursuite des objectifs du millénaire pour le développement en matière de lutte contre la pauvreté et de développement humain. Travaillant en étroite coopération avec le secteur privé, elle a également une mission importante en matière de promotion d'un développement économique plus respectueux de l'environnement et plus économe en énergie.
Elle s'interroge sur la pertinence d'un retrait français de cette organisation, justifiée lors d'un point presse d'avril 2013 par un souci de « maîtrise du budget consacré aux contributions internationales ». Le coût stratégique et symbolique d'un retrait total de la France n'est-il pas disproportionné par rapport aux économies envisagées ? En 2012, la contribution française à l'ONUDI n'a en effet été que de 7,1 millions d'euros ... alors que les contributions globales de la France au système des Nations unies atteignaient environ 850 millions d'euros. Le retrait d'une organisation onusienne est un acte lourd - à l'instar de la décision des États-Unis de se retirer de l'UNESCO, en 2011, suite à la reconnaissance de la Palestine à l'ONU - pour lequel la seule justification budgétaire apparaît faiblement crédible. Elle souhaiterait donc connaître l'ensemble des considérations qui ont poussé à sanctionner l'ONUDI - dont la qualité du travail a pourtant toujours été saluée par la communauté internationale (une évaluation de neuf organisations multilatérales effectuée en 2011 par l'Agence de développement norvégienne avait classée l'ONUDI comme la meilleure agence dans sa catégorie) - plutôt qu'une autre des 263 organisations internationales habilitées à recevoir des apports d'aide publique au développement, dont une soixantaine ont été créés au cours des vingt dernières années.
Elle s'étonne également que le Parlement n'ait pas été associé à une décision aussi importante pour la diplomatie d'influence française et regrette qu'a minima il n'ait pas été informé en amont de l'intention du Gouvernement de procéder à un tel retrait et de l'ensemble des raisons ayant conduit à une telle décision. Elle rappelle que l'un des engagements de campagne du président de la République portait sur le vote par le Parlement d'une loi de programmation et d'orientation définissant les priorités de notre politique de coopération, et s'étonne donc que le retrait d'une organisation internationale soit intervenu avant même qu'une telle loi cadre ne soit soumise au débat parlementaire. Elle demande donc s'il ne serait pas opportun que tout futur retrait d'un organisme international puisse, à l'avenir, faire l'objet d'un débat préalable devant le Parlement.
La décision de la France de se retirer fin 2014 de l'Organisation des Nations unies pour le développement industriel (ONUDI) a été prise dans un contexte budgétaire de très fortes contraintes. Elle intervient alors qu'un nombre croissant de nos partenaires (États-Unis, Canada, Australie, Nouvelle-Zélande, des États membres de l'UE dont le Royaume-Uni) se sont déjà retirés de l'ONUDI ou envisagent de le faire, chaque retrait de pays ayant pour conséquence mécanique une augmentation de la part contributive des États membres restants. Le retrait d'une organisation internationale, qui doit s'entendre comme une mesure de dernier ressort, constitue une mesure très visible des économies réalisées sur le programme 105 « Action de la France en Europe et dans le monde », mais elle fait partie d'un ensemble d'économies dans le domaine du pilotage du système multilatéral et des contributions internationales. En premier lieu, le ministère s'attache à redéfinir la capacité à contribuer de la France par une révision des méthodologies, des barèmes des contributions, en considération du poids réel de l'économie française dans l'ensemble mondial. En second lieu, le ministère maintient et fait partager par ses partenaires une ligne promouvant de nouveaux modes et normes de gestion, plus économes et plus responsables, par les institutions internationales (croissance nominale zéro des budgets, contrôle des dépenses de personnel, recentrage sur le cœur des mandats et coordination des activités des différents organismes existants). Il s'agit prioritairement de définir en concertation avec toutes les parties prenantes, une nouvelle architecture du système multilatéral, plus performante et moins redondante, qui soit soutenable financièrement dans la durée. Le retrait français de l'ONUDI, qui ne sera effectif qu'après le 1er janvier 2015, doit ainsi s'entendre comme un signal et est sans incidence sur l'engagement de la France en faveur du développement économique et social, du développement humain et du développement durable, ainsi que sur les politiques et ambitions françaises en matière d'aide publique au développement. Cette décision réaffirme l'attachement de la France à la maîtrise de ses contributions internationales, objectif pour lequel aucune option n'est fermée. Le ministre délégué auprès du ministre des affaires étrangères, chargé du développement, confirme que le Département, qui soutient les processus d'évaluation au sein des organisations internationales, s'engage également dans une démarche nationale d'évaluation, à moyens existants, par le biais de ses représentations permanentes. Ces travaux visent la maîtrise des budgets et la soutenabilité globale du système multilatéral, à la légitimité et à l'efficacité duquel la France demeure très attachée. Par ailleurs, le président de la République a annoncé, en clôture des assises du développement et de la solidarité internationale, une loi d'orientation et de programmation sur le développement. Cette loi sera l'occasion pour le Parlement de débattre des grandes orientations stratégiques de la politique française de développement dont la composante multilatérale est essentielle.
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