Mme Mireille Schurch attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement, sur le sort de beaucoup d'éleveurs qui ont fait le choix de ne pas vacciner leur troupeau. Leurs revendications et leurs inquiétudes lui semblent légitimes.
Ainsi, une des idées contenues dans le texte de l'ordonnance n° 2011-862 du 22 juillet 2011, relative à l'organisation de l'épidémiosurveillance, de la prévention et de la lutte contre les maladies animales et végétales et aux conditions de délégation de certaines tâches liées aux contrôles sanitaires et phytosanitaires, est la constitution d'instances de consultation qui ont vocation à constituer de véritables « parlements du sanitaire » comme le précise la note de service de la direction générale de l'alimentation en date du 14 mars 2013.
Cette idée est séduisante, mais les membres qui vont siéger à ce « parlement » toujours selon cette note, sont, très majoritairement les défenseurs et les promoteurs de l'élevage intensif et de l'agriculture industrielle. Plusieurs d'entre eux y ont aussi des intérêts économiques. Le conflit d'intérêts est là.
Dans ces conditions, les méthodes de prophylaxie des élevages extensifs ou biologiques n'ont aucune chance d'être reconnues et mises en œuvre.
Les éleveurs et les vignerons pratiquant des méthodes de prophylaxie alternatives, respectueuses du vivant, seront, plus qu'aujourd'hui encore, dans l'illégalité.
Car l' article L. 201-10 du code rural et de la pêche maritime, créé par l'article premier de l'ordonnance n° 2011-862 du 22 juillet 2011, prévoit que « les personnes qui sont propriétaires ou détenteurs d'animaux ou de végétaux au titre de leur activité professionnelle (...) sont tenues d'adhérer au réseau ».
Cela veut dire l'obligation d'adhérer, localement, à un groupement de défense sanitaire qui est une association type « loi 1901 » et donc l'obligation d'accepter ses statuts qui prévoient que les adhérents doivent se soumettre aux campagnes de prophylaxies mises en œuvre par le Groupement. Accessoirement, cette obligation d'adhérer transgresse le principe juridique de libre adhésion à une association type « loi 1901 » mais, au-delà, il convient de trouver une réponse acceptable pour ces éleveurs qui proposent des solutions de prophylaxie alternatives.
Après tout, cette idée d'une vaccination facultative mais strictement encadrée avait été évoqué par un ancien ministre de l'agriculture en février 2008. Vacciner indistinctement toutes les bêtes, c'est-à-dire vacciner même des bêtes déjà immunisées naturellement, n'est peut être pas une solution acceptable éthiquement et financièrement.
Elle lui demande si l'ordonnance impose un seul modèle de prévention, ce alors qu'il faudrait élargir les ressources thérapeutiques pour faire face à « l'émergence » de nouvelles pathologies.
Les vaccinations obligatoires sont peu fréquentes dans le contexte sanitaire actuel. Elles concernent des situations sanitaires bien précises, des maladies spécifiques, ou répondent à des exigences commerciales des pays vers lesquels les animaux sont exportés. L'émergence de la fièvre catarrhale ovine en 2007 a nécessité la mise en place d'une campagne nationale obligatoire de vaccination, la première depuis l'arrêt de la vaccination contre la fièvre aphteuse en 1991 pour les ruminants. Cette campagne visait un objectif d'éradication à court terme. Dans d'autres situations d'émergence de maladies nouvelles, l'outil vaccinal peut-être précieux pour éviter des mesures d'abattage. La possibilité de recourir pour protéger les animaux à la vaccination constitue en ce sens une extension des stratégies de lutte contre les maladies prise en compte dans le futur règlement-cadre sur la santé animale en cours de négociation. À propos des exigences commerciales, selon les maladies et les pays importateurs, la vaccination obligatoire de certains types d'animaux (par exemple les cheptels non qualifiés en matière d'IBR) sera parfois exigée, bien que l'exigence de non vaccination soit plutôt la règle. Il faut donc bien tenir compte du contexte d'une part, et de l'objectif de vaccination d'autre part. La vaccination d'urgence concernera des maladies réglementées et le plus souvent un objectif de lutte. La vaccination préventive concernera aujourd'hui plutôt des maladies non réglementées. Ce type de vaccination doit être réfléchie à une échelle collective qui pour des raisons d'efficience ne peut prendre en compte la variabilité des statuts individuels des animaux au sein des troupeaux. La création par l'ordonnance n° 2011-862 du 22 juillet 2011 des conseils régionaux d'orientation de la politique sanitaire animale et végétale (CROPSAV) permet de renforcer à l'échelon régional la responsabilisation des professionnels de l'élevage. Les CROPSAV sont des instances de consultation, ils doivent donner des avis au préfet de région, en permettant l'expression de tous les professionnels. Le choix d'une vaccination obligatoire ne dépendra jamais du seul CROPSAV, et sera remonté par le préfet pour avis au niveau du CNOPSAV national où à nouveau toutes les voix peuvent se faire entendre, avant un arbitrage ministériel final. Les CROPSAV ne sont pas des structures opérationnelles mais lorsqu'une latitude locale est donnée dans un arrêté, ils constituent un lieu de concertation. Les réseaux prévus à l'article L. 201-10 du code rural et de la pêche maritime ne sont pas des associations loi 1901. Ils sont placés sous l'autorité administrative et créés par arrêté ministériel. Les réseaux de surveillance imposent l'adhésion de tous les propriétaires ou détenteurs des animaux concernés au réseau (selon leur type d'activité et leur zone d'activité) et une cotisation prélevée par l'organisme gestionnaire du réseau. La participation aux actions du réseau peut se faire par voie directe ou intermédiée (via une structure professionnelle) sans obligation sur l'une ou l'autre voie. Pour chaque réseau, le champ d'action, le type d'adhérent concerné, les modalités de fonctionnement (collecte, traitement et diffusion des données) et le type de missions confiées sont précisés par arrêté ministériel (article D. 231-7). L'hypothèse de la constitution d'un réseau national par filière ne signifie pas d'imposer « un seul modèle de prévention » mais plutôt de créer un cadre d'harmonisation permettant d'optimiser les échanges de données entre professionnels, quels que soient leurs modes d'activité, et les services de l'État, au profit de mesures de surveillance et de prévention qui bénéficient à tous les acteurs.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.