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Vincent Delahaye
Question crible thématique N° 14 au Ministère du budget


La dépense publique

Question soumise le 9 novembre 2012

M. Vincent Delahaye. La tentation de la gauche est, la plupart du temps, de résoudre les tensions budgétaires par l'impôt plutôt que par la réduction des dépenses. Il faut bien dire, monsieur le ministre, qu'avec le projet de budget pour 2013, vous confortez ce préjugé.

Sur 30 milliards d'euros à trouver en 2013 pour ramener notre déficit budgétaire à 3 % du PIB, 20 le seront par le biais d'impôts nouveaux et 10 seulement par une prétendue réduction des dépenses publiques. C'est là un mauvais message que porte votre premier budget.

Quant aux crédits du budget général, hors service de la dette et pensions, leur montant reste inchangé par rapport à l'an dernier, soit 278 milliards d'euros. Ainsi donc, pour vous, ne pas dépenser plus, c'est déjà économiser…

Pour moi, réduire les dépenses, c'est dépenser moins, comme vous le proposez d'ailleurs aux collectivités locales. C'est donc avoir le courage d'engager de vraies réformes structurelles, des réformes qui remettront profondément en question les missions de l'État, si l'on ne veut pas rester les champions d'Europe des dépenses publiques.

Mais continuons d'affiner notre analyse : sur ces 278 milliards d'euros, 75 correspondent à des prélèvements de recettes au bénéfice de l'Union européenne et des collectivités locales et 4 à des taxes affectées ; reste donc une véritable marge de manœuvre d'environ 200 milliards d'euros.

Monsieur le ministre, puisque vous nous dites depuis plusieurs mois que l'effort sur les dépenses est à venir, puisque le candidat Hollande, parmi tant de promesses, a fait celle de stabiliser les effectifs de la fonction publique d'État et ceux de ses opérateurs, puisque les dépenses de personnel, d'environ 100 milliards d'euros, augmentent mécaniquement chaque année de 2 % du fait de l'incidence du glissement vieillesse-technicité et des mesures catégorielles, puisque vous vous glorifiez cette année d'une bonne maîtrise de ces dépenses alors que la stabilité de la masse salariale en 2013 résultera, pour l'essentiel, de l'effet en année pleine des suppressions de postes votées lors de l'élaboration de la loi de finance initiale de 2012, auxquelles vous vous étiez fortement opposé, pouvez-vous nous expliquer comment vous comptez accroître dans les prochaines années votre effort sur les dépenses tout en maintenant les effectifs constants ?
(Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

Réponse émise le 9 novembre 2012

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Monsieur le sénateur, je voudrais d'abord rappeler ce que je crois être des éléments factuels difficilement contestables concernant les hausses d'impôts.

L'effort demandé par le Gouvernement porte, en année pleine et pour 2013, sur un montant d'un peu moins de 25 milliards d'euros d'impôts, ce qui est beaucoup, je vous l'accorde.

Mais l'importance de ce chiffre doit être rapportée à l'ampleur des impôts nouveaux décidés par le précédent gouvernement et que vous aviez peut-être votés : le plan Fillon I représentait un effort de 11 milliards d'euros, assorti de 1 milliard d'euros d'économies ; le plan Fillon II prévoyait 8 milliards d'euros d'impôts nouveaux, sans économies supplémentaires ; si l'on ajoute à cela les mesures nouvelles de fiscalité adoptées en lois de finances par la majorité précédente, le total des impôts nouveaux s'élève, pour les deux dernières années du gouvernement Fillon, à près de 30 milliards d'euros, soit davantage que ce que nous avons fait. Il me semble donc que l'idée reçue selon laquelle la gauche augmente les impôts tandis que la droite les diminue doit être révisée...

Chacun a pris sa part dans le nécessaire effort de redressement de nos finances publiques, lequel passe aussi, hélas, par une augmentation de la fiscalité. Mais celle-ci ne peut être le seul levier : le croire n'est pas plus raisonnable que s'imaginer que l'on pourrait se contenter de réduire la dépense.

C'est pourquoi nous avons maintenu la norme du « zéro valeur », tandis que la stabilité des effectifs de l'État sur l'ensemble de la mandature sera assurée. Ainsi, le projet de loi de finances pour 2013 prévoit la suppression de 2 317 postes dans l'appareil d'État et de 1 303 postes au sein des opérateurs, hors Pôle emploi et l'université. Nous compensons donc bien dès l'année prochaine les créations de postes auxquelles vous avez fait référence par des suppressions de postes, de sorte que, sur la durée de la mandature, il y aura une stabilité du nombre des agents de l'État.

Comment maintenir, dans ces conditions, la masse salariale ? Nous le ferons grâce à des mécanismes bien connus : l'« effet noria » - les agents partant à la retraite sont remplacés par des jeunes, moins avancés dans la carrière et donc moins bien rémunérés - et les mesures catégorielles. Nous divisons par deux les avantages catégoriels par rapport à la situation que nous avons trouvée à notre arrivée.

Ces éléments donnent, me semble-t-il, quelque crédit à cette affirmation que je réitère : les dépenses de l'État respecteront la norme du « zéro valeur ».
(Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Vincent Delahaye, pour la réplique.

M. Vincent Delahaye. Monsieur le ministre, je n'avais pas voté les hausses d'impôts proposées l'an dernier, je ne voterai pas non plus celles que vous nous soumettrez cette année. Je pense que vous ne tiendrez pas vos promesses de retour à l'équilibre budgétaire à l'horizon 2017, pas seulement parce qu'elles sont fondées sur des prévisions de taux de croissance trop optimistes, mais aussi parce que vous aurez manqué de courage pour engager les réformes structurelles nécessaires.

M. Alain Richard. Quel sectarisme !

M. Vincent Delahaye. Réduire les dépenses publiques est impératif pour rendre l'État plus juste et plus efficace. Le technicien Mario Monti le fait très habilement en Italie ; il est surtout courageux, et rien n'empêche les femmes et les hommes politiques français de l'être également.

M. Jean-Vincent Placé. C'est un libéral !

M. Vincent Delahaye. Faudra-t-il que nous fassions nous aussi appel à un technicien - on parle beaucoup ces jours-ci de Louis Gallois ! - pour préparer courageusement l'avenir en réduisant notre dépense publique ? L'action du Gouvernement ne doit pas être uniquement guidée par l'envie - bien légitime ! - d'être confirmé lors des prochaines élections. La démocratie ne doit pas être un obstacle à la construction du futur. Soyez courageux, monsieur le ministre, coupez dans les dépenses, et vous aurez notre soutien !
(Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC. - Mlle Sophie Joissains applaudit également.)

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